Essai EMDR

Plainte – souvenir cible – cognition négative
Pour David Servan Schreiber l’EMDR est une technique que nous devions appliquer à notre propre façon de travailler, en fonction et de notre sensibilité et de notre bagage intellectuel.


Plainte – souvenir cible – cognition négative

Un jour mon éditeur m’a demandé d’écrire un livre sur la peinture, je l’ai fait.

En relisant, j’ai appris à peindre.

Dali

J’ai éprouvé le besoin de repenser à ce week-end d’octobre 2003 à Paris où j’ai découvert l’EMDR avec David Servan-Schreiber. Ce jour-là j’ais eu le sentiment que tout ce que j’avais accumulé comme connaissances, commençait tout à coup se décanter. Les choses s’assemblaient de façon cohérente et logique. Enfin une théorie et une pratique pouvaient interférer l’une avec l’autre dans une complémentarité harmonieuse et efficace.

Il ne s’agit pas de dire qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil et que toutes les nouvelles formes de psychothérapies ne sont que des plagias de quelque chose de plus ancien. Dans cette optique, elles découlent toutes plus ou moins de la psychanalyse. Ce que je pense c’est qu’il existe une base commune, un inconscient collectif Youngien qui sert de terreau sur lequel peuvent s’épanouir des écoles qui gardent leurs caractéristiques propres, leurs vérités et leurs réalités spécifiques mais aussi les points qu’elles ont en commun. Ces points communs constituent une richesse universelle qui tendrait plutôt à montrer que nous sommes sur la bonne voie, celle qui vous amène vers une vérité absolue, un réel véritable.

Parler de l’hypnose, des hypnoses (il n’y a pas que celle d’Erickson) je crois que cela a été déjà évoqué. Les états modifiés de conscience, la confusion, le passage d’une veille restreinte à une veille généralisée (Roustang) sont des thèmes communs à ses deux écoles. J’ai préféré axer ma réflexion sur la thérapie brève juste pour mettre d’autres mots sur ce qui se fait apparemment intuitivement en E.M.D.R. Une vision théorique au service d’une technique plus pragmatique.

A) Les thérapies brèves.

D’abord quelques idées fortes présentées comme des axiomes, extraites de la théorie qui sous-tend les thérapies brèves.

1) La difficulté apparaît lorsqu’on se trouve confronté à un évènement traumatisant, douloureux de la vie et qu’on l’a digéré. Un deuil aussi douloureux soit-il, une rupture sentimentale, sont suivis d’une reprise des forces vitales, des occupations qui définissent une certaine façon de vivre.

Le problème apparaît lorsque le sujet reste bloqué face à cette « situation extrême » (Fischer) et qu’il ne peut plus avancer, et ce, quel que soit le degré « objectif » du traumatisme. On dit que Loiseau, ce grand cuisinier a fini par se suicider parce qu’il risquait de perdre sa troisième étoile au Michelin.

2) Paradoxe et contradiction.

La contradiction existe tant qu’il y a un choix possible entre deux alternatives, quelle que soit la douleur de ce choix. Faut-il garder les dix euros ou acheter un gâteau ? Le Cid doit-il garder l’amour d’Elvire ou tuer son beau-père pour sauver l’honneur de la famille ?

Le paradoxe définit une situation où le patient se trouve devant un mur. Il n’a aucun choix possible, ni aller de l’avant, ni faire marche arrière. Il existe des paradoxes ludiques (l’humour avec les jeux de mots, les quiproquos …), des paradoxes pathogènes (la double contrainte) ou thérapeutiques (la prescription du symptôme).

Le paradoxe se construit quand le sujet entremêle des niveaux de logiques différents : « Maman tu me traites comme un enfant » – « Tu es mon enfant ! ».Chacune de ces deux propositions exige une réponse obligatoirement sous peine de punition ou de risque vital. Il existe une troisième proposition négative qui empêche le sujet de sortir de cette situation. Celui qui pose le paradoxe possède une autorité vitale sur celui qui le subit, c’est un parent (la mère souvent), un psychothérapeute, un patron de fac, un guru etc…… A cause de cette proposition négative il est même interdit au sujet de choisir de ne pas choisir, ce qui après tout est un choix comme un autre. Le sujet reçoit l’ordre d’obéir en désobéissant et cet ordre doit être exécuté.

Un maître Zen lève un bâton et harangue ses disciples : « Si vous dites ceci est un bâton vous affirmez et je vous frappe. Si vous dites ceci n’est pas un bâton vous niez et je vous frappe. En dehors de l’affirmation et de la négation parlez ou je vous frappe ! »

Sortir du paradoxe revient à transformer le problème en difficulté, à remettre les choses en mouvement, à redonner à la dynamique psychique jusque là sidérée, paralysée par le paradoxe, une direction vers la recherche d’un sens à attribuer aux événements, à la vie elle-même.

3) La thérapie brève.

Jackson, Erickson, Bateson, Bowen … se connaissaient. Trois directions différentes sont parties d’un brassage d’idées nouvelles et révolutionnaires. Erickson, Zeig, Haley ont choisi l’hypnose, les autres, la thérapie brève dont la définition est des plus simple ; toute thérapie qui dure moins de dix séances. C’était bien sûr en opposition à la psychanalyse. Deux courants principaux sont issus de ce mouvement :

_*1) Le M.R.I. à Palo Alto prône qu’il faut se centrer sur le problème (Watzlawick, Nardone, Fisch, Wittezaele, Garcia …).

_ »J’ai bien entendu votre histoire, mais en quoi pour vous est-ce un problème, et pourquoi maintenant ? » Bernadette, a été victime d’une agression sexuelle à 16 ans qu’elle a niée, même à sa mère qui pourtant se posait des questions. Lorsqu’elle a eu 19 ans, une voisine lui dit qu’elle avait porté plainte contre le même agresseur parce qu’il s’en était pris à sa fille. Elle décide de porter plainte à son tour. La pédopsychiatre lui affirme qu’elle ne sera jamais mise face à lui. A la gendarmerie, on écarte sa mère qui l’avait accompagnée et on la confronte à son agresseur, lequel dans le bureau même du commissaire la menace « de lui faire payer tout ça ». En outre, la femme de l’agresseur accuse Bernadette d’avoir mené son mari devant la justice. Quel sera le souvenir-cible choisi ? Quel est pour vous le problème ? : La salle d’attente quand sa mère est rejetée et qu’elle se sent écrasée par le système, trahie par le mensonge de la pédopsychiatre (et pas le viol, ou les menaces, ou …).

Une fois le problème créé, il débouche pour le patient sur une tentative de solution qui revient souvent à faire  » plus de la même chose « . Ca ne marche pas et ça pérennise et ça aggrave le problème. Pour arrêter de fumer je me dis : « Tu ne dois pas fumer ». Plus je me le dis, plus j’ai envie de fumer ». Cela débouche sur une thérapie, constituée d’une « tâche », une injonction à 180°, une injonction paradoxale : « A partir de maintenant, puisque vous pensez que trois cigarettes sont un minimum, vous les fumerez à 8 heures, 12h15 et à 19h30, ». C’est au point que Fisch aurait voulu qu’on parle d’une thérapie brève centrée sur la tentative de solution, plutôt que sur le problème. Si le sujet ne les fume pas c’est qu’il peut s’en passer. S’il les fume, c’est qu’il obéit à un ordre. Il n’est déjà plus l’esclave de la cigarette.

_*2) Le B.F.T.C. de Milwaukee (De Shazer, Dolan, O’Hamlon, Kim Berg) se définit comme une thérapie centrée sur l’objectif. Le problème, son origine, ses caractéristiques ne font pas l’objet d’une investigation. Au contraire on va demander : « Qu’est-ce que vous désirez vraiment ? Quel est l’objectif que vous espérez ? Qu’est ce que vous devriez faire pour commencer à vous en approcher dés maintenant ? Qu’est-ce qui vous ferait comprendre que votre problème est enfin résolu ? ». Le thérapeute va veiller à recentrer l’objectif sur quelque chose de réalisable, de réaliste, de plausible. « Je serais heureux, j’aurais du travail, l’amour des autres … ». « Oui, mais quel est le premier pas, la première petite chose qui vous fera dire que vous allez vers … ».

4) La théorie des Systèmes

Un système est fait d’un ensemble d’objets, ses composants, de leurs relations réciproques qui maintiennent en place ce système et de leurs attributs personnels, propriétés propres, comportements, mode de vie. Le temps et l’espace font partie du système. La théorie des groupes d’Évariste Galois donne une vision synchronique, celle des classes d’Ashby-Russel permet une vision diachronique.

Un système est pathologique lorsqu’il est rigide, étroit et fermé. Il est étroit s’il n’a que très peu de règles de fonctionnement internes. Il est rigide s’il est spontanément incapable d’adaptation intérieure. C’est le cas d’une famille qui ne prendrait pas en compte que la petite a grandi. Il est fermé s’il est isolé, s’il n’a que peu de contacts avec son milieu. (Le milieu dans un système, c’est ce qu’il y a autour).

Il en découle une attitude thérapeutique spécifique : la déconstruction de Derrida, qui vise l’ébranlement des certitudes, la fissuration des barricades qui bétonnent le système (Fisch, Salomé, …). Pour faire avancer une voiture arrêtée dans une rue en pente, on peut allumer le moteur en regardant où on veut aller (B.F.T.C.). On peut chercher à savoir pourquoi elle n’avance pas et se gratter la tête pendant longtemps (psychanalyse et dérivées), se demander pourquoi ça pose problème qu’elle n’avance pas et si c’est bien la peine de la pousser. (M.R.I …). On peut aussi enlever le frein à main et tout ce qui l’empêche de se mettre en mouvement et voir quel est le penchant naturel de son inconscient quand on le laisse s’exprimer.

Salomé utilise beaucoup les oppositions pour créer des dissociations, un état confusionnel : sensualité et sexualité, culpabilité et culpabilisation, ce que je fais et ce que je suis. Il propose avec beaucoup d’opportunité d’agir sur le plan symbolique là où l’action réelle est impossible. Planter un arbre qui représente une vie trop tôt disparue. Enlever le frein c’est transformer un paradoxe en contradiction, un problème en difficulté, un immobilisme douloureux en un mouvement vers l’espoir. Le sujet découvre ce qu’il ne savait pas, qu’un choix existe toujours. Il a même le droit de choisir de ne pas choisir et donc de rester comme il est. Mais ce n’est déjà plus la même situation qu’au départ, cette fois-ci il l’accepte. La question qui se peut se poser alors est de savoir dans quelle direction va se faire ce mouvement. C’est un axiome de penser que l’inconscient veut notre bien (Young) et que le cheval d’Erickson retrouvera tout seul sa ferme pour peu qu’on le laisse en marche sur la route, qu’on l’empêche de brouter et de se laisser distraire.

La confusion utilisée en thérapie est une technique extrêmement puissante puisqu’elle permet de quitter l’état de veille restreinte chère à Roustang, c’est-à-dire de couper le rôle du cerveau gauche, celui de la logique, du raisonnement du discours digital pour s’ouvrir à un autre monde celui de l’état de veille généralisée, celui du cerveau droit avec les analogies, les associations d’idées, le rêve etc…..

5) L’intégrale des chemins de Feynman.

Dans une expérience classique en physique quantique, on bombarde un écran troué de deux fentes parallèles avec une lumière monochromatique. Sur un écran de contrôle situé derrière on obtient une succession de bandes blanches et de bandes noires. Feynman a démontré que chaque photon passe en même temps par les deux fentes. On peut généraliser ces résultats pour en faire une loi universelle : Un évènement quel qu’il soit, depuis l’évolution de l’univers jusqu’au comportement individuel d’un patient, emprunte toutes les routes possibles en même temps. Une des routes est appréciée avec un temps réel (par exemple, l’évolution de l’univers depuis le big-bang) et toutes les autres sont réalisées dans des temps imaginaires. Pour comprendre ce qu’il se passe en réalité il faut faire la somme des événements qui se trouvent sur chacune des trajectoires possibles et imaginables. Pour Stephen Hawkins le temps réel est en fait le temps imaginaire et ce que nous appelons le temps réel n’est qu’un artefact mathématique qui nous sert à expliquer le monde comme nous voudrions qu’il soit.

Deux familles reçoivent grâce à l’intervention de la Croix Rouge une carte « Je vais bien » d’un de leurs proches, otage dans un pays en guerre. Mais elles savent qu’un des otages avait le choix entre « Je vais bien » ou rien du tout et l’autre « Je vais bien », « Je suis malade », « Je suis très malade ». Les deux familles n’ont pas reçu la même information en regardant pourtant la même carte où il est écrit « Je vais bien ». Elles ont aussi reçu par des chemins imaginaires des cartes qui n’existent pas.

6) Les quatre étages de la perception de la réalité de Bateson d’après Watzlawick.

Au rez-de-chaussée il existe une réalité physique : un feu rouge.

Au premier étage j’acquiers un premier savoir sur cette réalité si grâce à mes cinq sens j’appréhende cette réalité : Je vois le feu rouge.

Au deuxième étage, je gagne un savoir sur ce savoir, un méta-savoir lorsque l’éducation, l’expérience, le bon sens me font découvrir que le feu rouge a une signification : « stop, on ne passe pas. »

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Au troisième étage Je m’enrichis d’un savoir sur ce méta-savoir, un méta-méta-savoir dés que j’ai organisé ma vie autour de cette connaissance. Je peux penser par exemple que je suis en sécurité tant que je ne traverse pas au rouge. Le temps et l’espace appartiennent à cet étage, le bien et le mal aussi. Il y a un présent, un passé, un futur. Le monde extérieur tout autour de moi devient organisé. Il a un sens. Il y a ce que je peux faire, ce que je ne dois pas faire, ce que je dois penser ou ne pas penser etc.

Au quatrième étage, se trouve un méta-méta-méta-savoir. Arrivé là j’aurais une connaissance instantanée, globale, complète, d’une situation, proche de l’expérience mystique ou artistique, du satori Zen. Le beau et le laid, jugements intérieurs remplacent le bien et le mal, jugements extérieurs. Il n’y a plus de notions d’espace ou de temps. C’est ici que la logothérapie de Franckl situe le sens que l’homme donne à sa vie (il s’agit de sa vie intérieure personnelle) et les névroses noogéniques qui apparaissent lorsque ce sens fait défaut.

7) L’impuissance acquise.

Plutôt que de parler de l’hypnose négative d’Araoz, je préfère me référer à l’impuissance apprise telle que Fischer la rapporte dans son livre. Pavlov avait dressé un chien à coups de décharges électriques par le plancher, à manger dans une assiette surmontée d’un cercle et à éviter celle marquée d’un ovale. Lorsque son savoir atteignit le deuxième niveau, il savait déjà qu’il était bon d’éviter l’ovale. Au troisième étage, sa vie (alimentaire) prit une autre dimension. Il y avait un ordre, un sens dans le monde autour de lui dans lequel il vivait. Il ne risquait pas mourir de faim tant qu’il y aurait un cercle au-dessus d’une gamelle. Il y avait un bien et un mal. Mais voilà que le cercle et l’ovale se modifièrent jusqu’à devenir impossible à différencier, jusqu’à ce qu’il ne puisse plus comprendre pourquoi se déclenchaient des décharges électriques. Le chien restait pétrifié. Il était même devenu incapable de chercher à se protéger des décharges en sautant sur un petit muret. Pavlov venait de créer expérimentalement une névrose des camps. Le chien avait appris qu’il ne pouvait prendre aucune initiative, fusse pour sa survie. Il avait appris l’impuissance. La transposition au monde psychopathologique ne pose pas beaucoup de difficultés, on retrouve ces phénomènes chez les femmes battues, les gens maltraités pendant des années, le burn-out, le choc post traumatique…

8) Visiteur, patient et client (Wittezaele).

Le visiteur entre bien dans la boulangerie mais il n’a aucune intention d’acheter quoique ce soit. Ce qu’il veut, c’est surtout ne pas rester sous la pluie, sous le regard critique des autres. Ce sont des patients qui viennent sur contrainte judiciaire, familiale ou professionnelle. Ils n’ont aucune envie de changer quoique ce soit. Il ne faut pas les confondre avec le client désabusé qui n’y croit plus parce qu’on lui propose toujours la même chose, celui-ci ne demande qu’à voir sa curiosité réveillée pour retrouver l’espoir. Le patient lui, vient chercher le pain, il ne participe à rien, il attend de son thérapeute son croissant ou son traitement tout chaud. Le psy doit lui vendre la solution toute faite. Le client, tout au contraire, veut bien se faire aider parce qu’il n’y arrive pas tout seul, mais il est prêt à mettre la main à la pâte et à faire cuire son propre pain, à faire ses propres expériences grâce aux conseils d’un professionnel

9) La construction dans le constructivisme radical.

Deux mains font un certain bruit en se frappant l’une contre l’autre (cela « construit » leurs présences, leurs interaction, leurs rôles, …). Quel est le bruit d’une seule main ? demande le moine Zen.

Au début, il y a quelque chose d’informe qui ressemble à une pièce avec quelque chose qui ressemble à un individu. Watzlawick dit que l’homme est un animal social, il n’existe que dans l’interaction avec d’autres hommes. Arrive quelque chose qui ressemble à un individu qui lui non plus n’existe pas tant qu’il est tout seul. Brutalement la scène s’éclaire et voilà que se construisent des décors, des murs, un bureau, une époque, une certaine heure et des personnages avec des rôles, des attributs, l’espace et le temps qu’ils partagent. Un système se construit et les règles de fonctionnement se créent spontanément. Un sujet prend ou se voit attribuer la position du patient, l’autre celle du thérapeute. L’un aurait pu se présenter comme plombier et cela aurait construit un client à la place du thérapeute. Il n’y a donc de réalité patient-thérapeute que dans ce système là, à ce moment-là, dans ce lieu-ci. Wittgenstein demandait même que ces termes soient publiés barrés (De Shazer). Et voilà que la scène s’anime. Le patient pose un paquet sur la table mais le thérapeute constructiviste se garde bien de l’accepter tel quel : « Je suis nymphomane » ou « Je suis nulle » …. Si cette étiquette, cette auto définition, cette présentation de soi et du monde est acceptée telle quelle, elle devient réelle pour toute la vie du système en place et ne sera plus que difficilement remise en cause. Là-dessus vont s’échafauder des théories, des projets thérapeutiques qui au final confortent pérennisent et aggravent cette première proposition ( « Je suis dépressif parce que je prends des antidépresseurs »)… « Qu’est-ce que vous entendez par-là ? » – « Si je n’ai pas fait l’amour, je ne peux pas dormir » – « Ah ! Si j’ai bien compris vous êtes en train de me dire que vous avez un problème de sommeil ». Voilà un « recadrage », un début de tissage cognitif qui va permettre de trouver une cible, de la construire pour que les interactions suivantes entre les deux protagonistes puissent espérer déboucher sur un changement de type II. Le changement de type I ne fait bouger les choses qu’à l’intérieur du système sans le modifier fondamentalement. Le changement de type II est lui capable de faire évoluer les structures du système dans lequel le patient est enfermé à l’étroit dans un carcan rigide.

B) L’E.M.D.R. : Réflexions sur la plainte et la cognition négative.

La séance d’E.M.D.R. peut se diviser très schématiquement en 4 parties :

_*1) La phase d’introduction où l’on recherche tout de suite les contre-indications vraies (dissociations) ou relatives (examens, procès en cours, vacances dans les jours qui suivent). C’est ici aussi que l’on présente au sujet l’E.M.D.R. et son mécanisme scientifiquement supposé. Puis il faut continuer à rassurer le patient en proposant une entente sur un signal d’arrêt, pour le cas où. En fait, on prend une position basse. Et enfin on cherche à parfaire un climat de confiance avec la construction du lieu sûr, un endroit où il puisse se retrancher, souffler un peu, un petit muret sur lequel il puisse sauter pour se mettre à l’abri.

Le lieu sûr, depuis sa création à travers les paroles du patient, et après son acceptation par le thérapeute, ce qui rend sa réalité plus palpable grâce aux questions sur l’implication des sens, est un passage important. Puisque, et par définition, il ne présente aucun point anxiogène il sert à établir un contact, une relation calme, sereine, sécurisante entre patient et thérapeute. Un climat de confiance. Il permet la découverte de la technique des M.O. (mouvements oculaires), et de leur efficacité quand apparaissent le relâchement et la sensation de bien être. Mais le travail sur le lieu sûr va plus loin. Pour la première fois depuis longtemps le sujet à la sensation de se trouver devant un psychothérapeute qui ne se contente pas d’écouter, il fait quelque chose. Comme d’autres font de l’hypnose ou plantent des aiguilles d’acupuncture, celui-là fait bouger les yeux. Ce n’est pas du tout comme ces psy qui ne font que poser des questions sans jamais parler ou ces médecins qui ne savent que prescrire des médicaments…. Et si en plus les M.O. font pousser des dendrites ou invitent les neurones à cracher des neuromédiateurs dans la cervelle, cocagne !

_*2) Une phase d’investigation. Ici se détermine sur quelles bases va démarrer le traitement et la direction qu’il va prendre. De la méthodologie de sa conduite, dépend la précision, la pureté de la définition de la cible et celle de la cognition négative (C.N.) et au-delà la réussite de la séance. On peut la subdiviser en trois parties qui souvent s’interpénètrent.

_* La recherche de la cible dans le souvenir cible

_* L’exploration conceptualisée, intellectualisée, verbalisée du problème par la recherche de la C.N., de la C.P, le chiffrage du VOC

_* L’exploration du ressenti, du non verbal avec l’étude des sentiments et des émotions, la détermination du degré de détresse (SUD) et la localisation somatique de celle-ci.

_*3) La phase d’intervention avec la désensibilisation, l’installation.

_*4) La clôture de la séance

I) – La plainte

Elle est toujours dans le présent. C’est maintenant que le sujet souffre et c’est pour ça qu’il vient consulter. Au besoin, le M.R.I. ramène la problématique développée au présent. « Oui, et en quoi cette histoire ancienne est un problème pour vous maintenant ». Cette plainte est accueillie avec beaucoup de « gentillesse ». On accepte la présentation et les mots du sujet sans aucun jugement d’ordre moral, religieux, culturel, médical ou psychologique. Beaucoup d’empathie certes, mais pas de sympathie. Il faut rester « technique », professionnel et donc garder une réserve rassurante pour que ce sujet ébranlé dans sa vision du monde et dans ses repères par un état confusionnel et par des flots incessants d’angoisses, puisse se raccrocher à quelque chose de solide.

Sur cette plainte ou en rapport avec elle, va se construire sur les propositions du sujet un souvenir ancien, chargé d’affects. « Je viens parce que j’ai des problèmes sexuels, d’éjaculations précoces ou de baisse de l’érection avant le coït. Je sais que ça vient de mes relations avec mon père ». « Très bien, est-ce que vous voyez un souvenir particulier sur lequel nous pourrons travailler » – « Oui ce jour-là, j’ai failli tuer ma belle-mère ».

Pourquoi travailler dans le passé ? Parce qu’on estime que c’est là que le patient a appris un comportement, une façon de se présenter, une impuissance pour Fischer, et que les résultats de cet apprentissage se poursuivent jusque dans le présent lorsque le sujet se trouve confronté à telle ou telle situation. On peut travailler sur un souvenir plus récent s’il est particulièrement intense et violent. Quelle que soit l’époque « réelle » où cet événement a eu lieu, on le considère dans son actualité sur sa trajectoire de Feynman où le temps est exprimé en nombres imaginaires. C’est là que l’on va déconstruire une certaine façon de voir les choses, une impuissance apprise. Nous évoluons dans la logique d’une causalité circulaire où les événements ultérieurs peuvent modifier ceux qui les ont précédés. Servan Schreiber, parle des réseaux de mémoires pour souligner que le plus important ce n’est pas tant l’histoire des événements que cet apprentissage d’une certaine façon de se présenter face à la vie, une façon d’agir qu’il va reproduire dans d’autres situations comme celles qui lui posent problème aujourd’hui.

Lorsqu’il s’agit d’un souvenir très récent, on travaille un peu différemment. Ce n’est plus une image que l’on analyse et que l’on traitera pendant la désensibilisation mais le film en entier. On le fait défiler en s’arrêtant chaque fois que « l’image saute ».

On peut travailler aussi sur un souvenir du futur pour ce monsieur qui doit parler en public dans quelques jours et qui s’angoisse rien que d’y penser. On peut travailler de fait sur n’importe quelle trajectoire.

Le souvenir est parfois un peu longuet à décrire et le thérapeute a du mal à y retrouver ses petits, c’est-à-dire les points où la plus grosse charge affective reste accrochée. « Mon père est venu me chercher, comme chaque fois qu’il a un problème. Sa femme s’est enfermée chez lui et l’a laissé dehors. J’y suis allé, j’ai hurlé, j’ai frappé à la porte, finalement je l’ai défoncée à coups de pieds ; j’ai frappé ma belle-mère, elle est allée sur le balcon et s’est mise à hurler comme une folle ; je m’y suis précipité avec l’intention de la jeter du 5ème étage. Mon père m’a arrêté. On l’a attachée sur le lit. Les policiers sont arrivés … » – « Bon, mais il me faut une image … Quelque chose qui symbolise l’ensemble de ce souvenir. Un peu, comme une photo à l’entrée du cinéma renseigne sur le film projeté ». Il a choisi la scène du balcon – Pour Bernadette déjà citée, se fut la salle d’attente.

Cette cible va être analysée, précisée, reconstruite à coups de souvenirs sensoriels, d’images visuelles ou sonores, d’odeurs … mais aussi grâce à des émotions, des sensations physiques … Le principe d’incertitude Heisenberg établit que plus on reste loin d’un sujet d’étude et moins on s’en fait une idée précise, mais plus la charge affective, la détresse, l’angoisse sont forts. Plus on descend dans la précision, dans le détail et plus cette cible est immobilisée, sortie du système général, débarrassée de l’angoisse globale. Sur cette scène de viol, on « travaille » sur la main qui est sur la gorge. Elle prouve que « Je ne pouvais rien faire, que ce n’est pas ma faute si … ». Je ne peux peut-être pas encore parler de ma peur, de ma douleur … mais de la main qui me serre la gorge oui. Je peux la voir, le sentir … Parler d’un détail aussi précis, aussi petit, presque anodin par rapport à la masse des angoisses vécues éloigne les connotations ethniques générales, religieuses ou l’interrogation sur les faiblesses psychologiques. Une femme violée peut craindre dans une culture islamique d’être rejetée par le mari, le père, les frères parce que souillée, et « oublier » les souffrances vécues, pendant son agression.

Cette cible est malléable, elle va être triturée, reformulée tout au long de la séance, pendant la recherche des cognitions négatives et positives, et à chaque étape du travail thérapeutique ponctué par les mouvements oculaires… Le patient y trouve plusieurs intérêts. Voilà quelqu’un qui m’écoute parler de mon traumatisme, moi qui n’ai jamais osé en parler à personne. En plus, il comprend ce que j’ai tellement de mal à exprimer. Finalement, je croyais que j’avais vécu quelque chose d’unique, d’insurmontable et je m’aperçois que c’est arrivé à d’autres ou que ce n’est pas aussi extraordinaire que ça. Je relativise puisqu’on en parle tellement facilement tous les deux. Et puis le fait de partager avec quelqu’un ces choses si difficiles à vivre créé un climat de confiance rassurant et sécurisant, peut être aussi un peu irréel. C’est tellement étrange pour moi d’utiliser les mots que j’emploie avec leur crudité ou d’évoquer presque naturellement les détails de ces choses inavouées parce que je les croyais inavouables….

Fisch affirme que dès que le sujet à une idée sur son symptôme, il ne lui est plus soumis. La honte, le dégoût de soi, l’autoculpabilisation trouvent une explication logique, naturelle. Le thérapeute lui, perçoit d’autres modifications au fur et à mesure des reformulassions. Le sujet parle de plus en plus facilement. Des détails viennent nourrir et colorer l’image de départ. La charge émotive baisse (S.U.D.). Le sujet envisage maintenant qu’il aurait pu, qu’il devrait se dire d’autres mots à propos de lui-même ou de sa vision du monde (C.P., V.O.C.).

La construction de ce souvenir, et de cette cible n’est pas toujours aussi facile. On rejette les cibles qui affichent un V.O.C. à 7, marquant par-là que l’histoire est déjà digérée ou que ce n’est qu’un petit problème que le sujet s’autorise à aborder sans trop de retenue parce qu’il y en a un autre bien plus important qui reste encore inavouable. L’utilisation des échelles a le mérite de matérialiser l’évolution des choses au cours de la thérapie, et le fait de ramener le sujet à la froideur des chiffres lui donne peut-être un peu le sentiment d’avoir déjà repris le contrôle de ses angoisses puisqu’il peut les quantifier. La discussion parait même un peu technique, un peu trop branchée sur le cerveau gauche. En fait les échelles permettent surtout au sujet à cause des progrès qu’elles rendent palpables d’entrevoir l’existence d’une évolution, d’un objectif possible, d’une ouverture dans son système cognitif si fermé, si étroit et si rigide, vers une solution, vers un avenir moins douloureux et plus paisible.

Il faut noter la façon de parler du sujet :

Celui-là parle beaucoup, trop facilement. Il met son âme à nu sans aucune pudeur. Est-ce un visiteur de passage ou est-ce quelqu’un qui a du métier, un accro de la psychothérapie ? (On a même employé le terme d’hypochondriaque psychique). Une des techniques consiste à orienter la discussion vers un autre registre, un registre où il sera moins à l’aise, mais peut-être plus naturel, celui de son corps. « Qu’est-ce que vous ressentez là dans vos tripes ? Et où vous sentez ça dans le corps … ? ».

Cet autre patient somatise. Il est mal dans sa peau. Il faut lui arracher les mots de la bouche, lui souffler plusieurs formulations de C.N. … « Je ne vais pas bien parce que je ne vais pas bien ». Il faudra le pousser sur le domaine du verbe « Cette douleur à la poitrine, vous pouvez me la décrire ? » – « Et quand vous sentez cette boule, quels mots vous viennent spontanément à l’esprit ? ». La finalité de ce jeu à somme non nulle (Watzlawick) consiste à faire perdre ses repères au sujet. On l’amène vers un état confusionnel qui va ébranler ses certitudes et déconstruire les idées monolithiques toutes faites qui maintiennent son système cognitif dans son état pathogène, étroit, rigide et fermé.

Il faut se méfier aussi qu’à la gare un train peut en cacher un autre. Le sujet peut étaler un souvenir « présentable »dont il peut parler parce que les souffrances qui l’accompagnent sont sans commune mesure avec les peurs fantasmatiques qui sont attachées à un autre problème beaucoup plus profond. Il en a tellement peur qu’il ne peut pas l’évoquer. On s’en aperçoit parce que le sujet est peut être un peu trop coopératif. Aucune question ne semble ni le choquer, ni lui poser de problèmes de compréhension. Et puis le S.U.D. de la désensibilisation reste bloqué à 2 ou 3. « Parce qu’il me reste cette douleur sur la tempe qui n’a rien à voir avec ma mère. C’est là où mon ex-mari m’a frappé ; j’ai l’oreille qui hurle de douleur. » Voilà pourquoi de temps en temps ce n’est qu’en toute fin de séance que l’on apprend : « Docteur il y a quelque chose dont je n’ai jamais parlé à personne…. » et on apprend en même temps que la journée n’est pas terminée.

II) – La cognition négative

« Pendant que … (vous entendez reformuler aussi froidement la cible) quels sont les mots qui vous viennent à l’esprit et qui disent quelque chose de négatif sur vous, maintenant ».

C’est la formulation que je préfère. Ces mots qui viennent à l’esprit ne sont peut-être que de passage comme les images d’un cauchemar dont on sait qu’elles ne sont pas tout à fait réelles et qu’elles ne durent qu’un temps limité même s’il y a un réveil brutal, des sueurs, des serrements de poitrine … Ces mots qui viennent ont une vie propre, ce n’est pas moi, ce sont eux qui disent du mal de moi. Cette dissociation (Erickson, Salomé, Simonton), cette symbolisation interne (Simonton) permettent aussi de faire baisser la pression des angoisses et des émotions en apportant un recul, une distance.

Servan Schreiber a présenté un certain nombre de caractéristiques dont la présence est obligatoire qui définissent la cognition négative.

1) C’est une croyance, une conviction profonde et pas « mon psy, ma mère disent que … ». Le sujet est réellement enfermé dans un système cognitif étroit, rigide, fermé où rien n’est jamais remis en cause, ni ne semble pouvoir évoluer.

2) Une conviction irrationnelle. « Je vais rater un examen » c’est possible, ça c’est rationnel. « Je suis nul, je vais rater tous mes examens, je ne réussirai jamais rien dans la vie », c’est irrationnel mais ça peut devenir une « prédiction qui se réalise » (Watzlawick), quelque chose que l’on se crée à force de se le répéter, une hypnose négative d’Araoz, le contraire de la méthode Coué.

3) Cette conviction me concerne moi. Le sujet s’exprime à la première personne. « Je suis abandonné » – « C’est bien ma faute ». On n’accepte pas « Mon mari ne n’aime pas » – « Ils m’ont agressé brutalement, ce sont des méchants ». On ne peut pas agir sur les autres, mais on peut travailler sur le vécu que le sujet a de cette scène. L’H.A.P. propose une classification des cognitions négatives selon 4 groupes : responsabilité, sécurité, contrôle, estime de soi. Il s’agit là d’une formulation de thérapeutes de techniciens. Le sujet lui s’exprime avec des mots qui parlent de lui, « Je suis … », de sa culpabilité, de la punition que l’extérieur lui inflige. « Je mérite d’être abandonné … », de son incapacité à aller vers le monde extérieur « Je ne peux pas faire confiance … » ou de recevoir des autres. « Je ne mérite pas d’être aimé … ».

4) La conviction est à cheval sur le passé et le présent. On retrouve l’apprentissage de l’impuissance ou les réseaux de mémoires : « Mon père m’a abandonnée, je suis abandonnée, mon mari m’a quittée, je suis abandonnée … ». Lorsqu’on demande au sujet d’exprimer au présent les émotions qu’il ressent maintenant en revivant une histoire lointaine dans son passé, on crée une confusion. On fait disparaître le temps et l’espace puisqu’on est dans ce bureau à sentir, à toucher, à voir des souvenirs, des images et pas sur les lieux du viol. On se retrouve au quatrième étage de l’échelle de l’appréhension de la réalité de Bateson. On est à la recherche de quelque chose de plus haut. On veut traiter une névrose noogénique, donner un sens à sa vie, tirer une leçon d’un traumatisme, prendre conscience de la modification de la hiérarchie des valeurs auxquelles on croit. Les notions de bien et de mal, s’estompent … Le beau, le laid, semblent plus adaptés à servir la subjectivité.

Jacques Roques apporte encore quelques précisions. La conviction ne prend qu’un secteur de la personnalité, même si c’est un secteur important, chargé d’affects pour le patient, les relations avec sa femme, ses enfants etc. La croyance prend la personnalité entière, elle est plutôt irréaliste et facilement irrationnelle, alors que la conviction serait plus réaliste, plus rationnelle.

Si on était puriste, il faudrait aussi préférer une formulation négative parce que l’inconscient n’entend pas le négatif (Erickson, Watzlawick) – « Je suis nulle » – « Vous voulez dire : que vous n’êtes peut-être pas … capable … capable d’avoir la bonne réaction », surtout si ces mots sont saupoudrés.

5) La cognition négative se concentre avec précision sur la problématique du sujet. C’est là où la formulation de la cible et donc de la cognition négative va devoir être très travaillée sinon on s’engage dans des canaux très secondaires. Jacques Roques souligne que l’acceptation de la cognition négative programme de fait la cognition positive. Une formulation vague abstraite, « Je suis nulle » donne une cognition positive irréaliste « Je suis géniale ». Une formulation précise, concrète, palpable « Je suis incapable de faire un choix » débouche sur « Je décide seule, sans me référer systématiquement à l’autre ». C’est un point de gagner quand on descend d’une croyance à une conviction.

A Paris,

Servan Schreiber

avait évoqué le traitement de la phobie : C’est oui avec l’ E.M.D.R., si elle résulte d’un traumatisme bien défini. C’est non dans le cas de la névrose phobique. Fairnbairn estime que le phobique est un sujet qui est incapable, seul, de décider si une situation est sécurisée ou si elle présente un danger. D’où les réassurances et les conduites d’évitement. Si un sujet dit « Je monte par l’escalier, je suis nul », parce qu’il a la phobie des ascenseurs, il ne présente pas une cible acceptable. C’est une constatation, une description de ce qui se passe depuis des années. A la limite, il y a aussi peu de charge affective que le monsieur qui dirait « Je suis incapable de sauter d’un pont avec un élastique, je suis nul ». Peut-être que de partir sur une autre cognition négative « Je suis incapable de me fier à mon jugement pour traverser la place tout seul ou pour décider tout seul si la situation extérieure est sécurisée ou dangereuse » permettrait d’envisager une ouverture thérapeutique puisqu’on se recentre beaucoup plus sur une problématique.

6) Il faut que cette cognition négative soit généralisable à d’autres secteurs de la vie. Le jeune homme avec ses problèmes d’éjaculation et d’érection qui voulait jeter sa belle-mère par-dessus le balcon a vu venir à son esprit « Je suis incapable de me dominer, de me contrôler. Je peux très bien tomber dans la folie » … et il n’arrive pas à contrôler son érection. Le fait de travailler sur le contrôle de soi sur le balcon, avec l’idée de fortifier le contrôle de soi au lit ramène à l’œuvre d’Erickson et à l’usage des métaphores, voire des rituels thérapeutiques. Et plus la métaphore est éloignée du problème plus l’inconscient réagit efficacement et l’accepte.

7) Il y a toujours une résonance affective. Le premier V.O.C. est à 3 ou 4, le S.U.D. à 8 ou 9. Sinon il faut trouver une autre cible.

8) On définit aussi ce que la cognition négative n’est pas : une simple description de l’évènement « Je me dis que j’ai été violée » ou l’évocation d’un sentiment « Je me suis dit que j’étais un lâche ».

9) Le temps. A mon avis dans cette longue liste de conditions nécessaires pour affirmer qu’il s’agit bien d’une cognition négative et qu’on pourra l’utiliser, il manque l’appréhension du temps chez le sujet sidéré après avoir vécu une situation extrême (Fischer). A la suite du choc, le temps s’arrête. Il est dénié. Le temps qui passe est ramené à une série de cycles : le jour, l’heure. Il n’est que la répétition incessante d’un passé. Cela peut-être un mécanisme rassurant. On continue la routine du travail. On a quelque chose à faire, l’illusion que l’on avance. Mais tout ce qui fait sortir d’une petite vie étriquée, réglée comme une montre peut déclencher une crise d’angoisse. Le sujet se raccroche au passé et cela structure son présent. Le futur n’existe pas. Il n’y a pas d’avenir, pas d’issue, pas d’horizon vers où jeter un regard à la recherche d’un objectif ou d’un début de solution.

Ce déni du temps peut être brutalement instauré par la violence du traumatisme d’une situation extrême : L’annonce d’une maladie incurable, une situation de perte, l’internement dans les camps, la rentrée dans le chômage… La distorsion de la réalité du temps peut résulter de l’apprentissage de l’impuissance quand le sujet a été soumis à des traumatismes chronicisés – femmes battues – enfants martyrs … salariés victimes de burn-out, harcelés …

Le chemin vers la réalisation de soi s’éclaire tout au long de la séance d’ E.M.D.R. au fur et à mesure que l’on voit le sujet réinvestir l’avenir. A un moment, il accepte d’évoquer qu’il pourrait penser autrement de lui-même (cognition positive). Un choix se dessine. Peut-être dans quelques temps … Puis apparaît la vision d’un premier pas possible qui conduira vers un objectif. Un regard nouveau, un présent qui s’ouvre sur un autre avenir. Le passé s’éloigne. Le présent s’épaissit. L’avenir se remplit de projets.

Conclusion

Comment marche l’ E.M.D.R. ?

Il semble y avoir beaucoup de théories qui pourraient apporter un début d’explication. Pour un constructiviste aucune n’est vraie, aucune n’est tout à fait fausse. Mais peu-être que le fait de trouver un peu de ceci ou de cela dans la gestalt, la P.N.L., l’hypnose et pourquoi pas la thérapie brève, signifie que l’inconscient collectif véhicule une base d’idées fondamentales et donc profondes et solides … plus proches de la vérité vraie. En fouillant mes tiroirs je viens de découvrir que Francine est allée à Palo Alto. Je me demande bien ce qu’elle a pu trouver d’intéressant au MRI.

Mais ça, le client ou le patient pour le moment encore désabusé, s’en moque. Lui, ce qu’il voit, c’est que l’ E.M.D.R. est terriblement efficace et que l’action porte d’abord sur la rigidité, l’étroitesse et la fermeture sur lui-même de son système cognitif à lui. La voiture se remet en marche dès qu’on desserre le frein à main. Il voit bien aussi que ça va mieux, que le ciel se dégage et que les processus d’auto guérison deviennent plus adaptatifs. Le cheval d’Erickson s’est remis en marche parce qu’on l’a empêché d’être distrait ou de ne voir les choses que d’un seul point de vue, et voilà qu’il se remet à trottiner gaiement maintenant que les grands espaces de la prairie s’ouvrent devant lui.

Quand le patient parle de ses cognitions, il dit « Je ». Essai de classification mnémotechnique

Cognition négative

Je ne mérite pas de vivre d’être heureux d’être aimé la confiance des gens

Je mérite de mourir d’aller mal de souffrir d’être malheureux d’avoir de mauvaises choses

Je suis seul, abandonné méchant enfermé impuissant, faible stupide décevant insignifiant malade sans recours horrible (du corps) moche (de la tête) honteux

Je ne suis pas assez bien assez important

J’ai fait quelque chose de mal

J’aurais dû faire quelque chose

Je ne peux pas être aimé me faire confiance me fier à mon jugement réussir me protéger obtenir ce que je veux le supporter faire confiance à personne me confier contrôler les choses

Cognition positive

Je mérite d’être aimé d’être heureux de bonnes choses de vivre

Je suis bon valable honorable quelqu’un de bien fort suffisamment intelligent bien tel que je suis en bonne santé attirant aimable en sécurité maintenant

J’ai de la valeur fait de mon mieux survécu droit à l’erreur

Je peux apprendre à me faire confiance apprendre à me protéger le supporter réussir contrôler la situation choisir obtenir ce que je veux être moi-même (droit à l’erreur) être en bonne santé en tirer une leçon utile choisir de me confier

Bibliographie

De Shazer – Différence Satas

– Clés et solutions en thérapie brève Satas

– Les mots étaient vraiment magiques Satas

Dolan – Guérir de l’abus sexuel Satas

Fisch – Tactiques du changement Seuil

Fischer – Le ressort invisible Seuil

Franckl – Des raisons de vivre Tricorne

– Découvrir un sens à la vie, logo thérapie Actualisation

Grosch – Souffrir à force d’aimer Satas

Haley – Stratégies de la psychothérapie Erès

Insoo Kim Berg – Alcool, approche centrée sur la solution Satas

Nardone – L’art du changement Esprit du temps

– Peur panique phobie Esprit du temps

Roques -EMDR Desclée de Brouwer

Vanderlinden – traumatisme sexuel et troubles alimentaires Satas

Watzlawick – Une logique de la communication Seuil

– Le langage du changement Seuil

– la nouvelle communication Seuil

– Changement Seuil

– La réalité de la réalité Seuil

– Faites vous-même votre malheur Seuil

– Comment réussir à échouer Seuil

– Les cheveux de Münchhausen Seuil

– L’invention de la réalité Seuil

– Sur l’interaction Seuil

Wittezaele – aide au contrôle De Boeck

Ne sont pas citées les références concernant l’hypnose (Erickson, Zeig, Malarewick, Haley, Roustang) et la bibliographie de Jacques Salomé.

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