Causes et facteurs de risque des violences sexospécifiques et sexuelles exercées contre les enfants

Partout dans le monde, des enfants sont victimes de la violence sexospécifique et sexuelle. Certains y sont plus exposés que d’autres. Les enfants les plus vulnérables peuvent être détectés en évaluant les dangers liés à leur personne et/ou présents dans leur environnement. Plus les facteurs de risque sont nombreux, plus la probabilité de victimisation est grande. Le présent article se propose de présenter les différents facteurs constituant des indicateurs de risque de violence sexospécifique et sexuelle.


Causes et facteurs de risque

des violences sexospécifiques et sexuelles exercées contre les enfants

Evelyne josse

2007

evelynejosse@yahoo.fr

http://www.resilience.netfirms.com

14 avenue Fond du Diable, 1310 La Hulpe, Belgique

Psychologue clinicienne. Hypnose éricksonnienne, EMDR, thérapie brève

Psychothérapeute en consultation privée, psychologue du programme ASAB, expert en hypnose judiciaire, consultante en psychologie humanitaire

 

Introduction *

Notions de base *

1. Définitions *

1.1. La violence *

1.2. Typologie de la violence *

1.3. La nature de la violence *

1.4. La violence à l’égard des enfants *

1.5. La violence sexospécifique et sexuelle *

1.5.1. La violence sexospécifique *

1.5.2. La violence sexuelle *

2. Le concept de vulnérabilité et de risque *

2.1. La sécurité *

2.2. La vulnérabilité et le risque *

2.3. Les facteurs de risque *

2.3.1. Définition *

2.3.2. Interaction des facteurs de risque *

2.3.3. Facteurs de risque et types de violence *

2.3.4. Exposition aux facteurs de risque *

3. La loi du plus fort *

Les facteurs de vulnérabilité propres à la personne de l’enfant, à un groupe spécifique d’enfants ou au fait même d’être un enfant *

1. L’âge : être un enfant *

2. Le genre : être de sexe féminin *

3. Les enfants privés de la protection d’un parent *

4. Les enfants handicapés ou souffrant d’une pathologie psychiatrique *

5. Les minorités sexuelles : être homosexuel ou transsexuel *

6. Les enfants dont l’histoire est marquée du sceau de la violence sexuelle *

6.2. Les enfants nés de viol. *

6.2. Les antécédents abusifs *

Les facteurs de vulnérabilité environnementaux *

1. Les familles vulnérables *

1.1. La notion de parentalité *

1.2. Violences sexospécifiques et sexuelles extrafamiliales *

1.3. Violences sexospécifiques et sexuelles intrafamiliales *

1.3.1. Pauvreté et indigence *

1.3.2. Les conditions délétères présidant à la parentalité *

1.3.3. Les parents présentant un handicap mental ou un trouble psychologique *

1.3.4. Les parents toxicomanes ou alcooliques *

1.3.5. Les difficultés intrafamiliales et conjugales *

1.3.6. Les parents victimes de violence ou d’abus sexuels dans leur enfance *

2. Les enfants placés dans des contextes à risque *

2.1. Les conflits armés et les situations de post-conflits *

Les situations de post-conflits *

2.2. Les déplacements de population dans le cadre des catastrophes naturelles *

2.3. La vie en rue *

2.4. Les grands centres urbains *

2.5. Le lieu de travail *

2.6. Les centres de détention en temps de paix *

2.7. Les établissements scolaires *

2.8. Les institutions résidentielles de placement *

2.9. Les activités parascolaires *

2.10. Certaines cultures, ethnies et sociétés *

Bibliographie *

L’auteur *

Référence du présent article : « Violences sexospécifiques et sexuelles à l’égard des enfants. Causes et facteurs de risque », Evelyne Josse, 2007, http://www.resilience.netfirms.com

Introduction

Partout dans le monde, des enfants sont victimes de la violence sexospécifique et sexuelle. Certains y sont plus exposés que d’autres. Les enfants les plus vulnérables peuvent être détectés en évaluant les dangers liés à leur personne et/ou présents dans leur environnement. Plus les facteurs de risque sont nombreux, plus la probabilité de victimisation est grande.

Le présent article se propose de présenter les différents facteurs constituant des indicateurs de risque de violence sexospécifique et sexuelle.

Notions de base

1. Définitions

1.1. La violence

L’Organisation Mondiale de la Santé définit la violence comme : « La menace ou l’utilisation intentionnelle de la force physique ou du pouvoir contre soi-même, contre autrui ou contre un groupe ou une communauté qui entraîne ou risque fortement d’entraîner un traumatisme, un décès, des dommages psychologiques, un maldéveloppement ou des privations. »

1.2. Typologie de la violence

La violence peut être définie en fonction du responsable de l’agression :

    •  

    • La violence auto-infligée est dirigée par la personne contre elle-même (suicide, mutilations).
    • La violence interpersonnelle est infligée à une personne par un tiers ou par un petit groupe de tiers. Lorsqu’un acte est le fait d’auteurs apparentés à la victime, on parle de violence familiale (mauvais traitements infligés aux enfants et aux personnes âgées, violence conjugale). Lorsqu’il n’existe pas de liens familiaux entre victime et agresseurs, on parle de violence communautaire (violence entre jeunes, viols commis par un étranger, maltraitance en milieu institutionnel ou sur le lieu de travail, etc.).
    • La violence collective est perpétrée par un groupe important de personnes, voire par des Etats (actes terroristes, conflits armés, oppression des minorités, etc.).

1.3. La nature de la violence

La violence peut être définie en fonction de la nature des actes commis. On distingue :

    • la violence physique
    • la violence sexuelle
    • la violence psychologique (dénigrement, humiliation, intimidation, rejet, etc.)
    • la négligence et les défauts de soins

1.4. La violence à l’égard des enfants

L’UNICEF définit la violence à l’égard des enfants comme « toute violence physique, psychologique (psychosociale) et sexuelle infligée à des enfants par abus, négligence ou exploitation, comme des actes commis ou omis de forme directe ou indirecte (avec une emphase sur la violence intentionnelle), qui met en danger ou nuit à la dignité, à la condition physique, psychologique ou sociale ou au développement de l’enfant. »

Nous le voyons, la violence infligée aux enfants peut aussi bien être de nature physique, sexuelle que psychologique. Par exemple, un garçonnet peut être battu, violé et humilié par son beau-père.

Par ailleurs, les enfants peuvent être victimes de la violence interpersonnelle, familiale ou communautaire, ainsi que de la violence collective. Par exemple, une fillette peut subir un inceste dans son propre foyer, être sexuellement agressée par un gang semant la terreur dans son quartier ou être violée par un milicien exhorté par ses chefs à adopter cette arme dans le cadre d’un conflit armé.

1.5. La violence sexospécifique et sexuelle

1.5.1. La violence sexospécifique

On nomme violence sexospécifique, violence basée sur le genre (en anglais, gender-based violence ou GBV) ou bien encore violence sexiste, tout acte perpétré contre la volonté d’une personne et résultant de son appartenance biologique ou de son rôle spécifique en tant qu’être sexué. Elle est engendrée au nom de croyances, de traditions, de comportements ou d’attitudes dommageables envers les individus en fonction de leur sexe.

La violence sexospécifique concerne les enfants tout autant que les adultes. Les enfants des deux sexes peuvent en être la cible. Néanmoins, les filles en font plus fréquemment les frais que les garçons et ce, partout dans le monde.

1.5.2. La violence sexuelle

La violence sexuelle est un type spécifique de violence basée sur le genre. Elle peut-être définie comme « tout acte sexuel, tentative pour obtenir un acte sexuel, commentaire ou avances de nature sexuelle, ou actes visant à un trafic ou autrement dirigés contre la sexualité d’une personne utilisant la coercition, commis par une personne indépendamment de sa relation avec la victime, dans tout contexte, y compris, mais s’en s’y limiter, le foyer et le travail ».

Même si les garçons sont susceptibles d’être victimes de ce type d’agression, les filles y sont notablement plus exposées et ce, quel que soit le motif de l’auteur.

2. Le concept de vulnérabilité et de risque

2.1. La sécurité

Selon l’Organisation mondiale de la Santé, « la sécurité est un état où les dangers et les conditions pouvant provoquer des dommages sont contrôlés de manière à préserver la santé et le bien-être des individus et de la communauté. C’est une ressource indispensable à la vie quotidienne qui permet à l’individu et à la communauté de réaliser ses aspirations. La sécurité est considérée comme un état résultant d’un équilibre dynamique qui s’établit entre les différentes composantes d’un milieu de vie donné. Elle est le résultat d’un processus complexe où l’être humain interagit avec son environnement ».

2.2. La vulnérabilité et le risque

La sécurité des personnes découle donc d’une interaction de facteurs de protection personnels et environnementaux. A contrario, en santé publique, le concept de vulnérabilité est intimement lié à l’idée de danger et renvoie à la notion de risque.

Le risque est la probabilité de subir un dommage ou une perte quelconque (d’ordre physique, psychologique, matériel, etc.). Un individu ou un groupe est vulnérable s’il est prédisposé à subir une issue négative par rapport à un problème donné. Cette prédisposition relève d’un système d’interrelations entre des caractéristiques propres à la personne ou au groupe (caractéristiques physiques, biologiques, psychologiques, etc.) et des variables inhérentes à l’environnement (environnement physique, familial, culturel, technologique, politique, social, économique, organisationnel, etc.).

2.3. Les facteurs de risque

2.3.1. Définition

On nomme « facteurs de risque », les variables, les caractéristiques, les processus, les conditions, les faits, les interactions et les relations qui influencent une personne ou un groupe de personnes ou son milieu et qui constituent un danger ou une menace spécifique par rapport à un problème donné. Ainsi, il est possible d’identifier des indicateurs prédisposant des enfants ou des groupes d’enfants à subir une agression sexospécifique ou sexuelle.

Notons qu’un risque représente la probabilité d’être exposé à un danger et non une certitude. Dans bon nombre de situations, il est d’ailleurs difficile, voire impossible, de déterminer avec exactitude dans quelle mesure un facteur de risque contribue à subir un dommage. Il n’existe bien souvent pas de relation directe et immédiate de cause à effet entre un risque et une issue particulière. Par exemple, si la pauvreté est un facteur prédisposant à la violence familiale, il serait évidemment totalement inexact d’affirmer que toutes les familles en situation précaire sont maltraitantes.

Soulignons encore que la notion de risque est un concept relatif. En effet, tous les facteurs de risque ne possèdent pas la même valeur prédictive. Ainsi, un élément pourra contribuer faiblement à une situation de danger tandis qu’un autre pourra déterminer une menace quasi certaine. Par exemple, résider dans une institution pour enfants handicapés en Belgique n’engendre qu’un risque quasi nul d’être exposé à une maltraitance sexuelle tandis qu’être une fille des rues à Ouagadougou (Burkina Faso) s’avère un risque majeur.

Les facteurs favorisant une agression sont de deux ordres : les facteurs propres à l’individu ou au groupe et les facteurs environnementaux.

    •  

    • les facteurs propres à l’individu ou au groupe. Ces caractéristiques sont de nature biologique (par exemple, le genre, l’âge, l’hérédité, la « race », etc.), physique (par exemple, la force, l’état de santé, etc.), psychologique (par exemple, l’histoire individuelle, l’aptitude à faire face aux problèmes, les compétences émotionnelles, cognitives, intellectuelles, etc.), comportementale (par exemple, la capacité à se protéger, à se défendre, le degré de soumission à l’autorité, etc.), psychosociale (situation personnelle, degré d’autonomie), etc.

L’âge, la dépendance vis-à-vis des adultes, le handicap physique ou mental, la pathologie psychiatrique et l’absence de protection d’un tuteur accroissent le risque qu’un enfant subisse une violence sexospécifique ou sexuelle.

    •  

    • les facteurs environnementaux. Ces variables englobent la situation géographique, le lieu de vie, la famille, la société, la communauté, le milieu culturel, religieux, socioéconomique et démographique, etc.

Certaines normes culturelles ou religieuses, le racisme, le sexisme, la discrimination, la destruction d’identités culturelles (par exemple, dans les situations de guerre, de conflit armé, de génocide, etc.), la promotion d’idées et d’attitudes prônant la violence (par les autorités, les médias, etc.), la précarité, les dysfonctionnements familiaux ou communautaires, l’isolement de la collectivité et la promiscuité (par exemple, dans les situations de détention, en institutions résidentielles, etc.) sont autant de facteurs majorant le risque de déclencher, d’activer ou de susciter l’agression sexospécifique ou sexuelle envers les enfants.

2.3.2. Interaction des facteurs de risque

La vulnérabilité des enfants aux agressions sexospécifiques et sexuelles dépend autant de caractéristiques propres à l’enfance (par exemple, une force physique inférieure à celle des adultes, la dépendance aux adultes, etc.), à un groupe spécifique d’enfants (par exemple, les handicapés, les enfants des rues, les filles, etc.) ou à la personne d’un enfant (par exemple, fragilité résultant d’événements de l’histoire personnelle) que du degré d’exposition au danger ou à la menace (par exemple, présence de pédophiles dans l’entourage immédiat, contexte de conflit armé, etc.). C’est la superposition, la combinaison et l’interrelation des facteurs individuels et environnementaux qui déterminent la probabilité d’une issue néfaste. L’agression est donc la résultante d’interactions complexes entre différentes variables.

2.3.3. Facteurs de risque et types de violence

Certains facteurs de risque correspondent à une forme spécifique de violence (par exemple, la violence sexuelle) mais le plus souvent, ils signent la vulnérabilité d’une personne ou d’un groupe de personnes à divers types de violence (par exemple, à la violence sexuelle, physique et psychologique). Ainsi, il est fréquent qu’un enfant à risque de subir une agression sexospécifique soit exposé à des violences d’une autre nature. Par exemple :

      • Un enfant victime d’inceste risque également d’être battu, injurié et dévalorisé par ses parents.
      • Les enfants des rues sont victimes des agressions sexuelles commises par leurs pairs mais ils sont également exposés à la violence des habitants des quartiers où ils séjournent. Les vindictes populaires sont un exemple de cette violence. Lorsqu’un enfant est surpris en flagrant délit de vol, c’est toute la population présente qui se précipite pour le molester, généralement jusqu’à ce que mort s’en suive.
      • Dans certaines sociétés, la fille violée se voit imposer d’épouser son agresseur afin de laver l’honneur de sa famille.
      • Une petite fille sexuellement mutilée peut aussi être sous-alimentée, négligée lorsqu’elle est malade et privée de scolarité. De plus, elle est peut-être obligée de porter une tenue traditionnelle effaçant les marques de féminité et ne peut se déplacer librement au sein de sa communauté. Elle risque également d’être mariée précocement, d’être violée par son époux et d’être engrossée de force.

2.3.4. Exposition aux facteurs de risque

Plus un enfant ou un groupe d’enfants est exposé longuement (par exemple, interactions quotidiennes de l’enfant avec son père incestueux) et/ou à de nombreux facteurs de risque (par exemple, enfant handicapé, orphelin, de sexe féminin, dans un pays en guerre) et/ou à des facteurs de risque majeurs (par exemple, contexte de guerre, société prescrivant les mutilations génitales), plus il est susceptible de subir une violence sexospécifique ou de nature sexuelle.

3. La loi du plus fort

Par « loi du plus fort », j’entend l’usage abusif d’une position dominante par une personne ou un groupe de personnes dans le but de parvenir à ses fins (imposer ses normes, ses désirs, sa volonté, tirer un profit ou un bénéfice quelconque, humilier, etc.).

La « loi du plus fort » peut impliquer le recours à la violence, à la coercition, à l’intimidation, à la menace, à la manipulation, à la duperie, à l’abus du lien affectif, au chantage ou à tout autre moyen conférant un avantage à une personne ou à un groupe de personnes dans une relation donnée.

Dans la relation adulte-enfant, l’adulte est indéniablement le plus fort. En effet, sa situation d’autorité, ses ressources, sa force physique, sa taille, ses connaissances, son expérience relationnelle, etc. sont sans commune mesure avec celles des enfants. Ces avantages lui confèrent un pouvoir qu’il lui est aisé d’exercer sur l’enfant. Cette supériorité est renforcée par le fait que le plus faible, l’enfant, est dépendant pour sa survie du plus fort, l’adulte, et qu’il lui accorde sa confiance, qu’il croit lui devoir obéissance, qu’il désire conserver son affection, qu’il n’est pas en mesure d’appréhender ou de refuser les situations qui lui sont imposées, qu’il est démuni face à l’appareil judiciaire et policier, etc.

 

Quel que soit son sexe, son âge et son origine, aucun enfant n’est totalement à l’abri des violences sexospécifiques et sexuelles. Néanmoins, certains y sont exposés plus que d’autres du fait de leur état de santé physique ou mental, de leur situation familiale, de leur cadre de vie, etc.

Les facteurs de vulnérabilité propres à la personne de l’enfant, à un groupe spécifique d’enfants ou au fait même d’être un enfant

Parmi les facteurs de vulnérabilité propres à un enfant, à un groupe d’enfants ou au fait même d’être enfant, citions :

    • l’âge
    • le genre
    • l’absence de protection de la part des parents ou d’un représentant légal
    • le handicap et la pathologie psychiatrique
    • l’orientation sexuelle
    • une histoire marquée par la violence sexuelle

1. L’âge : être un enfant

L’immaturité (physique, psychologique, émotionnelle, intellectuelle, etc.) liée au jeune âge est un des déterminants de la violence sexospécifique et sexuelle exercée par les adultes à l’égard des enfants. En effet, les enfants sont dépendants des adultes auxquels ils accordent généralement leur confiance, ils manifestent souvent une attitude de docilité face à l’autorité, ils n’ont pas la force physique qui leur permettrait de repousser l’agresseur, ils sont limités dans ce qu’ils peuvent exprimer, ils ignorent leurs droits, ils peuvent facilement être dupés en raison de leur naïveté, ils ne comprennent pas nombre de situations, etc.

2. Le genre : être de sexe féminin

Les filles sont plus fréquemment que les garçons la cible de violences sexospécifiques et sexuelles. Ceci est vrai partout dans le monde et pour la majorité des formes que peuvent revêtir ces maltraitances (viol, inceste, rapports forcés, mariage forcé, grossesse forcée, mutilations génitales, esclavage sexuel, prostitution forcée, traite des êtres humains, etc.). Le risque de subir une violence sexuelle s’accroît encore au début de l’adolescence.

3. Les enfants privés de la protection d’un parent

Les enfants ne bénéficiant pas de la protection directe d’un parent encourent un risque accru d’être victimes de violence sexospécifique et d’exploitation sexuelle. Leur isolement les rend plus susceptibles que d’autres d’opter pour la vie en rue, d’être recrutés par des milices (de gré ou de force), de tomber dans les filets de la traite des êtres humains, de recourir à la prostitution, de rallier des gangs et d’être placés en famille d’accueil ou en institution ; toutes situations qui les exposent peu ou prou à de nouvelles agressions.

Les enfants les plus à ciblés sont :

    •  

    • Les orphelins. Les guerres, les catastrophes naturelles, les épidémies (paludisme, choléra, Ebola, etc.), la pandémie du SIDA et les famines sévissant de par le monde laissent de nombreux orphelins sans ressource.
    • Les enfants coupés accidentellement de leur famille lors des migrations de population (dans le contexte de conflits armés, de catastrophes naturelles).
    • Les enfants délibérément abandonnés ou rejetés.
      • Dans certains pays, les jeunes filles-mères sont rejetées par leur famille car elles sont sources de honte.
      • Tenus pour responsables d’un malheur frappant leur entourage (maladie, décès, divorce, perte d’emploi, dettes, etc.), des enfants sont accusés par leur famille ou leurs voisins de détenir et d’user de pouvoirs maléfiques. Crédités de sorcellerie, ils sont souvent gravement maltraités et chassés de leur foyer.
      • Les enfants soldats démobilisés sont généralement reniés par leur famille en raison de la peur (à cause de leur comportement) ou de la défiance qu’ils inspirent (du fait des atrocités qu’ils ont commises).

4. Les enfants handicapés ou souffrant d’une pathologie psychiatrique

Les enfants souffrant d’un handicap (déficiences ou incapacités physiques, mentales, cognitives, sensorielles, communicationnelles, etc.) ou d’un trouble psychiatrique (mais également les prématurés et dans certaines contrées, les jumeaux et les albinos) réunissent de nombreux facteurs de vulnérabilité et sont exposés, dans tous les contextes (le foyer familial, la rue, les établissements scolaires, les institutions judiciaires, etc.), aux maltraitances en tous genres, notamment aux abus sexuels. Les plus vulnérables sont les handicapés mentaux et les enfants présentant une pathologie psychiatrique. En effet, leur incapacité à se défendre (par exemple, lorsqu’ils présentent de l’inhibition, de la passivité, une absence de réaction agressive, une confiance démesurée envers autrui, etc.), leur difficulté, voire leur totale incompréhension des situations (du fait de la carence de leurs capacités cognitives, de la pauvreté de leur imagination, de délires, etc.) ou à communiquer (à cause d’une mutité, d’une absence de langage ou de troubles de la personnalité) concourent à accroître le risque de victimisation. Ces facteurs facilitent tant la maltraitance intrafamiliale que la violence interpersonnelle exercée par les pairs (enfants des rues, camarades de classe, etc.) ou infligée par les adultes (non apparentés, proches ou inconnus).

La violence intrafamiliale s’explique également par le fait que le handicap ou la particularité de l’enfant constitue une entrave à la formation du lien d’attachement (nourrisson séparé de sa mère et placé en couveuse, enfant décevant par rapport aux attentes parentales, difficulté à entrer en communication avec lui, valeur surnaturelle attribuée à sa singularité, etc.).

La vulnérabilité aux agressions sexuelles des enfants handicapés ou présentant des troubles graves de la personnalité est majorée par le fait qu’ils vivent souvent dans un véritable désert affectif, aussi bien en famille qu’en institution, quel que soit leur âge et les apparences et ce, dans de nombreux pays. Cette fragilité est d’autant plus importante qu’ils sont isolés et privés de contacts sociaux ou que la culture méprise les personnes handicapées (ce qui, dans tous ces cas de figure, rend la dénonciation des abus et l’appel à l’aide malaisés). En effet, dans les pays occidentaux, de nombreux handicapés sont isolés de la communauté car ils sont « enfermés » dans des institutions spécialisées (isolement géographique). En Afrique, les infirmes sont « visibles », le plus souvent au cœur même de la cité. Ils mendient aux carrefours et aux abords des supermarchés fréquentés par les nantis, exhibant leur handicap dans le but d’apitoyer les passants. Néanmoins, ils sont fréquemment déconsidérés, moqués et rejetés aux marges de la société (distanciation émotionnelle et isolement « social »). Cette mise à l’écart s’explique par la crainte qu’ils inspirent (surtout en ce qui concerne les jumeaux, les albinos et les personnes présentant un handicap mental ou psychiatrique), leur particularité étant considérée comme le stigmate d’une puissance occulte (bénédiction ou malédiction), ce qui suppose qu’ils entretiennent une relation privilégiée avec les puissances « invisibles ».

Le risque d’abus sexuels est d’autant plus important que le handicap s’accompagne d’une grande proximité physique avec un ou plusieurs adultes. En effet, les soins imposent généralement une proximité corporelle entre l’enfant et le dispensateur de soins (parent ou personnel de l’institution spécialisée). Petit à petit, ces contacts peuvent déboucher sur des rapprochements malsains. De plus, la dépendance motrice des adolescents atteints d’infirmité ou de paralysie sévères pose la question de l’aide d’un tiers pour faciliter les satisfactions sexuelles « solitaires ». Si ces services particuliers ne peuvent être confondus avec des abus d’ordre sexuel, il n’en reste pas moins qu’ils peuvent avoir pour effet d’augmenter la suggestibilité sexuelle des sujets et préparer le terrain d’une interaction abusive. Le fait que les enfants ne bénéficient pas d’une information adaptée sur la vie sexuelle jouerait un rôle aggravant.

Comme nous l’avons signalé ci-dessus, les enfants souffrant de handicap mental ou de pathologies psychiatriques peuvent présenter de l’inhibition et de la passivité. Ils peuvent également manifester de la désinhibition, de l’excitation et de l’agressivité qui, couplées aux pulsions sexuelles et à la promiscuité, peuvent favoriser, notamment à la puberté et à l’adolescence, des passages à l’acte violents envers d’autres résidents.

5. Les minorités sexuelles : être homosexuel ou transsexuel

Les jeunes homosexuels et bisexuels ainsi que les transsexuels des deux sexes sont particulièrement vulnérables au préjudice sexuel car leur comportement est perçu comme transgressant les normes sociales et les codes moraux. Dans certaines sociétés, ils sont punis en étant violés.

Soulignons que certains jeunes sont jetés hors de leur foyer en raison de leur orientation sexuelle. Ils gagent alors la rue où ils sont pris pour cible parce qu’ils ne sont pas, là non plus, socialement acceptables.

6. Les enfants dont l’histoire est marquée du sceau de la violence sexuelle

Les enfants issus de viol et ceux qui ont déjà subi des violences sexuelles courent davantage de risque d’expérimenter de nouvelles agressions sexuelles dans leur enfance, leur adolescence et leur vie adulte.

6.2. Les enfants nés de viol.

Les enfants nés d’un viol rappellent à l’entourage les circonstances tragiques de leur conception. Ceci explique le fait qu’ils soient fréquemment maltraités même lorsque les jeunes filles et/ou leur famille a/ont résolu de les garder. Or, tout contexte de violence physique favorise le risque d’agression sexuelle. Soulignons aussi que dans bon nombre de ces enfants sont le fruit d’abus intrafamiliaux. Ils sont donc dès leur naissance plongés dans un système à transaction incestueuse.

Dans les pays en voie de développement, lorsqu’ils sont négligés ou abandonnés, les enfants issus du viol viennent fréquemment grossir les rangs des enfants des rues. Dans les pays en guerre, ils sont des proies faciles pour les belligérants qui les recrutent en qualité d’enfants soldats (filles et garçons). Ces contextes les exposent à des risques multiples de violence, notamment sexuelle.

6.2. Les antécédents abusifs

Diverses études ont montré que des antécédents abusifs représentent un facteur de risque de victimisation ultérieure, notamment sexuelle.

Par exemple, des enfants fuient leur domicile parce que leurs parents les agressent physiquement ou sexuellement et gagnent la rue, ce qui les expose à de nouvelles agressions, notamment sexuelles. D’autres vivant une situation analogue sont placés par les services de protection de l’enfance dans des foyers pour jeunes où ils expérimenteront peut-être d’autres abus sexuels.

Les jeunes ayant subi des violences sexuelles ont souvent une piètre estime d’eux-mêmes et présentent fréquemment des états dépressifs. Cela pourrait expliquer, du moins partiellement, le fait qu’ils négligent leur corps, leur santé, leur sécurité, etc. De plus, ils courent un risque important de consommation abusive d’alcool et de drogue (surtout à partir l’adolescence). Les substances psychotropes diminuent la capacité du consommateur à percevoir les signes de danger et en conséquence, de s’en protéger. Par ailleurs, les lieux de consommation sont des endroits propices aux rencontres avec un agresseur.

La survictimisation trouve probablement aussi son origine dans l’isolement social. En effet, les jeunes ayant subi des agressions sexuelles se marginalisent (ils deviennent, par exemple, des enfants des rues, rallient un gang) et deviennent alcooliques, toxicomanes, délinquants, etc. Ces comportements viennent renforcer la « déliaison » sociale. L’entourage (famille élargie) et la communauté les craignent et les tiennent donc à distance. Or, la disponibilité d’adultes référents et la solidarité d’un réseau communautaire leur offriraient certainement une protection contre la violence et ses effets.

 

Il semble exister également une corrélation importante entre les antécédents de violences sexuelles subies dans l’enfance et le basculement dans la prostitution. Trinquart rapporte qu’en France, 80 à 95% des personnes prostituées de souche française (ce chiffre ne comprend pas les personnes victimes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle) présenteraient de tels antécédents. Dans certaines sociétés, la virginité et la chasteté des filles reflètent l’honneur de la famille. Dès lors, les agressions sexuelles sont vécues comme une honte. Les victimes sont mises au ban de la communauté et sont parfois chassées du foyer parental (surtout si le viol débouche sur une grossesse). Isolées et sans ressource, le commerce du sexe est souvent le moyen le plus immédiat qui s’offre à elles pour assurer leur survie.

Cette vulnérabilité accrue aux agressions sexuelles s’explique probablement aussi par un apprentissage de schémas de victimisation. Par exemple, dans le cas de la prostitution, il semble exister une répétition ou une continuité de la situation de maltraitance subie dans l’enfance.

Les facteurs de vulnérabilité environnementaux

1. Les familles vulnérables

1.1. La notion de parentalité

Le concept de la parentalité a émergé il y a quelques années dans le champ social, psychologique et juridique. Selon A. Maigne, la parentalité est « l’ensemble des réaménagements psychiques et affectifs qui permettent à des adultes de devenir parents, c’est-à-dire de répondre aux besoins de leur(s) enfant(s) à 3 niveaux : le corps (les soins nourriciers), la vie affective, la vie psychique » .

Selon Housel, la parentalité se décline selon trois axes :

    •  

    • l’axe de l’expérience subjective de la parentalité. C’est la dimension subjective, affective et imaginaire du fait d’être parent (ressenti, éprouvé, vécu par rapport au fait de se sentir ou non parent d’un enfant donné).
    • l’axe de l’exercice de la parentalité. C’est l’exercice de la responsabilité parentale (droits et devoirs) envers l’enfant (obligation de choix, de surveillance et de protection par rapport à l’éducation et la santé).
    • l’axe de la pratique de la parentalité. Ce sont les actes concrets posés dans la vie quotidienne par les parents vis-à-vis de leur progéniture (soins : alimentation, hygiène, soins médicaux, etc. ; tâches domestiques : entretien du linge, du logement, etc. ; garde : surveillance, présence auprès de l’enfant ; éducation : acquisition des comportements sociaux, stimulation dans les apprentissages, etc.).

Certains types de situation fragilisent l’exercice, l’expérience et/ou la pratique de la parentalité et exposent les enfants à la violence et en particulier aux agressions sexospécifiques et sexuelles.

Au niveau familial, les facteurs de risque comprennent :

    • la précarité socioéconomique
    • des conditions délétères présidant à la « parentalité » (parents mineurs, foyer monoparental, parents d’un enfant nés du viol)
    • le handicap mental et les troubles psychiatriques des parents
    • la toxicomanie et l’alcoolisme des parents
    • les difficultés intrafamiliales et conjugales
    • les antécédents de victimisation des parents (violence familiale, abus sexuels)

Dans une certaine mesure et jusqu’à un certain point, ces facteurs de risque concernent également l’environnement humain plus large avec lequel l’enfant entretient des relations sociales proches (partenaire amoureux, pairs, famille élargie, voisinage, personnel éducatif et pairs au sein des associations fréquentées par l’enfant ou des résidences de placement, etc.).

1.2. Violences sexospécifiques et sexuelles extrafamiliales

Dans de nombreux pays, la pauvreté et l’indigence compromettent l’exercice (difficultés à garantir la protection de ses enfants et à veiller au respect de leurs droits) et la pratique (difficulté à assurer leurs besoins de base) de la parentalité. Les difficultés pécuniaires expliquent, au moins partiellement, les risques de violence encourus par les enfants. En effet, les enfants des deux sexes issus de familles économiquement précaires, obligés précocement de travailler, peuvent être exposés à des risques d’exploitation sexuelle.

Par exemple :

      • Les enfants qui échouent dans la rue en quête d’une activité de survie (mendiants, cireurs, livreurs, laveurs de pare-brise, marchands ambulants, etc.) courent le risque d’être sexuellement agressés par d’autres enfants des rues, des clients du commerce sexuel, des agents des forces de l’ordre, des riverains ou des passants.
      • Dans certains pays, les enfants précarisés se livrent à des relations sexuelles avec des adultes afin de pouvoir subvenir à leurs besoins ou à ceux de leur famille (« sexe de survie »).
      • Des enfants quittent leur famille et s’engagent comme soldat pour pouvoir se nourrir. Ils sont souvent utilisés comme esclaves sexuels pour assouvir les besoins des aînés.

Plus encore que leurs frères, les filles pauvres risquent d’être violées en raison de leurs activités quotidiennes.

Par exemple :

      • Elles exercent leurs activités (ramassage du petit bois, travaux champêtres, etc.) dans des lieux écartés. Cette situation offre les conditions de discrétion requises aux agresseurs pour commettre leurs méfaits.
      • Elles sont parfois obligées d’exercer des métiers où le risque de violences sexuelles est élevé (par exemple, l’industrie du sexe).
      • Elles sont engagées par des familles pour remplir diverses tâches ménagères et se voient également contraintes de satisfaire sexuellement les hommes de la maison.

1.3. Violences sexospécifiques et sexuelles intrafamiliales

1.3.1. Pauvreté et indigence

La pauvreté et l’indigence augmentent aussi le risque qu’un enfant soit victime de violence sexospécifiques et sexuelles au sein même de sa famille.

Par exemple, en ce qui concerne la violence sexuelle :

      • Les difficultés financières et les nombreux problèmes qu’elles entraînent (sous-alimentation, impossibilité de se soigner, expropriation d’un logement dont le loyer est impayé, tracasseries administratives, etc.) constituent une source importante de stress. La difficulté à gérer les tensions et la fatigue fragilisent les adultes et sont susceptibles d’entraver leurs compétences parentales. Cette situation entraîne un risque accru de passage à l’acte violent et de maltraitance sexuelle à l’égard des enfants.

Par exemple, en ce qui concerne les violences sexospécifiques :

      • En matière de scolarité et de soins de santé, les parents pauvres privilégient généralement leurs fils au détriment de leurs filles car ils sont redevables traditionnellement de les soutenir durant leur vieillesse.
      • Pour avoir une bouche en moins à nourrir ou dans l’espoir d’un revenu supplémentaire, les familles pauvres vendent parfois leurs filles à des trafiquants d’êtres humains, dupés par la promesse de leur trouver un emploi de domestique.
      • Des raisons similaires poussent les parents à marier précocement leurs fillettes.

1.3.2. Les conditions délétères présidant à la parentalité

Les conditions dans lesquelles les personnes sont amenées à devenir parents ou à exercer leur rôle de parents sont susceptibles de pervertir l’expérience de la parentalité (difficulté à se sentir parent, à s’assumer ou à se comporter comme tel dans une situation spécifique). Ces conditions particulières peuvent contribuer à accroître le risque de violence, notamment d’ordre sexuel, envers les enfants.

    •  

    • Les parents mineurs. Le risque de maltraitance physique et d’agression sexuelle intrafamiliale s’accroît lorsque la mère est mineure. Plus une jeune fille devient mère à un âge précoce (avant l’âge de 18 ans), plus le risque d’agression sexuelle vis-à-vis de l’enfant augmente.
    • La vie en foyer monoparental (mère célibataire, couple séparé). La vie en foyer monoparental augmente le risque d’inceste, principalement à partir de la puberté. L’absence d’un tiers séparateur et protecteur favorise la formation d’une dyade parent-enfant pathologique.
    • La mère d’un enfant né du viol. Les enfants issus d’un viol courent un risque élevé d’être victimes de violence, et notamment de violence sexuelle, de la part de leur mère et/ou de sa famille (voir supra).

1.3.3. Les parents présentant un handicap mental ou un trouble psychologique

Le handicap mental et les troubles psychiatriques (psychose, dépression, etc.) promeuvent les troubles de l’attachement et handicapent l’expérience (difficulté à se sentir parent), l’exercice (défaut de relations structurantes) et la pratique de la parentalité (par exemple, comportement aberrant). Ces conditions favorisent les dérives violentes, y compris sexuelles.

L’absence d’éducation affective et sexuelle des membres de la famille potentialise le risque de passage à l’acte sexuel.

1.3.4. Les parents toxicomanes ou alcooliques

L’alcool et certaines drogues entravent l’exercice (difficultés à assumer l’autorité, incitations à des comportements asociaux, etc.) et la pratique de la parentalité (négligence, comportement inadéquat et labile). Ces substances sont des facteurs désinhibants qui favorisent les passages à l’acte violent, notamment les agressions sexuelles intrafamiliales.

1.3.5. Les difficultés intrafamiliales et conjugales

Les familles à interactions violentes sont plus susceptibles que les autres de maltraiter sexuellement leurs enfants. Les passages à l’acte violent témoignent de la difficulté qu’éprouvent les parents à maîtriser leurs pulsions et leurs émotions.

Les familles traversant une période conjugale ou matrimoniale tendue (par exemple, en cours de séparation ou en instance de divorce) risquent davantage de maltraiter leur enfant. Ce risque est accru quand l’un des parents est évincé de la relation (absence d’un tiers séparateur).

Les événements hautement stressants (maladie d’un parent ou d’une personne signifiante, deuil significatif pour l’un des parents, accidents, perte d’emploi, etc.) et les difficultés relationnelles extraconjugales (au travail, avec la famille élargie, avec le voisinage, etc.) peuvent induire un dysfonctionnement familial lorsque les parents éprouvent des difficulté à composer avec le stress et la fatigue ; ce dysfonctionnement est susceptible de favoriser la violence vis-à-vis des enfants (cf. supra, les enfants sorciers), notamment sexuelle.

1.3.6. Les parents victimes de violence ou d’abus sexuels dans leur enfance

Les antécédents violents ou abusifs de l’un des parents (ou des deux) augmentent le risque qu’il devienne auteur de violence, notamment sexuelle à l’adolescence et à l’âge adulte. Selon une étude menée sur 224 hommes ayant été victimes d’abus sexuels dans l’enfance, 12% d’entre eux sont devenus des abuseurs sexuels, généralement d’enfants, voire de leurs propres enfants. Ce facteur n’est cependant pas le plus prédictif. En effet, la majorité des enfants maltraités ne deviennent pas des parents maltraitants !

2. Les enfants placés dans des contextes à risque

Certains contextes sont particulièrement préjudiciables aux enfants, à savoir :

    • Les conflits armés et les situations de post-conflits
    • les déplacements de population dans le cadre des catastrophes naturelles
    • La vie en rue
    • Les grands centres urbains
    • Le lieu de travail
    • Les centres de détention
    • Les établissements scolaires
    • Les institutions résidentielles de placement
    • Les activités parascolaires
    • Certaines cultures, ethnies et sociétés

2.1. Les conflits armés et les situations de post-conflits

Les conflits armés

L’effondrement généralisé de l’ordre public provoqué par les guerres entraîne une recrudescence de la violence sous toutes ses formes. Les risques encourus par les enfants, déjà vulnérables en tant de paix, sont accrus dans les conflits armés. La violence sexuelle exercée contre eux revêt des formes multiples : le viol (comme arme de guerre, viol opportuniste), la torture sexuelle, les mutilations des parties génitales (notamment pour les enfants, en particulier les garçons, détenus dans les prisons et dans les camps de concentration), les violences sexuelles comme monnaie d’échange (en échange de nourriture, d’abri ou de « protection »), l’esclavage sexuel (imposé notamment aux enfants soldats et aux filles chargées des tâches domestiques des belligérants), la prostitution forcée des filles emmenées comme butin de guerre, les mariages et les grossesses imposés par la force, etc.

Les enfants les plus à risque de subir ces agressions sont :

    • Les enfants soldats
    • Les enfants détenus
    • Les filles des groupes ethniques-cibles lorsque l’agresseur a pour politique, officielle ou non, d’utiliser le viol comme arme de génocide.

Par ailleurs, les guerres peuvent favoriser la reprise et/ou le renforcement de pratiques traditionnelles et notamment des mutilations sexuelles féminines. Les communautés en conflit y recourent comme moyen de renforcer leur identité culturelle.

Notons aussi que les conflits armés entraînent des perturbations socioéconomiques qui peuvent contraindre des enfants ou des adolescents à se prostituer pour subvenir à leurs besoins et ceux de leur fratrie (par exemple, dans le cas des enfants orphelins devenus chef de ménage).

L’abondance d’armes en circulation, l’absence d’hommes assurant la protection des familles (partis à la guerre, incarcérés ou tués), les politiques promouvant l’utilisation du viol comme arme de guerre ainsi que l’impunité quasi assurée dont jouissent les agresseurs (silence des victimes, tolérance des autorités quant aux agressions de type sexuel, désorganisation des système policiers et judiciaires, etc.) favorisent l’explosion de violences sexuelles à l’égard des enfants en temps de guerre.

Les situations de post-conflits

Les déracinements qu’entraînent les conflits s’accompagnent généralement d’une recrudescence des diverses formes de violences sexuelles. Ainsi, dans les camps de déplacés et de réfugiés, les filles sont fréquemment la cible des personnes chargées d’assurer leur protection (gardes, responsables de camp, militaires nationaux, forces du maintien de la paix, travailleurs humanitaires, etc.).

Après la cessation des hostilités, les agressions interpersonnelles restent fréquentes. En effet, au niveau individuel aussi bien que sociétal, les représentations mentales de la violence se sont modifiées en raison d’un processus de violence acquise. Cette évolution dans la perception de la violence entraîne une permissivité accrue des comportements violents.

Le changement des mentalités, la disponibilité des armes, la présence de combattants démobilisés, l’absence d’hommes assurant la protection des foyers (tués, incarcérés, en fuite) favorisent les violences sexuelles contre les enfants dans les situations de post-conflit.

2.2. Les déplacements de population dans le cadre des catastrophes naturelles

Les violences sexuelles ne sont pas l’apanage des conflits armés. Le chaos et la désorganisation sociale qu’entraînent les catastrophes naturelles de grande envergure sont propices à l’émergence de ce type de maltraitance. C’est assurément le cas pour les populations déplacées et regroupées dans des camps.

2.3. La vie en rue

Le monde de la rue est dominé par la culture de la violence. Les enfants des rues sont fréquemment victimes d’agressions sexuelles. Les leaders violent des enfants de leur groupe pour les contrôler et affirmer leur pouvoir (rapports sociaux s’établissant sur le modèle du caïdat). Le viol constitue également un rite d’initiation couramment imposé aux nouveaux membres ou encore une punition infligée aux enfants contrevenant aux « règles » du groupe. De plus, les enfants sont souvent contraints de se prostituer pour subvenir à leurs besoins (par exemple, pour se procurer de l’argent, un logement, de la nourriture et d’autres besoins de base ainsi qu’une « protection »).

2.4. Les grands centres urbains

Dopée par la pauvreté et le chômage, la criminalité se développe à un rythme effréné dans les zones urbaines à forte densité de population et ce, sur tous les continents. Parmi les différentes formes criminelles, les atteintes aux mœurs, et en particulier les viols, sont en constante progression. Les agressions perpétrées contre les enfants suivent elles aussi une courbe ascendante.

 

On entend par « capital social » le degré de cohésion et de solidarité existant au sein d’une communauté. Dans les grandes villes, il est généralement de piètre qualité. En effet, bien souvent, les gens se croisent sans se connaître ni se fréquenter. Or, les réseaux sociaux et les relations de voisinage possèdent un effet protecteur significatif contre les victimisations des enfants. En effet, dans un village de quelques centaines d’habitants, les risques de victimisation liés au milieu familial (par exemple, la pauvreté, la toxicomanie ou la dépression des parents) peuvent être contrebalancés par des facteurs de protection présents au sein la communauté. Par exemple, la carence affective, le manque de soutien, le défaut d’encadrement et l’insuffisance de protection se trouveront compensés par la qualité des relations entretenues avec d’autres adultes de la communauté (voisins, enseignant, représentant religieux, etc.). Par ailleurs, le « ciment » social en milieu rural contribue à limiter les agressions sexuelles extrafamiliales. En effet, une personne peut être freinée à commettre un acte violent contre un enfant en raison des relations amicales et conviviales qu’elle entretient avec lui ou sa famille. De plus, le maillage relationnel serré réduit considérablement la possibilité d’agir discrètement et contrairement aux villes, les villages offrent peu de possibilité de multiplier les contacts avec des victimes anonymes potentielles.

Dans les milieux urbains, en particulier dans les quartiers défavorisés, le relâchement du tissu communautaire et du contrôle social informel explique en partie le fait que les enfants soient particulièrement exposés à la violence, notamment sexuelle.

2.5. Le lieu de travail

En dépit des lois nationales et internationales, le travail des enfants est une pratique courante dans de nombreux pays du monde. Des enfants sont également victimes de la traite des êtres humains et exploités sexuellement dans des réseaux mafieux. D’autres encore se trouvent contraints de recourir à la prostitution pour subvenir à leurs besoins.

    •  

    • Les « petits métiers ». Les enfants exercent souvent des petits métiers, mal rémunérés, harassants et souvent dangereux, ne bénéficiant d’aucune protection. Ils exposent les enfants aux abus et à l’exploitation par leur employeur. Les employées de maison et les ouvriers des ateliers clandestins ainsi que les marchandes ambulantes sont fréquemment l’objet d’agressions sexuelles.
    • Le commerce sexuel. Les enfants qui se prostituent (de sexe féminin ou masculin) sont également très exposés à la violence physique et sexuelle. Ils sont souvent abusés par des hommes contre une « protection » (proxénétisme). Il n’est pas rare que des enfants des rues soient victimes de clients pervers et violents. Il arrive qu’ils soient séquestrés et violés durant plusieurs jours, voire tués. Dans certains pays, les brutalités sexuelles sont aussi perpétrées par des agents des forces de l’ordre. Dans les pays où la prostitution est interdite ou réglementée (par exemple, interdite aux mineurs), les travailleurs du sexe (vulnérabilisés par leur statut de clandestin) font fréquemment l’objet d’agressions sexuelles de la part des policiers qui les ont raflé.

2.6. Les centres de détention en temps de paix

Dans certains pays, les enfants sont victimes de violences sexuelles alors qu’ils sont en garde à vue ou en prison. Celles-ci vont du harcèlement physique ou verbal à la torture sexuelle, en passant par le viol. Elles sont exercées par des codétenus (notamment lorsque les conditions de détention les laissent sans protection en compagnie de prisonniers adultes) mais aussi par des policiers ou par des gardes.

2.7. Les établissements scolaires

Les écoles et les pensionnats sont des endroits où les enfants et les adolescents (garçons et filles) peuvent être victimes de violences et de harcèlement sexuels. Ces coercitions sont perpétrées par des condisciples, des enseignants ou par des éducateurs.

2.8. Les institutions résidentielles de placement

Les institutions résidentielles vouées à la protection de l’enfance et au système judiciaire juvénile, les orphelinats, les établissements pour enfants handicapés ou présentant des troubles psychiatriques défrayent régulièrement la chronique.

Dans ces institutions spécialisées, les enfants sont abusés par d’autres résidents, par des membres du personnel ou par des tiers pédophiles introduits par ceux-ci.

Les violences sexuelles entre enfants s’expliquent partiellement par l’agressivité et la promiscuité qui, couplées aux pulsions sexuelles, peuvent favoriser des passages à l’acte, notamment à la puberté et à l’adolescence. De plus, les institutions judiciaire et de protection de l’enfance recueillent des enfants parmi les plus à risque de la société (antécédents de violence comme auteur et/ou comme victime).

Dans ces établissements, lorsque la relation entre un enfant et un professionnel devient conflictuelle, cette relation d’assistance et de supervision risque de se transformer en relation de pouvoir et de domination. L’attention bienveillante de l’éducateur ou du soignant se mue alors en mépris et en critiques, voire en agressions. La position de toute-puissance de l’intervenant dans son rôle d’encadrement et les préjugés vis-à-vis des enfants (par exemple, « graines de gangster », enfants « irrécupérables », insensibles à la douleur, incapables de ressentir des émotions, inaptes à comprendre, etc.) et l’impunité dont les agresseurs se croient assurés facilitent le passage à l’acte maltraitant. La loi du plus fort s’exerce avec d’autant plus de facilité que l’enfant est démuni (par exemple, incapable de se défendre ou de parler) et isolé (par exemple, privé du soutien d’une famille qui l’a abandonné ou qui a été déchue de ses droits). Les abus sexuels au sein de ces institutions pour enfants s’expliquent également par l’attrait qu’elles représentent pour les « professionnels » pédophiles.

2.9. Les activités parascolaires

Les mouvements de jeunesse (telles que le scoutisme), les clubs sportifs, les camps de vacances, les activités religieuses (enfants de chœur, chorale, etc.), etc. rassemblant des enfants et des hommes adultes qui jouissent de leur confiance ou de celle de leurs parents et qui ont autorité sur eux exposent les jeunes aux agressions sexuelles. En effet, la promiscuité favorise les activités sexuelles contraintes par des camarades ou des éducateurs.

2.10. Certaines cultures, ethnies et sociétés

Les normes culturelles et sociales ainsi que les lois et les politiques nationales influent sur la prévalence des violences sexospécifiques et sexuelles. Des différences considérables existent entre pays. La fréquence des violences sexospécifiques et sexuelles dépend notamment de prescriptions culturelles (par exemple, les mutilations génitales sont la règle dans certaines communautés), de normes sociales (par exemple, les droits parentaux prévalent sur le bien-être de l’enfant), l’inscription d’une définition juridique des violences sexospécifiques et sexuelles dans les lois nationales, des moyens policiers chargés du problème, de la sévérité des sanctions à l’égard des contrevenants et de l’existence de services d’aide aux victimes et de services médico-légaux. Dans nombre de pays, les poursuites judiciaires et les condamnations prononcées contre les hommes qui commettent des violences à l’égard des enfants ou contre les parents qui maltraitent leur progéniture sont rares (impunité ou sanctions légères des agresseurs) par rapport au nombre d’agressions perpétrées. Notons encore que la probabilité de violence sexospécifique et sexuelle sera d’autant plus grande que les croyances communautaires légitimeront la notion de supériorité masculine.

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L’auteur

Sites de l’auteur :

http://www.stressaeronautique.netfirm.com : articles professionnels et tous publics sur la peur de l’avion

http://www.psychologiehumanitaire.netfirms.com : site consacré à la psychologie humanitaire. Articles sur le stress des expatriés, le débriefing psychologique, les thématiques humanitaires (enfants des rues, torture, violence sexuelle, traumatisme dans les catastrophes humanitaires, etc.)

http://www.resilience.netfirms.com: Articles sur le traumatisme psychique, les enfants malades, l’hypnose, la thérapie brève, etc.

http://www.acouphenes.netfirms.com : site consacré aux acouphènes. Articles destinés aux psychothérapeutes prenant en charge des patients atteints d’acouphénie et articles tous publics

Evelyne Josse est psychologue diplômée de l’Université Libre de Bruxelles. Elle est formée à l’hypnothérapie éricksonienne, à l’EMDR et à la thérapie brève.

Elle exerce en qualité d’expert en hypnose judiciaire auprès de la Justice belge et pratique en tant que psychothérapeute en privé. Elle est également consultante en psychologie humanitaire.

Elle a travaillé pour différentes ONG dont « Partage avec les enfants du Tiers Monde », « Avenir des Peuples des Forêts Tropicales », « Médecins Sans Frontières-Belgique » et « Médecins Sans Frontières-Suisse ».

Passionnée d’ULM 3 axes (type avion), elle a mis sur pied avec Thierry Moreau de Melen, un pilote, le programme ASAB (Anti Stress Aéronautique Brussels).

Auparavant, elle a également travaillé pour Médecins Sans Frontières-Belgique. Elle a exercé dans des hôpitaux universitaires auprès d’adultes atteints du VIH/SIDA et auprès des enfants malades du cancer. Elle a également été assistante en faculté de Psychologie à l’Université Libre de Bruxelles.

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Partout dans le monde, des enfants sont victimes de la violence sexospécifique et sexuelle. Certains y sont plus exposés que d’autres. Les enfants les plus vulnérables peuvent être détectés en évaluant les dangers liés à leur personne et/ou présents dans leur environnement. Plus les facteurs de risque sont nombreux, plus la probabilité de victimisation est grande. Le présent article se propose de présenter les différents facteurs constituant des indicateurs de risque de violence sexospécifique et sexuelle. 


Causes et facteurs de risque

des violences sexospécifiques et sexuelles exercées contre les enfants

Evelyne josse

2007

evelynejosse@yahoo.fr

http://www.resilience.netfirms.com

14 avenue Fond du Diable, 1310 La Hulpe, Belgique

Psychologue clinicienne. Hypnose éricksonnienne, EMDR, thérapie brève

Psychothérapeute en consultation privée, psychologue du programme ASAB, expert en hypnose judiciaire, consultante en psychologie humanitaire

Introduction *

Notions de base *

1. Définitions *

1.1. La violence *

1.2. Typologie de la violence *

1.3. La nature de la violence *

1.4. La violence à l’égard des enfants *

1.5. La violence sexospécifique et sexuelle *

1.5.1. La violence sexospécifique *

1.5.2. La violence sexuelle *

2. Le concept de vulnérabilité et de risque *

2.1. La sécurité *

2.2. La vulnérabilité et le risque *

2.3. Les facteurs de risque *

2.3.1. Définition *

2.3.2. Interaction des facteurs de risque *

2.3.3. Facteurs de risque et types de violence *

2.3.4. Exposition aux facteurs de risque *

3. La loi du plus fort *

Les facteurs de vulnérabilité propres à la personne de l’enfant, à un groupe spécifique d’enfants ou au fait même d’être un enfant *

1. L’âge : être un enfant *

2. Le genre : être de sexe féminin *

3. Les enfants privés de la protection d’un parent *

4. Les enfants handicapés ou souffrant d’une pathologie psychiatrique *

5. Les minorités sexuelles : être homosexuel ou transsexuel *

6. Les enfants dont l’histoire est marquée du sceau de la violence sexuelle *

6.2. Les enfants nés de viol. *

6.2. Les antécédents abusifs *

Les facteurs de vulnérabilité environnementaux *

1. Les familles vulnérables *

1.1. La notion de parentalité *

1.2. Violences sexospécifiques et sexuelles extrafamiliales *

1.3. Violences sexospécifiques et sexuelles intrafamiliales *

1.3.1. Pauvreté et indigence *

1.3.2. Les conditions délétères présidant à la parentalité *

1.3.3. Les parents présentant un handicap mental ou un trouble psychologique *

1.3.4. Les parents toxicomanes ou alcooliques *

1.3.5. Les difficultés intrafamiliales et conjugales *

1.3.6. Les parents victimes de violence ou d’abus sexuels dans leur enfance *

2. Les enfants placés dans des contextes à risque *

2.1. Les conflits armés et les situations de post-conflits *

Les situations de post-conflits *

2.2. Les déplacements de population dans le cadre des catastrophes naturelles *

2.3. La vie en rue *

2.4. Les grands centres urbains *

2.5. Le lieu de travail *

2.6. Les centres de détention en temps de paix *

2.7. Les établissements scolaires *

2.8. Les institutions résidentielles de placement *

2.9. Les activités parascolaires *

2.10. Certaines cultures, ethnies et sociétés *

Bibliographie *

L’auteur *

Référence du présent article : « Violences sexospécifiques et sexuelles à l’égard des enfants. Causes et facteurs de risque », Evelyne Josse, 2007, http://www.resilience.netfirms.com

Introduction

Partout dans le monde, des enfants sont victimes de la violence sexospécifique et sexuelle. Certains y sont plus exposés que d’autres. Les enfants les plus vulnérables peuvent être détectés en évaluant les dangers liés à leur personne et/ou présents dans leur environnement. Plus les facteurs de risque sont nombreux, plus la probabilité de victimisation est grande.

Le présent article se propose de présenter les différents facteurs constituant des indicateurs de risque de violence sexospécifique et sexuelle.

Notions de base

1. Définitions

1.1. La violence

L’Organisation Mondiale de la Santé définit la violence comme : « La menace ou l’utilisation intentionnelle de la force physique ou du pouvoir contre soi-même, contre autrui ou contre un groupe ou une communauté qui entraîne ou risque fortement d’entraîner un traumatisme, un décès, des dommages psychologiques, un maldéveloppement ou des privations. »

1.2. Typologie de la violence

La violence peut être définie en fonction du responsable de l’agression :

    •  

    • La violence auto-infligée est dirigée par la personne contre elle-même (suicide, mutilations).
    • La violence interpersonnelle est infligée à une personne par un tiers ou par un petit groupe de tiers. Lorsqu’un acte est le fait d’auteurs apparentés à la victime, on parle de violence familiale (mauvais traitements infligés aux enfants et aux personnes âgées, violence conjugale). Lorsqu’il n’existe pas de liens familiaux entre victime et agresseurs, on parle de violence communautaire (violence entre jeunes, viols commis par un étranger, maltraitance en milieu institutionnel ou sur le lieu de travail, etc.).
    • La violence collective est perpétrée par un groupe important de personnes, voire par des Etats (actes terroristes, conflits armés, oppression des minorités, etc.).

1.3. La nature de la violence

La violence peut être définie en fonction de la nature des actes commis. On distingue :

    • la violence physique
    • la violence sexuelle
    • la violence psychologique (dénigrement, humiliation, intimidation, rejet, etc.)
    • la négligence et les défauts de soins

1.4. La violence à l’égard des enfants

L’UNICEF définit la violence à l’égard des enfants comme « toute violence physique, psychologique (psychosociale) et sexuelle infligée à des enfants par abus, négligence ou exploitation, comme des actes commis ou omis de forme directe ou indirecte (avec une emphase sur la violence intentionnelle), qui met en danger ou nuit à la dignité, à la condition physique, psychologique ou sociale ou au développement de l’enfant. »

Nous le voyons, la violence infligée aux enfants peut aussi bien être de nature physique, sexuelle que psychologique. Par exemple, un garçonnet peut être battu, violé et humilié par son beau-père.

Par ailleurs, les enfants peuvent être victimes de la violence interpersonnelle, familiale ou communautaire, ainsi que de la violence collective. Par exemple, une fillette peut subir un inceste dans son propre foyer, être sexuellement agressée par un gang semant la terreur dans son quartier ou être violée par un milicien exhorté par ses chefs à adopter cette arme dans le cadre d’un conflit armé.

1.5. La violence sexospécifique et sexuelle

1.5.1. La violence sexospécifique

On nomme violence sexospécifique, violence basée sur le genre (en anglais, gender-based violence ou GBV) ou bien encore violence sexiste, tout acte perpétré contre la volonté d’une personne et résultant de son appartenance biologique ou de son rôle spécifique en tant qu’être sexué. Elle est engendrée au nom de croyances, de traditions, de comportements ou d’attitudes dommageables envers les individus en fonction de leur sexe.

La violence sexospécifique concerne les enfants tout autant que les adultes. Les enfants des deux sexes peuvent en être la cible. Néanmoins, les filles en font plus fréquemment les frais que les garçons et ce, partout dans le monde.

1.5.2. La violence sexuelle

La violence sexuelle est un type spécifique de violence basée sur le genre. Elle peut-être définie comme « tout acte sexuel, tentative pour obtenir un acte sexuel, commentaire ou avances de nature sexuelle, ou actes visant à un trafic ou autrement dirigés contre la sexualité d’une personne utilisant la coercition, commis par une personne indépendamment de sa relation avec la victime, dans tout contexte, y compris, mais s’en s’y limiter, le foyer et le travail ».

Même si les garçons sont susceptibles d’être victimes de ce type d’agression, les filles y sont notablement plus exposées et ce, quel que soit le motif de l’auteur.

2. Le concept de vulnérabilité et de risque

2.1. La sécurité

Selon l’Organisation mondiale de la Santé, « la sécurité est un état où les dangers et les conditions pouvant provoquer des dommages sont contrôlés de manière à préserver la santé et le bien-être des individus et de la communauté. C’est une ressource indispensable à la vie quotidienne qui permet à l’individu et à la communauté de réaliser ses aspirations. La sécurité est considérée comme un état résultant d’un équilibre dynamique qui s’établit entre les différentes composantes d’un milieu de vie donné. Elle est le résultat d’un processus complexe où l’être humain interagit avec son environnement ».

2.2. La vulnérabilité et le risque

La sécurité des personnes découle donc d’une interaction de facteurs de protection personnels et environnementaux. A contrario, en santé publique, le concept de vulnérabilité est intimement lié à l’idée de danger et renvoie à la notion de risque.

Le risque est la probabilité de subir un dommage ou une perte quelconque (d’ordre physique, psychologique, matériel, etc.). Un individu ou un groupe est vulnérable s’il est prédisposé à subir une issue négative par rapport à un problème donné. Cette prédisposition relève d’un système d’interrelations entre des caractéristiques propres à la personne ou au groupe (caractéristiques physiques, biologiques, psychologiques, etc.) et des variables inhérentes à l’environnement (environnement physique, familial, culturel, technologique, politique, social, économique, organisationnel, etc.).

2.3. Les facteurs de risque

2.3.1. Définition

On nomme « facteurs de risque », les variables, les caractéristiques, les processus, les conditions, les faits, les interactions et les relations qui influencent une personne ou un groupe de personnes ou son milieu et qui constituent un danger ou une menace spécifique par rapport à un problème donné. Ainsi, il est possible d’identifier des indicateurs prédisposant des enfants ou des groupes d’enfants à subir une agression sexospécifique ou sexuelle.

Notons qu’un risque représente la probabilité d’être exposé à un danger et non une certitude. Dans bon nombre de situations, il est d’ailleurs difficile, voire impossible, de déterminer avec exactitude dans quelle mesure un facteur de risque contribue à subir un dommage. Il n’existe bien souvent pas de relation directe et immédiate de cause à effet entre un risque et une issue particulière. Par exemple, si la pauvreté est un facteur prédisposant à la violence familiale, il serait évidemment totalement inexact d’affirmer que toutes les familles en situation précaire sont maltraitantes.

Soulignons encore que la notion de risque est un concept relatif. En effet, tous les facteurs de risque ne possèdent pas la même valeur prédictive. Ainsi, un élément pourra contribuer faiblement à une situation de danger tandis qu’un autre pourra déterminer une menace quasi certaine. Par exemple, résider dans une institution pour enfants handicapés en Belgique n’engendre qu’un risque quasi nul d’être exposé à une maltraitance sexuelle tandis qu’être une fille des rues à Ouagadougou (Burkina Faso) s’avère un risque majeur.

Les facteurs favorisant une agression sont de deux ordres : les facteurs propres à l’individu ou au groupe et les facteurs environnementaux.

    •  

    • les facteurs propres à l’individu ou au groupe. Ces caractéristiques sont de nature biologique (par exemple, le genre, l’âge, l’hérédité, la « race », etc.), physique (par exemple, la force, l’état de santé, etc.), psychologique (par exemple, l’histoire individuelle, l’aptitude à faire face aux problèmes, les compétences émotionnelles, cognitives, intellectuelles, etc.), comportementale (par exemple, la capacité à se protéger, à se défendre, le degré de soumission à l’autorité, etc.), psychosociale (situation personnelle, degré d’autonomie), etc.

L’âge, la dépendance vis-à-vis des adultes, le handicap physique ou mental, la pathologie psychiatrique et l’absence de protection d’un tuteur accroissent le risque qu’un enfant subisse une violence sexospécifique ou sexuelle.

    •  

    • les facteurs environnementaux. Ces variables englobent la situation géographique, le lieu de vie, la famille, la société, la communauté, le milieu culturel, religieux, socioéconomique et démographique, etc.

Certaines normes culturelles ou religieuses, le racisme, le sexisme, la discrimination, la destruction d’identités culturelles (par exemple, dans les situations de guerre, de conflit armé, de génocide, etc.), la promotion d’idées et d’attitudes prônant la violence (par les autorités, les médias, etc.), la précarité, les dysfonctionnements familiaux ou communautaires, l’isolement de la collectivité et la promiscuité (par exemple, dans les situations de détention, en institutions résidentielles, etc.) sont autant de facteurs majorant le risque de déclencher, d’activer ou de susciter l’agression sexospécifique ou sexuelle envers les enfants.

2.3.2. Interaction des facteurs de risque

La vulnérabilité des enfants aux agressions sexospécifiques et sexuelles dépend autant de caractéristiques propres à l’enfance (par exemple, une force physique inférieure à celle des adultes, la dépendance aux adultes, etc.), à un groupe spécifique d’enfants (par exemple, les handicapés, les enfants des rues, les filles, etc.) ou à la personne d’un enfant (par exemple, fragilité résultant d’événements de l’histoire personnelle) que du degré d’exposition au danger ou à la menace (par exemple, présence de pédophiles dans l’entourage immédiat, contexte de conflit armé, etc.). C’est la superposition, la combinaison et l’interrelation des facteurs individuels et environnementaux qui déterminent la probabilité d’une issue néfaste. L’agression est donc la résultante d’interactions complexes entre différentes variables.

2.3.3. Facteurs de risque et types de violence

Certains facteurs de risque correspondent à une forme spécifique de violence (par exemple, la violence sexuelle) mais le plus souvent, ils signent la vulnérabilité d’une personne ou d’un groupe de personnes à divers types de violence (par exemple, à la violence sexuelle, physique et psychologique). Ainsi, il est fréquent qu’un enfant à risque de subir une agression sexospécifique soit exposé à des violences d’une autre nature. Par exemple :

      • Un enfant victime d’inceste risque également d’être battu, injurié et dévalorisé par ses parents.
      • Les enfants des rues sont victimes des agressions sexuelles commises par leurs pairs mais ils sont également exposés à la violence des habitants des quartiers où ils séjournent. Les vindictes populaires sont un exemple de cette violence. Lorsqu’un enfant est surpris en flagrant délit de vol, c’est toute la population présente qui se précipite pour le molester, généralement jusqu’à ce que mort s’en suive.
      • Dans certaines sociétés, la fille violée se voit imposer d’épouser son agresseur afin de laver l’honneur de sa famille.
      • Une petite fille sexuellement mutilée peut aussi être sous-alimentée, négligée lorsqu’elle est malade et privée de scolarité. De plus, elle est peut-être obligée de porter une tenue traditionnelle effaçant les marques de féminité et ne peut se déplacer librement au sein de sa communauté. Elle risque également d’être mariée précocement, d’être violée par son époux et d’être engrossée de force.

2.3.4. Exposition aux facteurs de risque

Plus un enfant ou un groupe d’enfants est exposé longuement (par exemple, interactions quotidiennes de l’enfant avec son père incestueux) et/ou à de nombreux facteurs de risque (par exemple, enfant handicapé, orphelin, de sexe féminin, dans un pays en guerre) et/ou à des facteurs de risque majeurs (par exemple, contexte de guerre, société prescrivant les mutilations génitales), plus il est susceptible de subir une violence sexospécifique ou de nature sexuelle.

3. La loi du plus fort

Par « loi du plus fort », j’entend l’usage abusif d’une position dominante par une personne ou un groupe de personnes dans le but de parvenir à ses fins (imposer ses normes, ses désirs, sa volonté, tirer un profit ou un bénéfice quelconque, humilier, etc.).

La « loi du plus fort » peut impliquer le recours à la violence, à la coercition, à l’intimidation, à la menace, à la manipulation, à la duperie, à l’abus du lien affectif, au chantage ou à tout autre moyen conférant un avantage à une personne ou à un groupe de personnes dans une relation donnée.

Dans la relation adulte-enfant, l’adulte est indéniablement le plus fort. En effet, sa situation d’autorité, ses ressources, sa force physique, sa taille, ses connaissances, son expérience relationnelle, etc. sont sans commune mesure avec celles des enfants. Ces avantages lui confèrent un pouvoir qu’il lui est aisé d’exercer sur l’enfant. Cette supériorité est renforcée par le fait que le plus faible, l’enfant, est dépendant pour sa survie du plus fort, l’adulte, et qu’il lui accorde sa confiance, qu’il croit lui devoir obéissance, qu’il désire conserver son affection, qu’il n’est pas en mesure d’appréhender ou de refuser les situations qui lui sont imposées, qu’il est démuni face à l’appareil judiciaire et policier, etc.

Quel que soit son sexe, son âge et son origine, aucun enfant n’est totalement à l’abri des violences sexospécifiques et sexuelles. Néanmoins, certains y sont exposés plus que d’autres du fait de leur état de santé physique ou mental, de leur situation familiale, de leur cadre de vie, etc.

Les facteurs de vulnérabilité propres à la personne de l’enfant, à un groupe spécifique d’enfants ou au fait même d’être un enfant

Parmi les facteurs de vulnérabilité propres à un enfant, à un groupe d’enfants ou au fait même d’être enfant, citions :

    • l’âge
    • le genre
    • l’absence de protection de la part des parents ou d’un représentant légal
    • le handicap et la pathologie psychiatrique
    • l’orientation sexuelle
    • une histoire marquée par la violence sexuelle

1. L’âge : être un enfant

L’immaturité (physique, psychologique, émotionnelle, intellectuelle, etc.) liée au jeune âge est un des déterminants de la violence sexospécifique et sexuelle exercée par les adultes à l’égard des enfants. En effet, les enfants sont dépendants des adultes auxquels ils accordent généralement leur confiance, ils manifestent souvent une attitude de docilité face à l’autorité, ils n’ont pas la force physique qui leur permettrait de repousser l’agresseur, ils sont limités dans ce qu’ils peuvent exprimer, ils ignorent leurs droits, ils peuvent facilement être dupés en raison de leur naïveté, ils ne comprennent pas nombre de situations, etc.

2. Le genre : être de sexe féminin

Les filles sont plus fréquemment que les garçons la cible de violences sexospécifiques et sexuelles. Ceci est vrai partout dans le monde et pour la majorité des formes que peuvent revêtir ces maltraitances (viol, inceste, rapports forcés, mariage forcé, grossesse forcée, mutilations génitales, esclavage sexuel, prostitution forcée, traite des êtres humains, etc.). Le risque de subir une violence sexuelle s’accroît encore au début de l’adolescence.

3. Les enfants privés de la protection d’un parent

Les enfants ne bénéficiant pas de la protection directe d’un parent encourent un risque accru d’être victimes de violence sexospécifique et d’exploitation sexuelle. Leur isolement les rend plus susceptibles que d’autres d’opter pour la vie en rue, d’être recrutés par des milices (de gré ou de force), de tomber dans les filets de la traite des êtres humains, de recourir à la prostitution, de rallier des gangs et d’être placés en famille d’accueil ou en institution ; toutes situations qui les exposent peu ou prou à de nouvelles agressions.

Les enfants les plus à ciblés sont :

    •  

    • Les orphelins. Les guerres, les catastrophes naturelles, les épidémies (paludisme, choléra, Ebola, etc.), la pandémie du SIDA et les famines sévissant de par le monde laissent de nombreux orphelins sans ressource.
    • Les enfants coupés accidentellement de leur famille lors des migrations de population (dans le contexte de conflits armés, de catastrophes naturelles).
    • Les enfants délibérément abandonnés ou rejetés.
      • Dans certains pays, les jeunes filles-mères sont rejetées par leur famille car elles sont sources de honte.
      • Tenus pour responsables d’un malheur frappant leur entourage (maladie, décès, divorce, perte d’emploi, dettes, etc.), des enfants sont accusés par leur famille ou leurs voisins de détenir et d’user de pouvoirs maléfiques. Crédités de sorcellerie, ils sont souvent gravement maltraités et chassés de leur foyer.
      • Les enfants soldats démobilisés sont généralement reniés par leur famille en raison de la peur (à cause de leur comportement) ou de la défiance qu’ils inspirent (du fait des atrocités qu’ils ont commises).

4. Les enfants handicapés ou souffrant d’une pathologie psychiatrique

Les enfants souffrant d’un handicap (déficiences ou incapacités physiques, mentales, cognitives, sensorielles, communicationnelles, etc.) ou d’un trouble psychiatrique (mais également les prématurés et dans certaines contrées, les jumeaux et les albinos) réunissent de nombreux facteurs de vulnérabilité et sont exposés, dans tous les contextes (le foyer familial, la rue, les établissements scolaires, les institutions judiciaires, etc.), aux maltraitances en tous genres, notamment aux abus sexuels. Les plus vulnérables sont les handicapés mentaux et les enfants présentant une pathologie psychiatrique. En effet, leur incapacité à se défendre (par exemple, lorsqu’ils présentent de l’inhibition, de la passivité, une absence de réaction agressive, une confiance démesurée envers autrui, etc.), leur difficulté, voire leur totale incompréhension des situations (du fait de la carence de leurs capacités cognitives, de la pauvreté de leur imagination, de délires, etc.) ou à communiquer (à cause d’une mutité, d’une absence de langage ou de troubles de la personnalité) concourent à accroître le risque de victimisation. Ces facteurs facilitent tant la maltraitance intrafamiliale que la violence interpersonnelle exercée par les pairs (enfants des rues, camarades de classe, etc.) ou infligée par les adultes (non apparentés, proches ou inconnus).

La violence intrafamiliale s’explique également par le fait que le handicap ou la particularité de l’enfant constitue une entrave à la formation du lien d’attachement (nourrisson séparé de sa mère et placé en couveuse, enfant décevant par rapport aux attentes parentales, difficulté à entrer en communication avec lui, valeur surnaturelle attribuée à sa singularité, etc.).

La vulnérabilité aux agressions sexuelles des enfants handicapés ou présentant des troubles graves de la personnalité est majorée par le fait qu’ils vivent souvent dans un véritable désert affectif, aussi bien en famille qu’en institution, quel que soit leur âge et les apparences et ce, dans de nombreux pays. Cette fragilité est d’autant plus importante qu’ils sont isolés et privés de contacts sociaux ou que la culture méprise les personnes handicapées (ce qui, dans tous ces cas de figure, rend la dénonciation des abus et l’appel à l’aide malaisés). En effet, dans les pays occidentaux, de nombreux handicapés sont isolés de la communauté car ils sont « enfermés » dans des institutions spécialisées (isolement géographique). En Afrique, les infirmes sont « visibles », le plus souvent au cœur même de la cité. Ils mendient aux carrefours et aux abords des supermarchés fréquentés par les nantis, exhibant leur handicap dans le but d’apitoyer les passants. Néanmoins, ils sont fréquemment déconsidérés, moqués et rejetés aux marges de la société (distanciation émotionnelle et isolement « social »). Cette mise à l’écart s’explique par la crainte qu’ils inspirent (surtout en ce qui concerne les jumeaux, les albinos et les personnes présentant un handicap mental ou psychiatrique), leur particularité étant considérée comme le stigmate d’une puissance occulte (bénédiction ou malédiction), ce qui suppose qu’ils entretiennent une relation privilégiée avec les puissances « invisibles ».

Le risque d’abus sexuels est d’autant plus important que le handicap s’accompagne d’une grande proximité physique avec un ou plusieurs adultes. En effet, les soins imposent généralement une proximité corporelle entre l’enfant et le dispensateur de soins (parent ou personnel de l’institution spécialisée). Petit à petit, ces contacts peuvent déboucher sur des rapprochements malsains. De plus, la dépendance motrice des adolescents atteints d’infirmité ou de paralysie sévères pose la question de l’aide d’un tiers pour faciliter les satisfactions sexuelles « solitaires ». Si ces services particuliers ne peuvent être confondus avec des abus d’ordre sexuel, il n’en reste pas moins qu’ils peuvent avoir pour effet d’augmenter la suggestibilité sexuelle des sujets et préparer le terrain d’une interaction abusive. Le fait que les enfants ne bénéficient pas d’une information adaptée sur la vie sexuelle jouerait un rôle aggravant.

Comme nous l’avons signalé ci-dessus, les enfants souffrant de handicap mental ou de pathologies psychiatriques peuvent présenter de l’inhibition et de la passivité. Ils peuvent également manifester de la désinhibition, de l’excitation et de l’agressivité qui, couplées aux pulsions sexuelles et à la promiscuité, peuvent favoriser, notamment à la puberté et à l’adolescence, des passages à l’acte violents envers d’autres résidents.

5. Les minorités sexuelles : être homosexuel ou transsexuel

Les jeunes homosexuels et bisexuels ainsi que les transsexuels des deux sexes sont particulièrement vulnérables au préjudice sexuel car leur comportement est perçu comme transgressant les normes sociales et les codes moraux. Dans certaines sociétés, ils sont punis en étant violés.

Soulignons que certains jeunes sont jetés hors de leur foyer en raison de leur orientation sexuelle. Ils gagent alors la rue où ils sont pris pour cible parce qu’ils ne sont pas, là non plus, socialement acceptables.

6. Les enfants dont l’histoire est marquée du sceau de la violence sexuelle

Les enfants issus de viol et ceux qui ont déjà subi des violences sexuelles courent davantage de risque d’expérimenter de nouvelles agressions sexuelles dans leur enfance, leur adolescence et leur vie adulte.

6.2. Les enfants nés de viol.

Les enfants nés d’un viol rappellent à l’entourage les circonstances tragiques de leur conception. Ceci explique le fait qu’ils soient fréquemment maltraités même lorsque les jeunes filles et/ou leur famille a/ont résolu de les garder. Or, tout contexte de violence physique favorise le risque d’agression sexuelle. Soulignons aussi que dans bon nombre de ces enfants sont le fruit d’abus intrafamiliaux. Ils sont donc dès leur naissance plongés dans un système à transaction incestueuse.

Dans les pays en voie de développement, lorsqu’ils sont négligés ou abandonnés, les enfants issus du viol viennent fréquemment grossir les rangs des enfants des rues. Dans les pays en guerre, ils sont des proies faciles pour les belligérants qui les recrutent en qualité d’enfants soldats (filles et garçons). Ces contextes les exposent à des risques multiples de violence, notamment sexuelle.

6.2. Les antécédents abusifs

Diverses études ont montré que des antécédents abusifs représentent un facteur de risque de victimisation ultérieure, notamment sexuelle.

Par exemple, des enfants fuient leur domicile parce que leurs parents les agressent physiquement ou sexuellement et gagnent la rue, ce qui les expose à de nouvelles agressions, notamment sexuelles. D’autres vivant une situation analogue sont placés par les services de protection de l’enfance dans des foyers pour jeunes où ils expérimenteront peut-être d’autres abus sexuels.

Les jeunes ayant subi des violences sexuelles ont souvent une piètre estime d’eux-mêmes et présentent fréquemment des états dépressifs. Cela pourrait expliquer, du moins partiellement, le fait qu’ils négligent leur corps, leur santé, leur sécurité, etc. De plus, ils courent un risque important de consommation abusive d’alcool et de drogue (surtout à partir l’adolescence). Les substances psychotropes diminuent la capacité du consommateur à percevoir les signes de danger et en conséquence, de s’en protéger. Par ailleurs, les lieux de consommation sont des endroits propices aux rencontres avec un agresseur.

La survictimisation trouve probablement aussi son origine dans l’isolement social. En effet, les jeunes ayant subi des agressions sexuelles se marginalisent (ils deviennent, par exemple, des enfants des rues, rallient un gang) et deviennent alcooliques, toxicomanes, délinquants, etc. Ces comportements viennent renforcer la « déliaison » sociale. L’entourage (famille élargie) et la communauté les craignent et les tiennent donc à distance. Or, la disponibilité d’adultes référents et la solidarité d’un réseau communautaire leur offriraient certainement une protection contre la violence et ses effets.

Il semble exister également une corrélation importante entre les antécédents de violences sexuelles subies dans l’enfance et le basculement dans la prostitution. Trinquart rapporte qu’en France, 80 à 95% des personnes prostituées de souche française (ce chiffre ne comprend pas les personnes victimes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle) présenteraient de tels antécédents. Dans certaines sociétés, la virginité et la chasteté des filles reflètent l’honneur de la famille. Dès lors, les agressions sexuelles sont vécues comme une honte. Les victimes sont mises au ban de la communauté et sont parfois chassées du foyer parental (surtout si le viol débouche sur une grossesse). Isolées et sans ressource, le commerce du sexe est souvent le moyen le plus immédiat qui s’offre à elles pour assurer leur survie.

Cette vulnérabilité accrue aux agressions sexuelles s’explique probablement aussi par un apprentissage de schémas de victimisation. Par exemple, dans le cas de la prostitution, il semble exister une répétition ou une continuité de la situation de maltraitance subie dans l’enfance.

Les facteurs de vulnérabilité environnementaux

1. Les familles vulnérables

1.1. La notion de parentalité

Le concept de la parentalité a émergé il y a quelques années dans le champ social, psychologique et juridique. Selon A. Maigne, la parentalité est « l’ensemble des réaménagements psychiques et affectifs qui permettent à des adultes de devenir parents, c’est-à-dire de répondre aux besoins de leur(s) enfant(s) à 3 niveaux : le corps (les soins nourriciers), la vie affective, la vie psychique » .

Selon Housel, la parentalité se décline selon trois axes :

    •  

    • l’axe de l’expérience subjective de la parentalité. C’est la dimension subjective, affective et imaginaire du fait d’être parent (ressenti, éprouvé, vécu par rapport au fait de se sentir ou non parent d’un enfant donné).
    • l’axe de l’exercice de la parentalité. C’est l’exercice de la responsabilité parentale (droits et devoirs) envers l’enfant (obligation de choix, de surveillance et de protection par rapport à l’éducation et la santé).
    • l’axe de la pratique de la parentalité. Ce sont les actes concrets posés dans la vie quotidienne par les parents vis-à-vis de leur progéniture (soins : alimentation, hygiène, soins médicaux, etc. ; tâches domestiques : entretien du linge, du logement, etc. ; garde : surveillance, présence auprès de l’enfant ; éducation : acquisition des comportements sociaux, stimulation dans les apprentissages, etc.).

Certains types de situation fragilisent l’exercice, l’expérience et/ou la pratique de la parentalité et exposent les enfants à la violence et en particulier aux agressions sexospécifiques et sexuelles.

Au niveau familial, les facteurs de risque comprennent :

    • la précarité socioéconomique
    • des conditions délétères présidant à la « parentalité » (parents mineurs, foyer monoparental, parents d’un enfant nés du viol)
    • le handicap mental et les troubles psychiatriques des parents
    • la toxicomanie et l’alcoolisme des parents
    • les difficultés intrafamiliales et conjugales
    • les antécédents de victimisation des parents (violence familiale, abus sexuels)

Dans une certaine mesure et jusqu’à un certain point, ces facteurs de risque concernent également l’environnement humain plus large avec lequel l’enfant entretient des relations sociales proches (partenaire amoureux, pairs, famille élargie, voisinage, personnel éducatif et pairs au sein des associations fréquentées par l’enfant ou des résidences de placement, etc.).

1.2. Violences sexospécifiques et sexuelles extrafamiliales

Dans de nombreux pays, la pauvreté et l’indigence compromettent l’exercice (difficultés à garantir la protection de ses enfants et à veiller au respect de leurs droits) et la pratique (difficulté à assurer leurs besoins de base) de la parentalité. Les difficultés pécuniaires expliquent, au moins partiellement, les risques de violence encourus par les enfants. En effet, les enfants des deux sexes issus de familles économiquement précaires, obligés précocement de travailler, peuvent être exposés à des risques d’exploitation sexuelle.

Par exemple :

      • Les enfants qui échouent dans la rue en quête d’une activité de survie (mendiants, cireurs, livreurs, laveurs de pare-brise, marchands ambulants, etc.) courent le risque d’être sexuellement agressés par d’autres enfants des rues, des clients du commerce sexuel, des agents des forces de l’ordre, des riverains ou des passants.
      • Dans certains pays, les enfants précarisés se livrent à des relations sexuelles avec des adultes afin de pouvoir subvenir à leurs besoins ou à ceux de leur famille (« sexe de survie »).
      • Des enfants quittent leur famille et s’engagent comme soldat pour pouvoir se nourrir. Ils sont souvent utilisés comme esclaves sexuels pour assouvir les besoins des aînés.

Plus encore que leurs frères, les filles pauvres risquent d’être violées en raison de leurs activités quotidiennes.

Par exemple :

      • Elles exercent leurs activités (ramassage du petit bois, travaux champêtres, etc.) dans des lieux écartés. Cette situation offre les conditions de discrétion requises aux agresseurs pour commettre leurs méfaits.
      • Elles sont parfois obligées d’exercer des métiers où le risque de violences sexuelles est élevé (par exemple, l’industrie du sexe).
      • Elles sont engagées par des familles pour remplir diverses tâches ménagères et se voient également contraintes de satisfaire sexuellement les hommes de la maison.

1.3. Violences sexospécifiques et sexuelles intrafamiliales

1.3.1. Pauvreté et indigence

La pauvreté et l’indigence augmentent aussi le risque qu’un enfant soit victime de violence sexospécifiques et sexuelles au sein même de sa famille.

Par exemple, en ce qui concerne la violence sexuelle :

      • Les difficultés financières et les nombreux problèmes qu’elles entraînent (sous-alimentation, impossibilité de se soigner, expropriation d’un logement dont le loyer est impayé, tracasseries administratives, etc.) constituent une source importante de stress. La difficulté à gérer les tensions et la fatigue fragilisent les adultes et sont susceptibles d’entraver leurs compétences parentales. Cette situation entraîne un risque accru de passage à l’acte violent et de maltraitance sexuelle à l’égard des enfants.

Par exemple, en ce qui concerne les violences sexospécifiques :

      • En matière de scolarité et de soins de santé, les parents pauvres privilégient généralement leurs fils au détriment de leurs filles car ils sont redevables traditionnellement de les soutenir durant leur vieillesse.
      • Pour avoir une bouche en moins à nourrir ou dans l’espoir d’un revenu supplémentaire, les familles pauvres vendent parfois leurs filles à des trafiquants d’êtres humains, dupés par la promesse de leur trouver un emploi de domestique.
      • Des raisons similaires poussent les parents à marier précocement leurs fillettes.

1.3.2. Les conditions délétères présidant à la parentalité

Les conditions dans lesquelles les personnes sont amenées à devenir parents ou à exercer leur rôle de parents sont susceptibles de pervertir l’expérience de la parentalité (difficulté à se sentir parent, à s’assumer ou à se comporter comme tel dans une situation spécifique). Ces conditions particulières peuvent contribuer à accroître le risque de violence, notamment d’ordre sexuel, envers les enfants.

    •  

    • Les parents mineurs. Le risque de maltraitance physique et d’agression sexuelle intrafamiliale s’accroît lorsque la mère est mineure. Plus une jeune fille devient mère à un âge précoce (avant l’âge de 18 ans), plus le risque d’agression sexuelle vis-à-vis de l’enfant augmente.
    • La vie en foyer monoparental (mère célibataire, couple séparé). La vie en foyer monoparental augmente le risque d’inceste, principalement à partir de la puberté. L’absence d’un tiers séparateur et protecteur favorise la formation d’une dyade parent-enfant pathologique.
    • La mère d’un enfant né du viol. Les enfants issus d’un viol courent un risque élevé d’être victimes de violence, et notamment de violence sexuelle, de la part de leur mère et/ou de sa famille (voir supra).

1.3.3. Les parents présentant un handicap mental ou un trouble psychologique

Le handicap mental et les troubles psychiatriques (psychose, dépression, etc.) promeuvent les troubles de l’attachement et handicapent l’expérience (difficulté à se sentir parent), l’exercice (défaut de relations structurantes) et la pratique de la parentalité (par exemple, comportement aberrant). Ces conditions favorisent les dérives violentes, y compris sexuelles.

L’absence d’éducation affective et sexuelle des membres de la famille potentialise le risque de passage à l’acte sexuel.

1.3.4. Les parents toxicomanes ou alcooliques

L’alcool et certaines drogues entravent l’exercice (difficultés à assumer l’autorité, incitations à des comportements asociaux, etc.) et la pratique de la parentalité (négligence, comportement inadéquat et labile). Ces substances sont des facteurs désinhibants qui favorisent les passages à l’acte violent, notamment les agressions sexuelles intrafamiliales.

1.3.5. Les difficultés intrafamiliales et conjugales

Les familles à interactions violentes sont plus susceptibles que les autres de maltraiter sexuellement leurs enfants. Les passages à l’acte violent témoignent de la difficulté qu’éprouvent les parents à maîtriser leurs pulsions et leurs émotions.

Les familles traversant une période conjugale ou matrimoniale tendue (par exemple, en cours de séparation ou en instance de divorce) risquent davantage de maltraiter leur enfant. Ce risque est accru quand l’un des parents est évincé de la relation (absence d’un tiers séparateur).

Les événements hautement stressants (maladie d’un parent ou d’une personne signifiante, deuil significatif pour l’un des parents, accidents, perte d’emploi, etc.) et les difficultés relationnelles extraconjugales (au travail, avec la famille élargie, avec le voisinage, etc.) peuvent induire un dysfonctionnement familial lorsque les parents éprouvent des difficulté à composer avec le stress et la fatigue ; ce dysfonctionnement est susceptible de favoriser la violence vis-à-vis des enfants (cf. supra, les enfants sorciers), notamment sexuelle.

1.3.6. Les parents victimes de violence ou d’abus sexuels dans leur enfance

Les antécédents violents ou abusifs de l’un des parents (ou des deux) augmentent le risque qu’il devienne auteur de violence, notamment sexuelle à l’adolescence et à l’âge adulte. Selon une étude menée sur 224 hommes ayant été victimes d’abus sexuels dans l’enfance, 12% d’entre eux sont devenus des abuseurs sexuels, généralement d’enfants, voire de leurs propres enfants. Ce facteur n’est cependant pas le plus prédictif. En effet, la majorité des enfants maltraités ne deviennent pas des parents maltraitants !

2. Les enfants placés dans des contextes à risque

Certains contextes sont particulièrement préjudiciables aux enfants, à savoir :

    • Les conflits armés et les situations de post-conflits
    • les déplacements de population dans le cadre des catastrophes naturelles
    • La vie en rue
    • Les grands centres urbains
    • Le lieu de travail
    • Les centres de détention
    • Les établissements scolaires
    • Les institutions résidentielles de placement
    • Les activités parascolaires
    • Certaines cultures, ethnies et sociétés

2.1. Les conflits armés et les situations de post-conflits

Les conflits armés

L’effondrement généralisé de l’ordre public provoqué par les guerres entraîne une recrudescence de la violence sous toutes ses formes. Les risques encourus par les enfants, déjà vulnérables en tant de paix, sont accrus dans les conflits armés. La violence sexuelle exercée contre eux revêt des formes multiples : le viol (comme arme de guerre, viol opportuniste), la torture sexuelle, les mutilations des parties génitales (notamment pour les enfants, en particulier les garçons, détenus dans les prisons et dans les camps de concentration), les violences sexuelles comme monnaie d’échange (en échange de nourriture, d’abri ou de « protection »), l’esclavage sexuel (imposé notamment aux enfants soldats et aux filles chargées des tâches domestiques des belligérants), la prostitution forcée des filles emmenées comme butin de guerre, les mariages et les grossesses imposés par la force, etc.

Les enfants les plus à risque de subir ces agressions sont :

    • Les enfants soldats
    • Les enfants détenus
    • Les filles des groupes ethniques-cibles lorsque l’agresseur a pour politique, officielle ou non, d’utiliser le viol comme arme de génocide.

Par ailleurs, les guerres peuvent favoriser la reprise et/ou le renforcement de pratiques traditionnelles et notamment des mutilations sexuelles féminines. Les communautés en conflit y recourent comme moyen de renforcer leur identité culturelle.

Notons aussi que les conflits armés entraînent des perturbations socioéconomiques qui peuvent contraindre des enfants ou des adolescents à se prostituer pour subvenir à leurs besoins et ceux de leur fratrie (par exemple, dans le cas des enfants orphelins devenus chef de ménage).

L’abondance d’armes en circulation, l’absence d’hommes assurant la protection des familles (partis à la guerre, incarcérés ou tués), les politiques promouvant l’utilisation du viol comme arme de guerre ainsi que l’impunité quasi assurée dont jouissent les agresseurs (silence des victimes, tolérance des autorités quant aux agressions de type sexuel, désorganisation des système policiers et judiciaires, etc.) favorisent l’explosion de violences sexuelles à l’égard des enfants en temps de guerre.

Les situations de post-conflits

Les déracinements qu’entraînent les conflits s’accompagnent généralement d’une recrudescence des diverses formes de violences sexuelles. Ainsi, dans les camps de déplacés et de réfugiés, les filles sont fréquemment la cible des personnes chargées d’assurer leur protection (gardes, responsables de camp, militaires nationaux, forces du maintien de la paix, travailleurs humanitaires, etc.).

Après la cessation des hostilités, les agressions interpersonnelles restent fréquentes. En effet, au niveau individuel aussi bien que sociétal, les représentations mentales de la violence se sont modifiées en raison d’un processus de violence acquise. Cette évolution dans la perception de la violence entraîne une permissivité accrue des comportements violents.

Le changement des mentalités, la disponibilité des armes, la présence de combattants démobilisés, l’absence d’hommes assurant la protection des foyers (tués, incarcérés, en fuite) favorisent les violences sexuelles contre les enfants dans les situations de post-conflit.

2.2. Les déplacements de population dans le cadre des catastrophes naturelles

Les violences sexuelles ne sont pas l’apanage des conflits armés. Le chaos et la désorganisation sociale qu’entraînent les catastrophes naturelles de grande envergure sont propices à l’émergence de ce type de maltraitance. C’est assurément le cas pour les populations déplacées et regroupées dans des camps.

2.3. La vie en rue

Le monde de la rue est dominé par la culture de la violence. Les enfants des rues sont fréquemment victimes d’agressions sexuelles. Les leaders violent des enfants de leur groupe pour les contrôler et affirmer leur pouvoir (rapports sociaux s’établissant sur le modèle du caïdat). Le viol constitue également un rite d’initiation couramment imposé aux nouveaux membres ou encore une punition infligée aux enfants contrevenant aux « règles » du groupe. De plus, les enfants sont souvent contraints de se prostituer pour subvenir à leurs besoins (par exemple, pour se procurer de l’argent, un logement, de la nourriture et d’autres besoins de base ainsi qu’une « protection »).

2.4. Les grands centres urbains

Dopée par la pauvreté et le chômage, la criminalité se développe à un rythme effréné dans les zones urbaines à forte densité de population et ce, sur tous les continents. Parmi les différentes formes criminelles, les atteintes aux mœurs, et en particulier les viols, sont en constante progression. Les agressions perpétrées contre les enfants suivent elles aussi une courbe ascendante.

On entend par « capital social » le degré de cohésion et de solidarité existant au sein d’une communauté. Dans les grandes villes, il est généralement de piètre qualité. En effet, bien souvent, les gens se croisent sans se connaître ni se fréquenter. Or, les réseaux sociaux et les relations de voisinage possèdent un effet protecteur significatif contre les victimisations des enfants. En effet, dans un village de quelques centaines d’habitants, les risques de victimisation liés au milieu familial (par exemple, la pauvreté, la toxicomanie ou la dépression des parents) peuvent être contrebalancés par des facteurs de protection présents au sein la communauté. Par exemple, la carence affective, le manque de soutien, le défaut d’encadrement et l’insuffisance de protection se trouveront compensés par la qualité des relations entretenues avec d’autres adultes de la communauté (voisins, enseignant, représentant religieux, etc.). Par ailleurs, le « ciment » social en milieu rural contribue à limiter les agressions sexuelles extrafamiliales. En effet, une personne peut être freinée à commettre un acte violent contre un enfant en raison des relations amicales et conviviales qu’elle entretient avec lui ou sa famille. De plus, le maillage relationnel serré réduit considérablement la possibilité d’agir discrètement et contrairement aux villes, les villages offrent peu de possibilité de multiplier les contacts avec des victimes anonymes potentielles.

Dans les milieux urbains, en particulier dans les quartiers défavorisés, le relâchement du tissu communautaire et du contrôle social informel explique en partie le fait que les enfants soient particulièrement exposés à la violence, notamment sexuelle.

2.5. Le lieu de travail

En dépit des lois nationales et internationales, le travail des enfants est une pratique courante dans de nombreux pays du monde. Des enfants sont également victimes de la traite des êtres humains et exploités sexuellement dans des réseaux mafieux. D’autres encore se trouvent contraints de recourir à la prostitution pour subvenir à leurs besoins.

    •  

    • Les « petits métiers ». Les enfants exercent souvent des petits métiers, mal rémunérés, harassants et souvent dangereux, ne bénéficiant d’aucune protection. Ils exposent les enfants aux abus et à l’exploitation par leur employeur. Les employées de maison et les ouvriers des ateliers clandestins ainsi que les marchandes ambulantes sont fréquemment l’objet d’agressions sexuelles.
    • Le commerce sexuel. Les enfants qui se prostituent (de sexe féminin ou masculin) sont également très exposés à la violence physique et sexuelle. Ils sont souvent abusés par des hommes contre une « protection » (proxénétisme). Il n’est pas rare que des enfants des rues soient victimes de clients pervers et violents. Il arrive qu’ils soient séquestrés et violés durant plusieurs jours, voire tués. Dans certains pays, les brutalités sexuelles sont aussi perpétrées par des agents des forces de l’ordre. Dans les pays où la prostitution est interdite ou réglementée (par exemple, interdite aux mineurs), les travailleurs du sexe (vulnérabilisés par leur statut de clandestin) font fréquemment l’objet d’agressions sexuelles de la part des policiers qui les ont raflé.

2.6. Les centres de détention en temps de paix

Dans certains pays, les enfants sont victimes de violences sexuelles alors qu’ils sont en garde à vue ou en prison. Celles-ci vont du harcèlement physique ou verbal à la torture sexuelle, en passant par le viol. Elles sont exercées par des codétenus (notamment lorsque les conditions de détention les laissent sans protection en compagnie de prisonniers adultes) mais aussi par des policiers ou par des gardes.

2.7. Les établissements scolaires

Les écoles et les pensionnats sont des endroits où les enfants et les adolescents (garçons et filles) peuvent être victimes de violences et de harcèlement sexuels. Ces coercitions sont perpétrées par des condisciples, des enseignants ou par des éducateurs.

2.8. Les institutions résidentielles de placement

Les institutions résidentielles vouées à la protection de l’enfance et au système judiciaire juvénile, les orphelinats, les établissements pour enfants handicapés ou présentant des troubles psychiatriques défrayent régulièrement la chronique.

Dans ces institutions spécialisées, les enfants sont abusés par d’autres résidents, par des membres du personnel ou par des tiers pédophiles introduits par ceux-ci.

Les violences sexuelles entre enfants s’expliquent partiellement par l’agressivité et la promiscuité qui, couplées aux pulsions sexuelles, peuvent favoriser des passages à l’acte, notamment à la puberté et à l’adolescence. De plus, les institutions judiciaire et de protection de l’enfance recueillent des enfants parmi les plus à risque de la société (antécédents de violence comme auteur et/ou comme victime).

Dans ces établissements, lorsque la relation entre un enfant et un professionnel devient conflictuelle, cette relation d’assistance et de supervision risque de se transformer en relation de pouvoir et de domination. L’attention bienveillante de l’éducateur ou du soignant se mue alors en mépris et en critiques, voire en agressions. La position de toute-puissance de l’intervenant dans son rôle d’encadrement et les préjugés vis-à-vis des enfants (par exemple, « graines de gangster », enfants « irrécupérables », insensibles à la douleur, incapables de ressentir des émotions, inaptes à comprendre, etc.) et l’impunité dont les agresseurs se croient assurés facilitent le passage à l’acte maltraitant. La loi du plus fort s’exerce avec d’autant plus de facilité que l’enfant est démuni (par exemple, incapable de se défendre ou de parler) et isolé (par exemple, privé du soutien d’une famille qui l’a abandonné ou qui a été déchue de ses droits). Les abus sexuels au sein de ces institutions pour enfants s’expliquent également par l’attrait qu’elles représentent pour les « professionnels » pédophiles.

2.9. Les activités parascolaires

Les mouvements de jeunesse (telles que le scoutisme), les clubs sportifs, les camps de vacances, les activités religieuses (enfants de chœur, chorale, etc.), etc. rassemblant des enfants et des hommes adultes qui jouissent de leur confiance ou de celle de leurs parents et qui ont autorité sur eux exposent les jeunes aux agressions sexuelles. En effet, la promiscuité favorise les activités sexuelles contraintes par des camarades ou des éducateurs.

2.10. Certaines cultures, ethnies et sociétés

Les normes culturelles et sociales ainsi que les lois et les politiques nationales influent sur la prévalence des violences sexospécifiques et sexuelles. Des différences considérables existent entre pays. La fréquence des violences sexospécifiques et sexuelles dépend notamment de prescriptions culturelles (par exemple, les mutilations génitales sont la règle dans certaines communautés), de normes sociales (par exemple, les droits parentaux prévalent sur le bien-être de l’enfant), l’inscription d’une définition juridique des violences sexospécifiques et sexuelles dans les lois nationales, des moyens policiers chargés du problème, de la sévérité des sanctions à l’égard des contrevenants et de l’existence de services d’aide aux victimes et de services médico-légaux. Dans nombre de pays, les poursuites judiciaires et les condamnations prononcées contre les hommes qui commettent des violences à l’égard des enfants ou contre les parents qui maltraitent leur progéniture sont rares (impunité ou sanctions légères des agresseurs) par rapport au nombre d’agressions perpétrées. Notons encore que la probabilité de violence sexospécifique et sexuelle sera d’autant plus grande que les croyances communautaires légitimeront la notion de supériorité masculine.

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WHO (1996), « Mental health of refugees », Geneva.

L’auteur

Sites de l’auteur :

http://www.stressaeronautique.netfirm.com : articles professionnels et tous publics sur la peur de l’avion

http://www.psychologiehumanitaire.netfirms.com : site consacré à la psychologie humanitaire. Articles sur le stress des expatriés, le débriefing psychologique, les thématiques humanitaires (enfants des rues, torture, violence sexuelle, traumatisme dans les catastrophes humanitaires, etc.)

http://www.resilience.netfirms.com: Articles sur le traumatisme psychique, les enfants malades, l’hypnose, la thérapie brève, etc.

http://www.acouphenes.netfirms.com : site consacré aux acouphènes. Articles destinés aux psychothérapeutes prenant en charge des patients atteints d’acouphénie et articles tous publics

Evelyne Josse est psychologue diplômée de l’Université Libre de Bruxelles. Elle est formée à l’hypnothérapie éricksonienne, à l’EMDR et à la thérapie brève.

Elle exerce en qualité d’expert en hypnose judiciaire auprès de la Justice belge et pratique en tant que psychothérapeute en privé. Elle est également consultante en psychologie humanitaire.

Elle a travaillé pour différentes ONG dont « Partage avec les enfants du Tiers Monde », « Avenir des Peuples des Forêts Tropicales », « Médecins Sans Frontières-Belgique » et « Médecins Sans Frontières-Suisse ».

Passionnée d’ULM 3 axes (type avion), elle a mis sur pied avec Thierry Moreau de Melen, un pilote, le programme ASAB (Anti Stress Aéronautique Brussels).

Auparavant, elle a également travaillé pour Médecins Sans Frontières-Belgique. Elle a exercé dans des hôpitaux universitaires auprès d’adultes atteints du VIH/SIDA et auprès des enfants malades du cancer. Elle a également été assistante en faculté de Psychologie à l’Université Libre de Bruxelles.

D’autres articles on-line du même auteur sont disponibles :

Traumatisme psychique et maladie grave, sur http://www.resilience.netfirms.com :

Accueillir et soutenir les victimes de violences sexuelles. Approche orientée vers la solution

Le développement des syndromes psychotraumatiques. Quels sont les facteurs de risques ?

Victimes, une épopée conceptuelle. Première partie : définitions

Le vécu de l’enfant atteint d’une maladie cancéreuse. Diagnostic et première hospitalisation

Le vécu des parents d’un enfant malade du cancer

Métaphore et Traumatisme psychique

Déceler les violences sexuelles faites aux femmes

Les violences sexuelles. Définitions d’un concept multiforme

La torture de masse. Le cas de l’ex-Yougoslavie

Déceler les violences sexuelles faites aux femmes


Stress et traumatisme du personnel expatrié, sur
http://www.psychologiehumanitaire.netfirms.com :

Les expatriés dans la tourmente. Le stress humanitaire

Les expatriés à l’épreuve des séismes

Le soutien psychosocial des équipes humanitaires. De l’incident critique à la prise de décision

Le soutien immédiat et post-immédiat des expatriés affectés par un incident critique

Le défusing du personnel humanitaire affecté par un incident critique

Comment faire ? Le débriefing psychologique des expatriés affectés par un incident critique

Comment gérer le stress dépassé lié à l’expatriation ?

Commet gérer le stress traumatique survenant dans le cadre d’une expatriation ?

Le débriefing psychologique dans un cadre professionnel

Le réseau de pairs (peer support network). Le soutien du personnel humanitaire de retour de mission

Problématiques humanitaires, sur http://www.psychologiehumanitaire.netfirms.com :

Guide pour un assessment rapide des besoins psychosociaux et en santé mentale des populations affectées par une catastrophe naturelle

Le traumatisme dans les catastrophes humanitaires

Reconstruire le quotidien après un traumatisme collectif. Éloge du quotidien, de la routine, des rites et des rituels

Les enfants des rues. L’enfer du décor

Violences sexuelles et conflits armés en Afrique

Hypnose, sur http://www.resilience.netfirms.com :

Idées fausses circulant au sujet de l’hypnose

Quels sont les indices d’une transe hypnotique ?

Comment se déroule une thérapie par hypnose ?

L’hypnose. Les réponses à vos questions

Stress aéronautique, sur http://www.stressaeronautique.netfirms.com :

Stress aéronautique. Peur de voler, phobie de l’avion, panique à bord J’ai peur en avion ! : Première partie : c’est quoi le stress aéronautique ?

J’ai peur en avion !

J’ai le mal de l’air !

Acouphènes, sur http://www.acouphenes.netfirms.com :

Les acouphènes. Traitement par l’hypnose 

Que peut apporter l’hypnose dans le traitement des acouphènes ?

 

Divers, sur http://www.resilience.netfirms.com :

Familles en difficulté. Guide à l’intention du psychothérapeute orienté vers la solution

Le stress. Quelques repères notionnels

 

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2 Réponses pour Causes et facteurs de risque des violences sexospécifiques et sexuelles exercées contre les enfants

  1. Comment amortir les affres de la discrimination et des violences sexuelles et basées sur le genre? Qulle différence existe-t-elle entre violence sexuelle, violence sexospécifique et violence basée sur le genre?
    Quels sont les éléments fondamentaux pour mener une étude/recherche CAP sur le Genre. Merci pour les éclaircicement.
    Ville de Goma/RDC.

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