L’être humain est un être social. Il a besoin de ses semblables pour vivre et réunir les conditions de son bien-être. Or, les guerres et les catastrophes naturelles ébranlent l’organisation sociale. La préservation et la reconstruction de la santé mentale individuelle et communautaire après un événement traumatique de grande ampleur nécessitent le rétablissement des liens entre les membres de la communauté. Des actions concrètes peuvent maintenir, consolider et accroître le bien-être mental des individus et de leur communauté, notamment par le rétablissement d’activateurs sociaux tels que le quotidien, les habitudes, la routine, les rites et les rituels.
Evelyne Josse, 2006
14 avenue Fond du Diable, 1310 La Hulpe , Belgique
Psychologue clinicienne (hypnose éricksonnienne, EMDR, thérapie brève), psychothérapeute en consultation privée, psychologue du programme ASAB, expert en hypnose judiciaire, consultante en psychologie humanitaire
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Table des matières
Introduction
Constats
1. Toute la communauté est touchée
2. La communauté a des ressources
3. Une communauté forte pour soutenir les plus vulnérables
Quelques facteurs favorisant le processus de récupération psychosociale
1. Une bonne information
2. Le support social et familial
3. Les comportements d’adaptation
4. Le retour à la routine quotidienne
Quotidien, habitudes, routine, rituels et rites : le cycle du temps
1. Le quotidien
1.1. Définition du quotidien
1.2. Définition de la routine
1.3. Définition de l’habitude
1.4. Définition de coutumes
2. Temps synchronique et perspective diachronique
3. Les périodes du temps
3.1. Définition de rite
3.2. Définition de rituel
4. Temporalités individuelle et collective
5. Temps et signification
6. Fonction du quotidien, des habitudes, de la routine, des rituels et des rites
6.1. Un climat de sécurité
6.2. Un climat de sens
6.3. Un climat éducatif
6.4. Un climat de cohésion sociale
6.4.1. La création d’interactions sociales
6.4.2. Une valeur de communication
6.4.3. Création d’un sentiment d’appartenance
6.4.4. Une fonction de régulation et de médiation
6.4.5. Une fonction de continuité
7. Fonction spécifique du quotidien, des habitudes, de la routine, des rituels et des rites après un événement traumatique
8. Conclusion
Les temps de l’urgence
1. Entrée dans l’urgence, la phase aiguë
1.1. L’information
1.2. Reconstruire le quotidien
1.2.1. Routine et rituels personnels
1.2.2. Routine et rituels familiaux
1.2.3. Routine et rituels sociaux
2. La phase de post-urgence
2.1. Les activités productives et utiles
2.2. Les activités culturelles, religieuses et festives
2.3. Les activités ludiques et sportives
3. Promouvoir la récupération psychosociale après un traumatisme : l’exemple concret de l’aménagement des camps
Bibliographie
L’auteur
Conflits armés et catastrophes naturelles sont à l’origine d’un grand nombre de réfugiés et de déplacés. Jusqu’à récemment, en urgence, les services de secours et les organisations humanitaires se concentraient principalement sur les soins médicaux et les besoins primaires (nourriture, eau, abri, etc.). Or, les désastres et la violence ont également des conséquences sur la santé mentale des individus qui les subissent.
Il n’existe pas de définition universelle de la santé mentale. Néanmoins, on observe que les personnes en bonne santé mentale ont en commun la capacité de comprendre et de répondre aux défis de la vie quotidienne, de ressentir et d’exprimer un éventail d’émotions, de maintenir de bonnes relations avec les personnes de leur famille et de leur communauté.
Les problèmes de santé mentale englobent un large spectre de troubles psychologiques et psychosociaux allant de symptômes relativement mineurs de stress à des problématiques psychosociales majeures et à des troubles psychiatriques.
Toute communauté produit sa santé mentale au même titre qu’elle produit son économie, son système scolaire, son régime politique, sa culture ou son histoire. Une communauté peut aussi bien construire que détruire sa santé mentale. Les guerres et les catastrophes naturelles sont des éléments exogènes aux individus qui créent des conditions défavorables au maintien de l’équilibre psychique. Avoir abandonné sa maison et son mode de vie engendre, particulièrement dans les premiers temps, des problèmes émotionnels et psychosociaux et exacerbe les difficultés existantes. L’événement traumatique laisse les rescapés confus, effrayés, seuls, insécurisés et les force à affronter un nouvel environnement (parfois hostile). Ces situations sont destructrices et porteuses de malheur pour les individus mais également pour la communauté entière.
L’être humain est un être social. Il a besoin de ses semblables pour vivre et réunir les conditions de son bien-être. Or, les catastrophes (guerres et catastrophes naturelles) ébranlent l’organisation sociale. En effet, une catastrophe provoque des destructions matérielles substantielles (habitations, établissements scolaires, institutions, industries et structures de soins de santé détruits, routes et ponts coupés, etc.) et altère la géographie humaine (par exemple, cultures inondées sans destruction matérielle). Elle a des répercussions sur le fonctionnement et les activités de la population et perturbe la continuité de l’organisation sociale par destruction ou altération de ses réseaux fonctionnels (réseaux de production, de distribution et de consommation d’énergie, de nourriture, d’eau potable et de soins médicaux, de circulation des biens et des personnes, des systèmes de communication et d’information, d’éducation, de maintien de l’ordre et de gestion des cadavres). Ces conséquences sont durables ou complexes[1].
A la suite d’une catastrophe, la préservation et la reconstruction de la santé mentale individuelle et communautaire nécessitent donc le rétablissement des liens entre les membres de la communauté. Des actions concrètes peuvent maintenir, consolider et accroître le bien-être mental des individus et de leur communauté, notamment par le rétablissement d’activateurs sociaux tels que le quotidien, les habitudes, la routine, les rites et les rituels. La communauté a la capacité de s’aider elle-même à travers les réseaux traditionnels de soutien (famille, clan) et les stratégies de coping[2] pré-existantes à l’événement traumatique (circulation de l’information, routine, rituels, etc.). Pour ce faire, doivent être rétablies les bases nécessaires pour rétablir les conditions de son bien-être. La reconstruction du tissu social est indispensable pour espérer une diminution de l’état de stress de la communauté et pour prévenir les troubles psychotraumatiques à long terme.
Constats
1. Toute la communauté est touchée
Les situations d’urgence provoquent un afflux massif de rescapés, de déplacés ou de réfugiés. Même si la plupart d’entre eux ne présentent aucune pathologique mentale, bon nombre sont en crise parce qu’ils ont été soumis à un événement traumatique ou générateur de stress. Le vécu de crise est collectif, le tissu familial et social est profondément ébranlé et par conséquence, le risque de séquelles dans la population est important.
2. La communauté a des ressources
Le milieu social et les processus communautaires jouent un rôle fondamental dans la récupération psychologique des individus suite à un événement dramatique. En effet, les être humains possèdent en eux et dans leur communauté les ressources nécessaires pour faire face à des événements exceptionnels.
En règle générale, les survivants d’un conflit ou d’une catastrophe naturelle sont des gens normaux ; ils étaient autonomes et compétents avant la catastrophe et le redeviendront après. La plupart d’entre eux ne s’effondrent pas. Ils ne sont pas sans ressources et totalement dépendants de l’aide humanitaire. Ils restent des individus ordinaires même s’ils ont vécu une expérience extraordinaire. Pour preuve, les survivants, indemnes ou légèrement blessés, n’attendent pas l’arrivée des secours mais portent immédiatement assistance aux blessés et aux plus vulnérables. Si la plupart des personnes acceptent dans un premier temps de recevoir de l’aide, elles désirent cependant retrouver leur autonomie le plus rapidement possible. Il est donc important de les encourager à se construire cette nouvelle vie sans tarder.
Les rescapés ont perdu leur logement, leurs biens matériels, leur travail, des proches mais ils n’ont perdu ni leur savoir ni leurs compétences. Ils ont été forcés d’abandonner leur mode de vie et leurs rôle traditionnel mais ils ont la capacité d’en redéfinir d’autres, similaires ou différents, au sein de leur nouvelle communauté.
3. Une communauté forte pour soutenir les plus vulnérables
Encourager et soutenir les ressources d’une communauté ébranlée par un événement traumatique renforce les mécanismes opérants pour prendre soin des plus dépendants et des plus vulnérables. En effet, la santé mentale de ces derniers dépend avant tout du soutien social qui leur est offert.
Quelques facteurs favorisant le processus de récupération psychosociale
La liste proposée ci-dessous n’est certes pas exhaustive. Nous avons centré notre approche sur les facteurs de récupération qu’il est possible de stimuler rapidement et efficacement dans les premiers temps des urgences.
1. Une bonne information
Une fois les besoins primaires satisfaits, le tout premier besoin vital est celui d’être informé.
L’impossibilité d’exercer une maîtrise, au moins mentale, de la situation, serait un indice évocateur d’un vécu traumatique du stress. Une personne capable de comprendre une situation ne la subit pas complètement tandis qu’un sujet qui ne parvient pas à la comprendre la subit passivement et s’en trouve submergé.
Une fois les besoins primaires satisfaits, le tout premier besoin vital qui apparaît est celui d’être informé. Pendant la crise, les gens subissent sans comprendre ce qui leur arrive. Une bonne information sur les événements qui se sont produits et sur ceux à venir permet de réduire sensiblement l’état de stress et de prévenir son impact traumatique. En effet, l’information procure un sentiment de maîtrise et de contrôle de la situation et réintroduit de la prévisibilité par rapport au futur.
Rappelons que l’angoisse et les fausses rumeurs risquent de provoquer à tout moment des états de panique difficiles à contenir et susceptibles de gêner les activités de secours. Dans la prévention des tels phénomènes, l’information (sur l’événement, ses risques, sur l’avenir immédiat, sur les centres de secours, etc.) ainsi que l’instruction de comportements attendus (par exemple, pour l’évacuation de la zone sinistrée, pour l’organisation d’abris et des relogements) sont essentielles.
2. Le support social et familial
Quand les supports sociaux et familiaux sont efficaces, ils offrent des ressources suffisantes pour retrouver un sens à la vie et régénérer l’estime de soi.
3. Les comportements d’adaptation
Si le sujet a pu expérimenter des comportements d’adaptation efficace suite à l’événement traumatique, cela lui permettra de retrouver le sentiment d’avoir du contrôle sur sa vie et sur les événements. Par exemple, s’il a des possibilités de faire des choix ou d’être actif par rapport à sa nouvelle condition de déplacé ou de réfugié, il diminue ses risques de présenter des séquelles psychotraumatiques à long terme.
4. Le retour à la routine quotidienne
Au plus vite les personnes ont la possibilité de retrouver une routine quotidienne, moins elles courent le risque de développer des troubles mentaux.
- Les activités sociales, culturelles et religieuses peuvent apporter un sentiment de vie normale même dans un camp de réfugiés.
- Les activités scolaires et les jeux offrent un cadre structurant permettant aux enfants de poursuivre leur apprentissage tout en les aidant à dépasser leurs peurs et ce, où que ce soit.
- Pour les femmes, la possibilité de parler avec d’autres femmes peut les réconforter même au sein d’une population déplacée.
- Travailler peut aider les hommes à se sentir à nouveau pleinement époux et père, même loin de leur demeure.
Aider une communauté déplacée à reprendre ses activités habituelles dans une nouvelle localisation telle qu’un camp peut donc être un acte préventif de l’apparition de troubles psychiques.
Quotidien, habitudes, routine, rituels et rites : le cycle du temps
Nous aimerions faire prendre conscience au lecteur de la complexité des notions telles que le quotidien, les habitudes, la routine, les rituels et les rites. Ce préambule nous semble indispensable pour élaborer des interventions psychosociales pertinentes dans les urgences humanitaires.
1. Le quotidien
Entamons notre réflexion par ce que l’on appelle communément « le quotidien » et la « routine ».
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le quotidien est de nature complexe. En l’appréhendant de façon dynamique se dévoile l’enchevêtrement des logiques qui le sous-tendent. Leur simultanéité, leur coexistence et leur intrication au sein de chaque instant en constituent la richesse, richesse dénigrée sinon méconnue.
1.1. Définition du quotidien
Selon le dictionnaire, « quotidien » signifie « qui a lieu ou qui se reproduit chaque jour, que l’on fait régulièrement tous les jours »[3].
Cette définition indique d’une part que le quotidien comporte un contenu (« qui », « qui se ») de situations, d’événements, d’activités, d’actes (« qui a lieu », « que l’on fait ») et d’autre part, que celui-ci se reproduit et se répète dans le temps. Ainsi, par exemple, il faut chaque jour manger, dormir, accomplir des tâches définies.
1.2. Définition de la routine
La répétition permanente, fréquente, régulière ou attendue, d’agir, de sentir ou de se comporter, acquise volontairement ou non, aboutit à la routine.
La routine se définit comme « l’habitude d’agir ou de penser toujours de la même manière ». Elle est aussi « la connaissance, l’habileté acquise par l’expérience, la pratique plus que par l’enseignement ou l’étude ». Elle est encore « l’habitude de penser ou d’agir selon des schémas invariables, en repoussant a priori toute idée de nouveauté et de progrès ». Elle est enfin « un acte régulier et machinal, fruit d’une habitude plus que d’une réflexion »[4].
La routine finit par occulter la singularité et les significations mises en jeu dans les actes posés. Prenons pour exemple les rituels de salutations. Dans toutes les cultures, ils ont pour fonction de passer de l’inconfort d’une relation potentielle à la convivialité d’une relation effective. Les salutations permettent, en effet, de situer l’autre comme partenaire légitime, clairement identifié et statutairement situé et d’engager la relation avec un minimum de risques. En effet, on traitera un égal avec familiarité (par exemple, en le tutoyant, en l’embrassant, etc.) et on adoptera un comportement formel avec quelqu’un dont le statut social est élevé (par exemple, en le vouvoyant, en lui tendant la main, etc.). Les salutations permettent à chacun de trouver sa place, de se sentir reconnu, de recevoir les marques de respect ou d’intérêt auxquelles son statut lui permet de prétendre et de les prodiguer à son interlocuteur. Elles posent ainsi implicitement les fondements d’un « contrat de communication » qui autorise les protagonistes à poursuivre l’interaction. Ce sens profond des salutations est conservé mais il s’estompe cependant derrière l’automatisme du « rituel d’accès »[5] (on salue sans réfléchir).
1.3. Définition de l’habitude
La définition de la routine réfère à l’« habitude » (« l’habitude d’agir ou de penser…», « fruit d’une habitude…»). L’habitude est « une manière usuelle d’être, de sentir ou de faire ». « En parlant d’une collectivité », elle est une « façon quasi-permanente de se comporter, de réagir à des événements »[6].
Cette définition souligne le caractère individuel mais également collectif de certains savoir-être et savoir-faire.
1.4. Définition de coutumes
Dans son acceptation collective, l’habitude est synonyme de coutumes. En effet, le dictionnaire définit la coutume comme la « manière de se comporter, ordinaire et courante, d’un groupe social »[7].
2. Temps synchronique et perspective diachronique
Chaque instant du temps chronologique recèle deux temporalités, la synchronie et la diachronie. Toute situation est vécue et tout acte est posé simultanément dans le temps synchronique et dans une perspective diachronique. Ainsi, s’adonner à ses activités quotidiennes (communiquer, vaquer à ses occupations, participer à des rites culturels) est important dans le moment présent (on prend un plaisir instantané à discuter avec un ami ou à s’adonner à une activité sportive, on éprouve de la satisfaction à accomplir efficacement une tâche ménagère ou du mécontentement à réaliser un travail professionnel, on ressent de l’apaisement à pratiquer un rituel religieux, etc.). Mais ce n’est pas tout : s’y consacrer prend également un sens dans une durée qui transcende l’instant donné. En effet, ces activités constituent un moment de l’évolution personnelle, familiale et sociale des individus et elles sont interprétées en fonction des attentes, des désirs, des peurs et des enjeux propres à chacun.
3. Les périodes du temps
Le temps se divise en périodes. Les événements de la vie des hommes et de leur société sont rythmés selon des cycles quotidien, hebdomadaire, mensuel, annuel, etc. Ainsi, par exemple, le quotidien se définit également comme période : il est ce « qui a lieu, qui s’effectue chaque jour, qui s’accomplit en une journée, qui s’étend sur une journée »[8].
Les cycles correspondent donc à des périodes dont le terme marque le retour d’étapes semblables (temps circulaire) et le recommencement d’activités spécifiques (par exemple, cycle quotidien : on mange tous les soirs, cycle hebdomadaire : dans les pays de culture musulmane, tous les vendredi sont chômés, cycle annuel : dans certains pays d’Afrique sub-saharienne, on cultive le riz durant chaque hivernage, etc.).
La fin d’un cycle est souvent ponctuée des rites ou de rituels collectifs, religieux ou profanes. Ceux-ci sont plus ou moins formalisés par des cérémonies qui marquent la transition (par exemple, la messe hebdomadaire dominicale dans la religion catholique, la fête de la nouvelle lune dans la spiritualité bouddhiste, la célébration de la nouvelle année dans de nombreuses cultures, etc.).
Les rites et les rituels forment une partie indispensable du fondement culturel. Il n’y a pas de culture sans rites et sans rituels. Les conceptions implicites et souvent inconscientes que nous avons de nous-même, de notre communauté et du monde se construisent et se confirment par leur accomplissement.
3.1. Définition de rite
On entend par rite un « ensemble de prescriptions qui règlent la célébration du culte en usage dans une communauté religieuse ». En ethnologie et en sociologie, les rites sont des « pratiques réglées de caractère sacré ou symbolique ». Par extension, le rite désigne « une pratique réglée, une manière habituelle de faire »[9].
3.2. Définition de rituel
Selon le dictionnaire, le rituel est un « ensemble de règles et de rites d’une religion, d’une association »[10].
Du lever au coucher (rituels de la vie quotidienne), du printemps à l’hiver (rituels calendaires), de l’enfance à la vieillesse (rites de passage), nous participons à des rituels pour marquer le cycle du temps (temps religieux, profane, naturel, communautaire, personnel, etc.) et ses étapes.
Rites et rituels ont des définitions qui nous autorisent à les utiliser comme synonymes. Dans les suites de notre propos, nous utiliserons le terme rituel pour définir toutes les séquences cohérentes d’actions organisées et répétitives. Sous ce vocable, nous engloberons les rites et les rituels, les habitudes personnelles et les traditions collectives ainsi que les pratiques réalisées consciemment et celles accomplies de manière automatique et spontanée.
Par rituels personnels, nous désignerons un type d’activités naturel pour les membres d’une culture dont la particularité est d’être pratiqué de façon individuelle et d’être régulièrement répété.
Pour clôturer, retenons qu’en participant et en accomplissant les rituels personnels et culturels, les individus donnent une structure et une signification à leurs activités et réduisent l’aspect chaotique et disparate de leurs actions.
4. Temporalités individuelle et collective
Les individus n’ont pas tous les mêmes rythmes ni les mêmes envies ou besoins. Néanmoins, la vie en société rend indispensable l’organisation collective qui dès lors prévaut et supplante les logiques individuelles.
Il est impensable que tous les individus d’une société mangent, s’acquittent de leurs tâches professionnelles et ménagères, s’adonnent à un loisir, pratiquent leur culte ou dorment au même moment. Chaque individu et chaque unité familiale a son propre rythme. Néanmoins, une personne qui serait constamment en décalage avec les rythmes collectifs (par exemple, qui ne partagerait aucun repas avec les autres, ne participerait à aucune activité en commun, etc.) préoccuperait son entourage car la socialisation est une condition sine qua non de l’épanouissement personnel.
Les habitudes, les rites et les rituels sont les constituants nécessaires de toute conduite socialement organisée. En effet, ils véhiculent les croyances et les valeurs culturelles d’une société. De plus, ils prescrivent explicitement ou implicitement les comportements à adopter dans telle situation donnée. En outre, ils sont le fondement de la vie sociale par le fait qu’ils favorisent en permanence des interactions entre individus créant ainsi des microstructures (on mange, on travaille, on se divertit, on prie avec d’autres personnes). Ils sont donc un facteur essentiel de cohésion sociale. En participant à une activité collective, les personnes sont impliquées dans ce qui leur arrive mais aussi dans ce qui se passe autour d’elles. Elles sont socialisées de manière réflexive par l’interaction qu’elle génère elles-mêmes.
La structure sociale se bâtit à travers les situations et les activités quotidiennes et n’existe pas indépendamment des individus qui la construisent. Société, individus et quotidien sont donc intimement liés. Ni l’un ni l’autre ne sont des « données de fait » mais bien des « résultats ».
5. Temps et signification
Le temps vécu est chargé des investissements conscients et inconscients propres à chacun. Tout individu oeuvre à se construire un monde cohérent en interprétant les événements de manière à leur donner sens. A l’enchevêtrement des temps, vient donc s’ajouter celui des affects et des significations données aux situations et aux actions.
6. Fonction du quotidien, des habitudes, de la routine, des rituels et des rites
Dans le présent chapitre, nous allons tenter de déterminer les différentes fonctions qui font du quotidien et des rituels des opérateurs fondamentaux du bien-être des individus et des sociétés.
6.1. Un climat de sécurité
Le quotidien et les rituels donnent des repères simples : « ce que l’on doit faire va de soi ». En conséquence, répéter chaque jour des gestes immuables simplifie la vie car les décisions et les choix sont ainsi éludés. De la sorte, l’automatisme de la routine permet de relâcher les tensions accumulées qui résultent de conduites non dirigées par les coutumes et les traditions.
La routine procure également un sentiment de contrôle sur les événements (« Je maîtrise ces situations parce que je les connais. Je ne suis pas pris au dépourvu comme je pourrais l’être face à l’inconnu »). Elle génère ainsi un monde constant, donc prévisible et par conséquent, rassurant.
Le propre du rituel est de proposer des attitudes, des comportements et des formules largement stéréotypés qui relèvent d’un code symbolique partagé. Leur caractère conventionnel, en leur ôtant toute ambiguïté, les rend immédiatement compréhensibles, donc rassurant.
Repères, sentiment de contrôle, prévisibilité et compréhensibilité favorisent l’émergence d’un sentiment de sécurité.
6.2. Un climat de sens
De nombreux rituels sont des actions symboliques. Ils génèrent un sens qui transcende les actes posés. Ils apportent une dimension existentielle (apaisement, protection, participation, libération, remémoration, guérison, autorisation, passage, etc.) à ce qui échappe à l’être humain, à ce qu’il ne peut entièrement maîtriser (la nature, le cosmos, les divinités, la marche du temps, etc.).
6.3. Un climat éducatif
Nous l’avons vu, les habitudes et les rituels sont propres à une culture dont ils véhiculent les valeurs. Ils fournissent des modèles de conduite et actualisent des symboles qui expriment les dimensions culturelles les plus profondes. En ce sens, ils ont valeur d’apprentissage car ils « enseignent » ou rappellent à chacun l’identité de la communauté à laquelle il appartient.
6.4. Un climat de cohésion sociale
6.4.1. La création d’interactions sociales
La participation à un rite est un mouvement personnel (chacun décide ou non de participer) entretenu par des incitations collectives (invitation, tradition, etc.). Sans rituels, les relations entre individus n’ont pas de réalité sociale. Elles n’existent pas s’ils ne participent pas ensemble à des activités symboliques telles que les deuils, les anniversaires, les fêtes familiales, les cérémonies religieuses, les réunions amicales, etc. Par exemple, que penserait un imam d’un homme musulman qui ne participerait jamais à la prière du vendredi ? Comment réagirait une personne si un de ses amis n’assistait jamais à la célébration de son anniversaire, ne lui présenterait pas ses condoléances à la mort d’un proche et refuserait de prendre un repas en commun ? Les rites sociaux créent donc une réalité et contribuent à la constance des liens.
6.4.2. Une valeur de communication
Les rituels ratifient les positions statutaires de chacun des membres d’un groupe (social, professionnel, religieux, etc.). Chaque individu a une place qui lui est attribuée à l’intérieur d’un système qui l’inclut et le dépasse. Ainsi, l’image qu’il donne de lui et le traitement qu’il reçoit sont conditionnés par le fait qu’il est célibataire ou marié, qu’il travaille ou qu’il chôme, qu’il occupe une position professionnelle subalterne ou supérieure, qu’il est jeune ou âgé, qu’il est dépendant ou autonome, etc. Les rituels sont une manière de marquer et de renforcer son identité sociale ainsi que celle du groupe qui le reconnaît[11]. En ce sens, ce sont des actes de communication car ils révèlent l’identité des personnes et la leur impose en l’exprimant face à tous. En fonction de la place qu’il occupe dans la communauté, chacun sait ce qu’il doit faire ou dire, ce qui permet l’économie de nombreuses questions (telles que « Que faire ? », « Comment va-t-on interpréter mon comportement ? », « Que veut dire cet interlocuteur ? », etc.). Les rituels fournissent un code opératoire de communication et de comportement. Les gestes et les répliques s’enchaînent de façon prévisible et les risques (de conflit, de quiproquo, de gêne, etc.) sont réduis au minimum. Ils facilitent ainsi la communication en lui ôtant tout aspect aléatoire et donnent une signification symbolique claire à la situation.
6.4.3. Création d’un sentiment d’appartenance
Les membres d’une communauté se renforcent dans leur sentiment d’appartenance groupale chaque fois qu’ils pratiquent un acte rituel. Les rituels sont construits et appris. Les connaître, savoir les appliquer, en comprendre le message, c’est affirmer son adhésion aux normes et aux valeurs de son groupe et se sentir appartenir au clan (« Nous avons appris les mêmes choses ; entre nous, nous nous comprenons »).
6.4.4. Une fonction de régulation et de médiation
Les rituels remplissent une fonction importante au sein des groupes sociaux, celle de consolider leur unité. Ils aident à renforcer la cohésion groupale tout autant face aux tensions communautaires internes (conflit, lutte de pouvoir, etc.) que face aux pressions exercées par les situations externes (guerre, catastrophes naturelles, situation de réfugiés).
Les rituels assument, en effet, une fonction régulatrice et homéostatique. Nous l’avons vu, les pratiquer, c’est adhérer aux normes et aux valeurs de son groupe et cette dimension transcende les autres facettes (le « même » devient plus important que le « différent » ; ce qui rapproche les individus au niveau culturel prévaut sur ce qui les distancie au niveau individuel). Les valeurs consensuelles (culturelles, religieuses, etc.) qu’ils propagent suscitent la solidarité communautaire et le respect mutuel. En outre, ils ont une fonction de médiation et promeuvent l’atténuation des divergences individuelles, politiques, sociales, etc. En effet, ils invitent à la ventilation du désintérêt, voire de l’hostilité et de la contestation.
6.4.5. Une fonction de continuité
Les rituels sont pratiqués dans le respect de la tradition et dans un souci de continuité. A travers ces performances symboliques, les identités individuelles et du groupe communautaires sont légitimées[12]. La tradition ainsi transmise se renouvelle.
7. Fonction spécifique du quotidien, des habitudes, de la routine, des rituels et des rites après un événement traumatique
Rappelons que ce qui caractérise l’événement traumatisant (conflit armé, catastrophe naturelle, etc.), c’est qu’il est hors du commun et qu’il entraîne les individus dans un tourbillon de violence. Il est à la fois vécu comme une rupture et un enjeu : une rupture par rapport à la continuité du passé, un enjeu puisqu’il entraîne des changements importants. Il provoque une perturbation aiguë des schémas de vie car il remet en cause les valeurs essentielles de l’existence que sont la sécurité, la paix, la bonté, la solidarité, la morale, le prix de la vie, l’accessibilité au sens des choses, etc. Les rescapés ont vu soudainement leur quotidien rassurant disparaître, leur réalité ordinaire basculer, leurs habitudes chavirer, l’horreur et l’inexplicable surgir. Ces changements les bouleversent profondément en atteignant leur identité, leur estime d’eux-mêmes et leur relation à autrui.
Dans les camps où ils trouvent refuge, les rescapés, n’en sont pas pour autant quittes des difficultés. En effet, ils y vivent un moment de transition entre un passé révolu et un futur improbable. Ils ont subi de multiples ruptures[13] qui les confrontent à un changement drastique de leurs repères. En effet, les individus, les familles et les groupes sociaux ont des pratiques, des habitudes et des rituels propres. Or, dans les situations d’urgence, ces repères sont ébranlés, voire perdus. Dès lors, la place de chacun, le rapport des uns aux autres, la communication, les normes relationnelles, etc., se modifient. Ces moments de transition supposent donc un réajustement complexe et profond autant pour les personnes que pour les communautés.
Parce qu’ils exercent une fonction essentielle, le quotidien, le habitudes, la routine, les rites et les rituels sont un des moyens de permettre la gestion des transitions. Au niveau social, ils sont un puissant moyen d’assurer la pérennité d’une communauté et donc, de garantir sa survie après qu’elle ait été fragilisée par un événement traumatique de grande ampleur. En réaffirmant l’identité du groupe et celle de chacun de ses membres, ils « colmatent le vide » et « rétablissent du continu »[14]. Dans les moments de transition, le quotidien et les rituels sont donc un atout précieux car ils assurent la continuité malgré les ruptures. Ils facilitent aussi la communication et favorisent les interactions sociales. Le système perdure au-delà des changements qui l’affectent et les relations peuvent ainsi se poursuivre. C’est en raison de cette action (individuelle, relationnelle et sociale) que le quotidien et les rituels apparaissent comme des opérateurs majeurs pour gérer les crises. Au niveau intrapsychique, ils jouent un rôle de sécurisation face aux changements impliqués dans la transition. Ils permettent notamment une réassurance identitaire en apportant une reconnaissance de l’image de soi dans une dynamique de « confirmation mutuelle ». Ils constituent également un mécanisme de défense contre l’angoisse de l’inconnu qui accompagne les transitions et revêtent une fonction « conjuratoire » en écartant les dangers suscités par le changement.
On comprend maintenant l’importance que revêtent la routine et les actes rituels dans les moments de transition. La fonction spécifique du quotidien et des rituels est donc de baliser un « trajet » pour aider les rescapés à retrouver une vie « normale ».
8. Conclusion
Le quotidien, les habitudes, la routine, les rituels et les rites ont pour effet :
- d’apporter un sentiment de vie normale.
- D’instaurer des repères (valeurs, traditions, rôles, etc.).
- de procurer un sentiment de contrôle, de prévisibilité et compréhensibilité du monde.
- de favoriser l’émergence d’un sentiment de sécurité.
- de donner un sens à ce qui échappe à l’être humain.
- de tisser le lien social.
- d’induire un sentiment d’appartenance à la communauté.
- de réduire le stress et de diminuer le risque de conflit. Les personnes vivant dans un stress intense et permanent dépriment et deviennent agressives, ce qui favorise l’émergence de conflits.
- d’assurer la pérennité de la communauté par la transmission de ses valeurs.
Les temps de l’urgence
Une situation d’urgence se caractérise par une approche en deux temps : la phase d’urgence aiguë et la phase de post-urgence.
1. Entrée dans l’urgence, la phase aiguë
Dans les premiers temps de l’urgence, il faut agir vite pour sauver des vies et assister les survivants. L’aide humanitaire s’occupe donc en priorité des besoins vitaux tels que la nourriture, l’eau, les installations sanitaires, les soins de santé et les abris.
Parce que ces besoins constituent les préoccupations premières, la santé mentale peut sembler ne pas être une priorité. Néanmoins, l’événement traumatique a plongé les rescapés dans l’effroi, l’impuissance, l’horreur et le désespoir. De plus, les populations hébergées dans des camps doivent s’adapter à un nouvel environnement surpeuplé, peu hygiénique, offrant un accès limité à l’eau, à la nourriture, etc. Les réfugiés sont souvent astreints à adopter un nouveau mode de vie qui ne leur permet plus de s’adonner à leurs activités habituelles. Ces multiples changements génèrent un stress important qui s’additionne au stress traumatique. En effet, le stress est le prix de l’effort nécessaire pour intégrer et s’adapter à une nouvelle situation. Il est provoqué par tout changement survenant dans l’environnement quotidien ou dans le mode de vie et des habitudes. Il entraîne des inquiétudes, des contrariétés et des frustrations diverses. Si le stress perdure, il peut provoquer ou aggraver une maladie physique ou mentale. Il est donc important de réduire, voire d’éliminer, les conditions qui le produisent et qui sont de plus susceptibles d’entériner les troubles psychotraumatiques.
La plupart des troubles de santé mentale (psychiques et psychosociaux) faisant suite à un événement traumatique peuvent être réduits grâce à des mesures simples telles que la diffusion d’information et la réintroduction d’un quotidien prévisible et rassurant. Ces mesures concernent toute la communauté[15]. Les interventions psychosociales en urgence ne seront donc pas dirigées vers un groupe spécifique de cas psychopathologiques mais vers l’ensemble de la communauté en difficulté[16].
Lorsqu’elles viennent en aide aux rescapés, les organisations humanitaires doivent poursuivre deux objectifs, l’un dans une perspective synchronique, l’autre dans une perspective diachronique. Elles doivent œuvrer à la satisfaction des besoins immédiats des populations en danger (perspective synchronique) mais également les aider à reconstruire les conditions de leur bien-être (perspective diachronique). Les individus et les groupes ont la capacité de s’aider eux-mêmes à travers les réseaux naturels de soutien et les stratégies de coping préexistantes à l’événement traumatique. Pour ce faire, il est nécessaire de reconstituer le tissu social disloqué par la crise.
Les actions psychosociales en urgence aiguë ont donc pour objectif de restaurer :
q Le sentiment de sécurité et de stabilité. Il est essentiel que les rescapés puissent reconstruire un quotidien prévisible et rassurant. On veillera tout d’abord à leur fournir une information pertinente[17]. Celle-ci procure un sentiment de maîtrise et de contrôle de la situation et réintroduit de la prévisibilité par rapport au futur. On les encouragera à reprendre leurs activités quotidiennes[18] en puisant dans les ressources et les besoins de leur communauté. La régularité des activités réintroduit une structure spatio-temporelle répondant au besoin de retrouver un univers sécurisant et maîtrisable. On favorisera également la réunion des membres des familles séparés au cours de l’événement traumatique tracing.
q Le lien social : on encouragera les populations à former des groupes en favorisant les rituels sociaux et le soutien communautaire[19]. L’urgence donne l’occasion de reconstruire un réseau d’aide car cette situation génère de fortes motivations. Il s’agit de stimuler les ressources individuelles à travers le groupe. Cette démarche stimule une attitude proactive de la population (initiatives et responsabilités face aux problèmes), renforce la solidarité et donc favorise le processus naturel de reconstruction.
Nous l’avons vu, certains facteurs influencent positivement le processus de récupération[20] psychologique après un événement traumatique. Dès lors, se dessinent des pistes d’intervention concrètes et efficaces, applicables dès le tout début de l’urgence : donner de l’information et reconstruire le quotidien.
1.1. L’information
Il est essentiel de favoriser un accès maximal à des données pertinentes et utiles.
Les informations doivent porter sur :
- L’événement (ce qui s’est passé, où, combien cela a-t-il fait de victimes, ce qui va se passer, etc.)
- le déroulement des activités humanitaires et de secours
- les signes de stress[21] et les réactions possibles suite à un événement traumatique ainsi que les moyens de les surmonter
- l’organisation spatiale et temporelle du camp (plan du camp, services disponibles, horaires des repas et des activités, etc.)
- les services disponibles hors du camp (centre médical, juridique, etc.)
- la situation sociopolitique (de la région, du pays d’accueil, du pays hôte, etc.)
- les membres de la famille (tracing des familles pour retrouver les membres perdus)
- l’immigration (possibilité, démarches, etc.)
- la ville, la région et le pays (plan de la ville et du pays, culture, etc.)
- etc.
1.2. Reconstruire le quotidien
Nous l’avons vu, le quotidien et les rituels sont essentiels. Au niveau personnel, ils procurent un sentiment de contrôle, de prévisibilité, de stabilité et de sécurité. Au niveau social, ils créent des interactions et garantissent la cohésion communautaire[22]. Ils sont donc les facteurs essentiels d’une « vie normale ». Encourager les communautés affectées à restaurer leur quotidien, leurs rites et leurs rituels représente le moyen le plus efficace de les aider à s’aider elles-mêmes.
Dans les situations d’urgence, les habitudes et les rituels propres aux personnes, aux groupes familiaux et aux communautés sont souvent perdus. Il est important de réintroduire les pratiques compatibles avec la vie du camp dans le but de réduire, voire d’éliminer les conditions qui produisent et entretiennent les troubles psychologiques. En effet, la présence de rituels positifs, comme des cérémonies de commémoration ou des fêtes traditionnelles, sont les signes d’un renforcement de l’identité et du bien-être de la communauté. A contrario, certains indicateurs tels que conflits[23], problèmes de scolarisation, usage de drogue ou d’alcool, signalent ses difficultés.
Pour de nombreuses personnes affectées par un événement traumatique, le retour à la routine est suffisant pour les aider à gérer leurs problèmes psychologiques et émotionnels.
Elles ont pour effet :
- de réinstaurer des repères (valeurs, traditions, rôles, etc.).
- d’augmenter le lien social et donc, de réduire le sentiment d’isolement.
- d’apporter un sentiment de vie normale.
- de diminuer le stress et de réduire le risque de conflit. Les personnes vivant dans un stress intense et permanent deviennent tristes et agressives, ce qui favorise l’émergence de conflits.
1.2.1. Routine et rituels personnels
Avant l’événement traumatique, les personnes avaient des habitudes dont certaines peuvent être réinstaurées. Par exemple, retrouver son rythme veille – sommeil habituel[24], reprendre ses habitudes avant le coucher (se promener, boire une tasse de thé, etc.), s’adonner à nouveau à ses loisirs, etc.
1.2.2. Routine et rituels familiaux
On organisera aussi rapidement que possible la recherche et la réunion des membres des familles dispersées pendant leur fuite.
Il est important de promouvoir l’intimité familiale. Par exemple, on veillera à ce que les familles soient regroupées (plutôt que de grouper séparément hommes et femmes) quitte à improviser des séparations de fortunes pour diviser un abri.
1.2.3. Routine et rituels sociaux
Pratiquer ses coutumes, ses croyances et son culte religieux reconstruit un cadre de vie en redonnant de la sécurité, de la prévisibilité et du contrôle dans un contexte social[25].
L’aménagement des camps peut grandement contribuer à sécuriser socialement les réfugiés (cf. infra : construction de lieux de culte, aménagement de « places » de village et de quartier, etc.).
Les habitudes traditionnelles doivent être favorisées car elles procurent un grand réconfort. Par exemple, dans de nombreuses cultures, la cérémonie du café ou du thé permet de se retrouver entre amis et voisins. En fournissant simplement des cafetières ou des théières, du café ou thé, du sucre et des bouilloires, les organisations humanitaires concourent directement au bien-être psychologique de leurs bénéficiaires. Dans certaines sociétés, les hommes se retrouvent pour jouer aux cartes, activité qu’il est aisé de recréer en fournissant des jeux. Dans de nombreux endroits du monde, les femmes se retrouvent pour cuisiner ou lessiver. Les enrôler dans la préparation des repas[26] et prévoir des lavoirs collectifs créent des conditions favorables au dépassement de l’événement traumatique.
Dans les camps, on pensera à instaurer des heures de calme durant la nuit afin que le rythme veille – sommeil des résidents soit en relation avec le rythme du jour et de la nuit[27].
2. La phase de post-urgence
Une fois le chaos maîtrisé, les conditions de sécurisation réalisées et les personnes sorties de l’état de choc débute la deuxième phase de l’urgence.
Dans cette phase post-immédiate, les actions psychosociales ont pour objectif de restaurer :
q L’estime de soi par le biais d’activités qui enrôlent les rescapés dans l’organisation de leur nouvelle vie[28]. Ces activités leur donnent un rôle utile et reconnu, ce qui leur confère à nouveau statut. En reprenant du pouvoir sur leur destinée, ils recouvrent leur dignité humaine et regagnent l’estime d’eux-mêmes anéantie par leur victimisation.
q Le lien social par le biais d’activités qui favorisent les interactions et les rencontres. Durant la phase de post-urgence, un support familial et communautaire adéquat aide la plupart des personnes à récupérer de l’événement traumatique.
Le retour à la routine[29] et les comportements d’adaptation (possibilité de faire des choix, d’être actif par rapport à sa condition de réfugié) sont des facteurs qui influencent positivement le processus de récupération psychologique. Dès lors, se dessinent des pistes concrètes d’intervention psychosociale en post-urgence : aider la communauté à reprendre ses activités sociales habituelles dans sa nouvelle localisation.
Les activités sociales regroupent les activités productives et utiles, les activités culturelles, religieuses et festives ainsi que les activités ludiques et sportives. Même dans des conditions difficiles où les raisons d’être triste, angoissé, inquiet, etc. sont nombreuses, elles doivent être encouragées.
Remarque : Les organismes humanitaires confrontent les rescapés à une logique différente de la leur. Leur fonctionnement est sous-tendu par un souci de rationalité, de rendement et d’efficacité. Par exemple, la nourriture délivrée est choisie pour sa valeur nutritionnelle sans qu’il soit systématiquement tenu compte des habitudes alimentaires des bénéficiaires. Par ailleurs, parce qu’il est souvent plus efficient de « faire à la place » des réfugiés, ils prennent généralement en charge la préparation et la distribution des repas. La synchronie (satisfaire le besoin immédiat d’alimentation) prend ainsi le pas sur la diachronie (promouvoir l’autonomie, la dignité humaine, etc.). On l’aura compris, d’un point de vue psychosocial, il est plus rentable à long terme (perspective diachronique) d’aider les résidents à organiser cette activité. De même, s’il se trouve parmi les réfugiés des personnes ayant les compétences requis pour des foncions spécifiques (infirmières, enseignants, maçons, etc.), les gestionnaires de l’aide humanitaire devraient recourir à leurs services (gestion participative). Les résidents devraient également être encouragés à assumer la responsabilité des activités festives, sportives, religieuses, etc.
2.1. Les activités productives et utiles
S’adonner à des activités productives et utiles redonne aux rescapés un sentiment de vie normale et leur permet d’améliorer leurs conditions matérielles d’existence. De plus, elles les stimulent à résoudre ensemble leurs difficultés.
Exemples d’activités utiles :
- Les femmes peuvent participer à la cuisine collective.
- Elles peuvent organiser des ateliers de couture, de tricot, etc.
- Elles peuvent mettre sur pied une crèche ainsi qu’un programme de soutien aux jeunes mamans.
- Des enseignants peuvent animer des ateliers pour enfants et adolescents.
- Femmes et hommes peuvent organiser des ateliers de création de jouets pour les enfants.
- Les hommes peuvent ériger des abris, réhabiliter des écoles, des lieux de culte et des habitations.
2.2. Les activités culturelles, religieuses et festives
Dans toutes les sociétés, les êtres humains participent à des activités culturelles et festives qui contribuent à réduire naturellement le stress. Elles permettent aussi aux réfugiés de renouer avec leurs traditions et leurs valeurs. Elles réinstaurent ainsi des repères dans un monde violemment dévasté par l’événement traumatique.
Exemples d’activités :
- La musique, les chants, les danses et le théâtre traditionnels[30] tiennent un rôle important dans de nombreuses sociétés. Elles permettent d’oublier les soucis et de redynamiser les gens.
- Dans de nombreuses cultures, des contes traversent les générations grâce à la tradition orale. Ils sont destinés à un grand public et intéressent tant les adultes que les enfants.
- Toutes les sociétés ont leurs cérémonies et leurs célébrations propres, souvent source de réjouissances et de liesse populaire (fêtes nationales, fêtes commémoratives d’un événement historique, etc.).
- Dans les situations difficiles, les rites religieux sont d’un grand secours pour une majorité d’êtres humains. Partout dans le monde, on prie pour apaiser sa douleur et pour garder espoir.
2.3. Les activités ludiques et sportives
Les activités ludiques et sportives permettent de réduire le stress et l’anxiété en déchargeant les tensions.
Exemple d’activités :
- Une compétition de football donne à chacun l’occasion de participer à l’événement : les femmes en préparant les boissons et les repas, les enfants en confectionnant des banderoles, les hommes en jouant, etc.
- Les sports traditionnels. Ceux-ci ne requièrent généralement que peu de matériel.
- Certains jeux (jeux de cartes, dominos, etc.) sont très populaires dans de nombreux pays.
3. Promouvoir la récupération psychosociale après un traumatisme : l’exemple concret de l’aménagement des camps
Les premières décisions concernant l’emplacement et l’aménagement des camps auront des répercussions à long terme. En effet, leurs conséquences en matière d’organisation sociale et d’acceptation des infrastructures dureront aussi longtemps que les réfugiés y resteront installés.
L’aménagement des camps influence l’organisation sociale des résidents. Ainsi, une structure facilitant la communication et les rencontres tout en humanisant les conditions de vie favorise la récupération psychosociale. L’espace doit donc être aménagé pour permettre le rassemblement de personnes ainsi que l’organisation d’activités récréatives « spontanées ».
Les facteurs culturels sont déterminants dans l’acceptation des infrastructures et des services d’un camp. Par exemple, pour de nombreuses communautés côtières, l’usage de toilettes n’est pas familier. Pour les populations musulmanes, les entrées des installations sanitaires ne peuvent être tournées vers la Mecque. Au Caucase, les emplacements doivent être suffisamment spacieux pour parquer un tracteur à côté de l’abri. Le respect des coutumes s’impose aussi pour le choix de la nourriture, le type de services de santé, etc.
La priorité des organisations humanitaire devrait être de consulter les leaders communautaires, de solliciter leurs conseils (notamment par l’identification des déterminants socioculturels) et leurs avis et de s’assurer de leur coopération tout au long du projet.
Par exemple :
q Le camp devrait être construit autour d’une « place de village »[31]. Cet espace central doit être conçu comme un lieu d’échange (tente d’information, rencontres). Il doit permettre les activités sociales telles que le marché, les théâtres-forum, les spectacles de danse, les concert, etc. Un centre d’information devrait y être construit à l’abri du soleil et de la pluie. Par souci de convivialité, il devrait être « ouvert » (par exemple, une structure en bois recouverte de plastic sheeting). On devrait veiller à y installer une horloge (de nombreux rescapés n’ont plus ni montres ni réveils), à mettre à disposition des plans (du camp, de la villes, du pays, etc.), une radio et des journaux. Durant la journée, les enfants, les adolescents et les adultes devraient pouvoir accéder à du matériel ludique (jeux de cartes, de domino, de dés, jeux traditionnels, ballons, etc.). Des panneaux d’affichage devraient fournir en permanence des informations diverses[32].
q La division en secteurs favorise le mode de vie en petits groupes (au demeurant propice à la sécurité). Chaque secteur devrait être construit autour d’une « place de quartier ». Tout comme la place du village, elle doit être aménagée afin de promouvoir les rencontres et les activités conviviales. Elle doit permettre les activités de loisirs, les jeux, le sport et doit être aménagée aussi bien pour les enfants que pour les adultes. Des bancs, des tables, des balançoires, des filets (filet de volley-ball, goals de football), etc. devraient y être installés.
q Les allées du camp devraient porter un nom et les abris, une numérotation. Les familles devraient avoir la possibilité d’inscrire leur nom sur leur logement. Ces mesures permettent aux résidents de se retrouver facilement.
q Pour que l’enfant continue de se développer et d’acquérir de nouvelles compétences, il est indispensable qu’il puisse faire des expériences attendues dans une vie normale pleine de stimulations et d’apprentissages. Il est donc important qu’il reçoive une éducation. On veillera donc à construire une école.
q On pensera à construire des ateliers afin que les hommes et les femmes puissent s’adonner à des activités utiles telle que la couture, la menuiserie, etc.
q On veillera à ce que la communauté ait l’occasion de pratiquer ses cultes religieux. Au besoin, un ou plusieurs lieux de culte devraient être aménagés.
q En respectant les morts, on respecte les vivants. L’architecture de la morgue devra respecter les prescriptions culturelles des résidents. Sa construction (dimension du bâtiment, des portes, etc.) tiendra compte également des traditions. Par exemple, dans certaines cultures, le corps doit être surélevé ; dans d’autres, les visiteurs doivent pourvoir tourner autour de la dépouille ; dans d’autres encore, une charrette doit pouvoir pénétrer dans l’enceinte du bâtiment pour y déposer le défunt. Par respect pour les personnes qui s’y recueillent, on veillera aussi à ce que le lieu offre une intimité suffisante. On fournira également le nécessaire mortuaire tels que les linceuls.
q Un aménagement judicieux du site permet de réduire le risque de violence. Les clôtures, l’éclairage et le site d’implantation des services tels que les installations sanitaires contribuent à la sécurité physique, notamment à celle des femmes. Il est ainsi vivement conseillé de faire participer les femmes au processus de décision concernant l’emplacement des douches et latrines[33].
q On doit s’attacher à fournir aux plus vulnérables de la communauté un abri dans un lieu où ils pourront être protégés et assistés.
q On veillera à ne pas couper tous les arbres[34] car ils permettent de s’abriter de la pluie et du soleil.
q S’il y a lieu, l’aménagement du site doit tenir compte de la nécessité de séparer et d’isoler physiquement des groupes ethniques mutuellement hostiles et forcés de cohabiter dans un même camp. Ils peuvent par exemple être séparés au minimum par un brise-vue (haie).
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L’auteur
Sites de l’auteur :
http://www.stressaeronautique.netfimrs.com : articles professionnels et tous publics sur la peur de l’avion
http://www.psychologiehumanitaire.netfimrs.com : site consacré à la psychologie humanitaire. Articles sur le stress des expatriés, le débriefing psychologique, les thématiques humanitaires (enfants des rues, torture, violence sexuelle, traumatisme dans les catastrophes humanitaires, etc.)
http://www.resilience.netfimrs.com: Articles sur le traumatisme psychique, les enfants malades, l’hypnose, la thérapie brève, etc.
http://www.acouphenes.netfimrs.com : site consacré aux acouphènes. Articles destinés aux psychothérapeutes prenant en charge des patients atteints d’acouphénie et articles tous publics
Evelyne Josse est psychologue diplômée de l’Université Libre de Bruxelles. Elle est formée à l’hypnothérapie éricksonienne, à l’EMDR et à la thérapie brève.
Elle exerce en qualité d’expert en hypnose judiciaire auprès de la Justice belge et pratique en tant que psychothérapeute en privé. Elle est également consultante en psychologie humanitaire.
Elle a travaillé pour différentes ONG dont « Partage avec les enfants du Tiers Monde », « Avenir des Peuples des Forêts Tropicales », « Médecins Sans Frontières-Belgique » et « Médecins Sans Frontières-Suisse ».
Passionnée d’ULM 3 axes (type avion), elle a mis sur pied avec Thierry Moreau de Melen, un ami pilote, le programme ASAB (Anti Stress Aéronautique Brussels).
Auparavant, elle a également travaillé pour Médecins Sans Frontières-Belgique. Elle a exercé dans des hôpitaux universitaires auprès d’adultes atteints du VIH/SIDA et auprès des enfants malades du cancer. Elle a également été assistante en faculté de Psychologie à l’Université Libre de Bruxelles.
D’autres articles on-line du même auteur sont disponibles :
Traumatisme psychique et maladie grave
Sur http://www.resilience.netfirms.com :
– Accueillir et soutenir les victimes de violences sexuelles. Approche orientée vers la solution
– Le développement des syndromes psychotraumatiques. Quels sont les facteurs de risques ?
– Victimes, une épopée conceptuelle. Première partie : définitions
– Le vécu de l’enfant atteint d’une maladie cancéreuse. Diagnostic et première hospitalisation
– Le vécu des parents d’un enfant malade du cancer
– Métaphore et Traumatisme psychique
– La torture de masse. Le cas de l’ex-Yougoslavie
– Les violences sexuelles. Définitions d’un concept multiforme
Stress et traumatisme du personnel expatrié
Sur http://www.psychologiehumanitaire.netfirms.com :
– Les expatriés dans la tourmente. Le stress humanitaire
– Les expatriés à l’épreuve des séismes
– Comment faire? Le débriefing psychologique des expatriés affectés par un incident critique
– Comment gérer le stress dépassé lié à l’expatriation ?
– Commet gérer le stress traumatique survenant dans le cadre d’une expatriation ?
– Le défusing du personnel expatrié affecté par un incident critique
– Le débriefing psychologique dans un cadre professionnel
– Le soutien immédiat et post-immédiat des expatriés affectés par un incident critique
– Le soutien psychosocial des équipes humanitaires. De l’incident critique à la prise de décision
Problématiques humanitaires
Sur http://www.psychologiehumanitaire.netfirms.com :
– Guide pour un assessment rapide des besoins psychosociaux et en santé mentale des populations affectées par une catastrophe naturelle
– Le traumatisme dans les catastrophes humanitaires
– Reconstruire le quotidien après un traumatisme collectif. Éloge du quotidien, de la routine, des rites et des rituels
– Les enfants des rues. L’enfer du décor
– Violences sexuelles et conflits armés en Afrique
Divers
Sur http://www.stressaeronautique.netfirms.com :
– Stress aéronautique. Peur de voler, phobie de l’avion, panique à bord
Sur http://www.resilience.netfirms.com :
– Familles en difficulté. Guide à l’intention du psychothérapeute orienté vers la solution
Sur http://www.acouphenes.netfirms.com :
– Les acouphènes. Traitement par l’hypnose
[1] Pour plus de détails sur la définition d’une catastrophe, nous renvoyons le lecteur à l’article du même auteur : « Le traumatisme dans les catastrophes humanitaires », http://www.victimology.be/fr/articles/Traumatisme_catastrophes_humanitaires.pdf, 2006
[2] Face à une situation difficile, nous ne restons pas inactifs mais nous tentons d’y répondre. En anglais, on parle de « coping » (du verbe « cope with » signifiant faire face). Le coping peut être défini comme la façon dont nous raisonnons et agissions pour remédier aux situations stressantes. La manière dont nous appréhendons celles-ci détermine autant, sinon plus, nos réactions que la source de stress elle-même. Ces processus de coping ne sont pas des traits de personnalité inhérents à l’individu mais des stratégies d’ajustement que l’on adopte en fonction des agents stressants. Ils peuvent être orientés vers la diminution de la réaction de stress (relaxation, activité de détente, relativiser, penser à autre chose) ou vers le contrôle de la situation stressante (recherche d’information et de solutions). Ils peuvent être « évitant » (agressivité, déni, résignation, fuite, consommation d’alcool, de médicaments ou de drogues) ou « vigilant » (recherche d’information, de moyens et de solutions, recherche de soutien social).
[3] Laboratoire d’Analyse et de Traitement Informatique de la Langue Française
Trésor de la Langue Française informatisé (version simplifiée), http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/fastshowart.exe?63%7DQUOTIDIEN%2C+-IENNE%2C+adj.+et+subst.%7D463101%7D463102%7D463105%7D0%7D5
[4] Laboratoire d’Analyse et de Traitement Informatique de la Langue Française
Trésor de la Langue Française informatisé (version simplifiée), http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/fast.exe?routine
[5] Selon le terme de Erving Goffman cité par Dominique Picard dans son article « Transition et ritualité dans l’interaction sociale » http://www.cairn.info/resume.php?ID_REVUE=CNX&ID_NUMPUBLIE=CNX_076&ID_ARTICLE=CNX_076_0081
[6] Laboratoire d’Analyse et de Traitement Informatique de la Langue Française
Trésor de la Langue Française informatisé (version simplifiée), http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/fast.exe?habitude
[7] Laboratoire d’Analyse et de Traitement Informatique de la Langue Française
Trésor de la Langue Française informatisé (version simplifiée),
[8] Laboratoire d’Analyse et de Traitement Informatique de la Langue Française
Trésor de la Langue Française informatisé (version simplifiée), http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/fastshowart.exe?63%7DQUOTIDIEN%2C+-IENNE%2C+adj.+et+subst.%7D463101%7D463102%7D463105%7D0%7D5
[9] Laboratoire d’Analyse et de Traitement Informatique de la Langue Française
Trésor de la Langue Française informatisé (version simplifiée), http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/fast.exe?rite
[10] Laboratoire d’Analyse et de Traitement Informatique de la Langue Française
Trésor de la Langue Française informatisé (version simplifiée), http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/fast.exe?rituel
[11] Evidemment, les positions statutaires ne sont pas immuables. Il existe des rituels de passage qui permettent d’avaliser un changement de statut (par exemple, rites du mariage, deuil, remise de décoration, cérémonie célébrant la mise à la retraite, etc.).
[12] Les rituels ne sont évidemment pas tous invariables. Certains disparaissent tandis que d’autres remplissant un rôle similaire apparaissent.
[13] Décès, perte de biens matériels tels que foyer, terres ou possessions matérielles ; perte d’un mode de vie composé d’activités, d’un voisinage, de rôles sociaux, etc. ; pertes d’autres éléments nécessaires au bien-être émotionnel comme la sécurité, les souvenirs, les photographies, les animaux, etc.
[14] Selon Claude Levy-Srauss
[15] Cf. Toute la communauté est touchée, page 5.
[16] Ces mesures n’en empêchent pas d’autres, centrées sur les individus les plus vulnérables. Les personnes présentant des troubles psychologiques suite à l’événement traumatique doivent être identifiées et une assistance spécifique doit leur être proposée. On se rappellera néanmoins qu’une communauté forte est à même de soutenir les personnes les plus vulnérables (cf. page 5). L’assistance spécifique peut être clinique (par exemple, counselling, groupe de parole, psychothérapie, etc.) et/ou ou psychosociale (mettre les personnes vulnérables en contact avec les services existants ou avec les ressources communautaires). Ces interventions ne font cependant pas l’objet du présent article.
[17] Cf. L’information est un facteur de récupération, page 6.
[18] Cf. Le retour à la routine quotidienne est un facteur de récupération, page 7.
[19] Cf. Le support social et familial est un facteur de récupération, page 6.
[20] Une bonne information, le support social et familial, le retour à la routine quotidienne, les comportements d’adaptation, voir page 6.
[21] Les causes de stress sont évidentes mais les rescapés ignorent souvent que leurs symptômes en sont une conséquence.
[22] Cf. Fonction du quotidien, des habitudes, de la routine, des rituels et des rites, page 12.
[23] Cf. Fonction de régulation et de médiation des rituels, page 14
[24] De nombreux rescapés souffrent de troubles du sommeil. Dès lors, ils ont tendance à se coucher tard dans la nuit et à dormir en matinée. Leur rythme est ainsi de plus en plus décalé par rapport à celui nuit – jour.
[25] Les rites religieux sont à la fois des rituels individuels (mécanisme de coping permettant de trouver l’apaisement) et sociaux (être ensemble).
[26] Par ailleurs, les cuisines collectives limitent la consommation de combustible. Ceci n’est pas négligeable. En effet, l’emploi de ressources locales pour le combustible (les arbres) peut avoir des conséquences extrêmement néfastes sur le milieu naturel (déforestation).
[27] Les rescapés qui souffrent de troubles du sommeil ont tendance à se regrouper pour discuter ou se détendre, parfois de façon bruyante, gênant ainsi le repos des autres résidents.
[28] Enrôler les rescapés dans des activités utiles, c’est tenir compte, inclure et consolider activement leurs « zones psychiques » restées intactes du souffle traumatique.
[29] Les activités sociales habituelles en font partie.
[30] Les théâtres-forum sont très populaires dans certains pays comme la Sierra Léone et le Libéria. Les théâtres de marionnettes sont très prisés dans certains pays d’Asie comme l’Indonésie.
[31] Par facilité, les camps de réfugiés sont encore trop souvent conçus comme des camps militaires (quadrillage de l’espace, allées rectilignes se croisant à angles droit). Cet aménagement n’est pas naturel et ne promeut pas le bien-être social.
[32] Cf. page 18 pour le type d’information.
[33] Lieux où les risques de voyeurisme et d’abus sexuels sont accrus. Nous renvoyons les personnes intéressées aux articles du même auteur : « Accueillir et soutenir les victimes de violences sexuelles. Approche orientée vers la solution », 2006 et « Les violences sexuelles. Définitions d’un concept multiforme », 2006 sur http://victimology.be, Zone professionnelle, articles
[34] Pour faciliter la construction du camp, tous les arbres sont parfois rasés.