CRIE : « ME »

Les logomachies de Narcisse


Aux pâles matins des feuilles blanches où ta main percheronronne les boucles embrassées des sillons surannés d’un temps que tu dis passé, à la monotonie de tes accords secrets, à la nostalgie de tes étreintes, à tes pleurs de jadis, à tes rires d’autrefois, à tes destins d’alors, ta plume convie.

Charmes………………………………………………………………………………

• Tu ne me prendras pas si facilement à de tels miroitements. J’ai trop peiné pour n’avoir rien appris.

• Ça y est le philtre agit. Je te tiens !

• Non, pas si vite. Dis-moi, toi qui dis ne parler que de toi, tu ne l’ignores point…..

• Précise ?

• Dans le regard de ton regard sont d’autres regards et bien d’autres faims encore. Pourquoi choisis-tu celles-ci ?

• Lecteur niais ; nié moi-même, je suis le brame des images. Un regard me choisit, un mot m’emporte.

• Pourtant tu le sais….

• Je le sais, mais je l’oublie. C’est pourquoi j’écris.

• Je t’accuse d’arbitraire. Je t’accuse de mensonge. Relis-toi. Le passé témoigne contre toi. Il n’erre pas dans les champs où tu le places. D’ailleurs, connais-tu le passé ? Où est-il le passé ? Hein le Saint et Auguste passé. Regarde bien à ta droite comme à ta gauche, devant toi et surtout sans te retourner, derrière ; c’est habituellement sa niche. Ah ! il n’y est pas. As-tu bien cherché ? Scrute scrupuleusement encore, en haut et puis en bas entre tes orteils, au dehors et en dedans. Fouille toutes les pièces…..

• Alors ? Tu le confesses. Tu ne vois toujours que du présent. Rassure-toi, moi aussi : du présent partout, dans ce que tu appelles hier comme dans ce que tu crois demain. Attends, ne pars pas. Dis-moi encore ? As-tu une seule fois dans ta vie, un seul instant pu déplacer ne serait-ce que d’un iota le décours des horloges suprêmes et goûter à d’autres pains ? Remarque bien, je ne suis pas exigeant, un iota me suffit.

• …………………………………………………………………………………………………

• Monsieur ne répond pas. Monsieur sait bien tout comme moi qu’il fait semblant. Voilà tout. La vérité….

• La vérité, la vérité. En vérité, je l’attendais celle-là, avec ses pieds plats. Le taureau de la vérité est lâché dans l’arène. Olé ! Et bien ris, c’est risible. Mais mon pauvre ami, la vérité c’est ce qu’on arrive à faire croire aux autres.

• Aux autres peut-être, mais pas à moi. La vérité est qu’on ne consomme pas deux fois exactement la même farine. La seconde qui passe se transmute en de nouvelles chairs. Le temps cesse d’être du temps. Et le souvenir n’est que le faussaire de l’esprit, un ramassis d’illusions attifées des oripeaux d’un style forcément clinquant et trompeur prostitué à la mode d’un moment…

• Holà, comme tu y vas ! Comme tu me dépouilles ! J’étais sincère moi. Cette illusion était la plus vraie que j’avais pu trouver sur mon marché. Elle m’avait coûté fort cher. Illusion sans doute, mais oh combien, chère illusion. Illusion amante de mon moi, autant que maîtresse, qui me fait tel que j’ose me montrer. Ecran de mes joies. Illusion de ma joie diras-tu. D’accord, mais connais-tu de plus seyants habits pour l’exprimer ? Je puise à la source commune. Où est le mal ? J’use des mêmes moyens, des mêmes locutions, des mêmes codes pour que d’autres m’entendent. Pardon, je nous trompe, pour que d’autres s’entendent eux-mêmes en croyant m’écouter et qu’ils puissent en disant « Lui », se dévoiler pudiquement alentour sans même s’en rendre compte. Illusion, illusion ! L’illusion serait bien plus grande encore de croire l’illusion illusoire, car alors qui serais-je ?………………………… Laisse-moi reprendre mon propos selon mes vœux, afin que le temps s’arrête sur un portrait et qu’au travers de l’éternité tel le sarcophage d’un Dieu, cette œuvre témoigne de celui que je fus, selon l’idéal. Ainsi, je n’aurai pas vécu en vain.

• Soit !

• ……………………………………………………………………………………………

• ……………………………………………………………………………………………

• Le quasar NC 4728 à l’acmé d’un instant critique venait très précisément de jaculer dans l’espace la plus formidable bouffée d’énergie… Tu ne dis rien ?

• J’écoute religieusement.

• Je continue. Bien ! Jupiter très loin de là était alors très précisément……

• Tu as déjà écrit « précisément ».

• Merci c’est vrai. Je reprends…très exactement aligné avec Neptune et Pluton…….

• La routine quoi !

• C’est à cet instant précis, non exact, non : c’est juste à cet instant que je suis né.

• Né, nié, niais, n’y est….pour personne.

• D’accord je recommence. Ce jour…j’abandonne la précision, bien qu’à regret….pour l’édification des générations futures…donc, ce jour dis-je, nous nous sommes réunis en comité restreint quoique élastique pour parler de moi, de moa, de moah, de morah.

• Arrête ! Qui c’est celui-là ?

• Je est plusieurs…………………………

• ………….qui ne s’entendent pas très très bien ensemble.

• Mais à la fin, tu avais dit « Soit ». C‘était un pacte…. Et tu m’agresses maintenant.

• Non, je te sauve. Quand je est un Autre, on finit toujours par mourir du « Je-nous ».

• Je ne comprends pas.

• Tu tends à refermer l’espace.

• Jamais de la vie, je nous pérennise.

• Non tu es inquiet devant moi-même, devant ma mort, …..la tienne. Tu ponds des mots d’élevage,….en batterie. Tu enfiles des lettres les unes dans les autres pour péniblement te faire un collier de l’être, pour faire croire…… Tu sais je devines que tu peux te passer d’une femme, qu’elle soit blonde, brune ou rousse. …d’une femme et même d’une mère, d’un père…

• Oh !

• Oui, d’un père et…

• Exactement…pour t’engendrer toi-même. Mais tu ne ferais qu’une crotte de plus.

• Dans ce cas le monde est plein de crottes et des tas de gens bien en tartinent des pages. D’ailleurs, pourquoi ne pourrais-je pas m’auto-engendrer, s’il vous plaît. La science aujourd’hui m’y autorise. C’est possible. C’est permis.

• Le comité d’éthique.

• Le con mité des tics. Dépassé ! Je peux très bien me cloner à l’infini et choisir le meilleur utérus pour me porter. Hélas ! Pour le moment je ne peux pas encore me passer du bassin d’une femelle. Ainsi je serai éternel, puisqu’à l’atome près mon génotype génial sera perpétué.

• Il faut arrêter toutes ces cloneries. Là où il y a des gènes on dit qu’il n’y a pas de plaisir et c’est au plaisir que tu veux échapper. Je la vois venir ton entreprise orgueilleuse…

• Orgueilleux, moi ? tu n’as pas bien lu tout le mal que je disais de nous parfois.

• Orgueilleux oui, et même mégalomane. Ton projet autobiographique, autobiogénique faudrait-il crier, poursuit depuis des siècles les mêmes idéaux perfectionnistes que ceux que la science fait miroiter aujourd’hui à ton ego ébloui. Et parfois le mot SScience commence, s’écrit, s’écrie, se hurle même, avec deux S, SS. Non seulement tu veux nier la différence des sexes après celle des générations, mais tu vas plus loin encore, tu veux nier la différence des différences, la différence des autres, la différence en soi. Tu crois, parce que c’est ça dans le fond, tu crois que tes pauvres mythes vont par le miracle des éprouvettes sauter de ta tête chenue dans la cervelle toute fraîche d’un nouveau-né braillard, sous prétexte qu’il n’est que de toi, …et en plus qu’il n’est que toi. Le jumeau parfait, hormis l’âge.

• ………………………………………hmmmm !………………………..

• L’espace n’est pas le même. Tu es toi à l’endroit exact du lieu que tu occupes de tout ton ventre mou et même si ça dure quelques fractions d’éternité, tu n’es pas, tu ne seras jamais ailleurs. Double, triple, multiple si tu veux, ubiquiste….Non.

• Tu m’as convaincu. J’abandonne l’aventure. Dorénavant je ne tenterai plus de parler de moi, mais de décrire seulement toutes les lignées qui m’ont fait naître, n’être plutôt puisque tu ne veux pas que je sois…..Et bien enfin, je ne serai pas. je préciserai simplement tous les accouplements qui de générations en générations nous ont fait tels que je suis et je remonterai l’enquête aussi loin qu’il le faudra sans oublier les branches mortes et celles qu’il a bien fallu sacrifier pour que les autres aient plus de sève. Ce sera une sorte d’autophylographie.

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• Oh, après l’autoontographie…..

• Ah ! Tu l’as voulu. « Il » me tue.

• Non… « Je » tue il.

• Stop ! Le drapeau blanc. « Nous » voue ils et on se met au travail ……Hmmm ! …Ouiiiii !…..

• …….Ca y est ! J’ai déjà tracé une belle lignée ascendante. Vois, que des gens bien, à part bien sûr celui là et cet autre là…..Conviens qu’ils ne comptent guère.

• Descend de ton arbre ! D’accord, pour une belle ligne, c’est une belle ligne, formée de tas de points. Mais, approche-toi d’elle un peu. Hé ! Attention ! Pas si prés. Colle ton œil à leur fenêtre. Prends garde, te dis-je de ne point glisser. Ça aspire ces choses là !

• Bigre !

• Comme tu dis.

• Chaque point est un univers. C’est extraordinaire ! Attends, C’est pire encore. Je reconnais en ce chaos d’autres images faites de tous les possibles des éléments advenus. Non, je ne me trompe pas. On peut vérifier. Le dehors se retrouverait-il au dedans ? Quelle histoire !

• Quelle histoire ?

• Et bien je me retrouve en un lieu où je ne suis pas, où je n’ai jamais été et pourtant ce n’est pas moi.

• Qu’est-ce que je te disais ?

• C’est étrange et inquiétant. Je veux bien prendre mon plaisir partout z à la fois, mais à condition de ne pas y laisser mon unité. Or maintenant, je ne sais vraiment plus si je suis moi, qui est moi, quand je suis moi. Je suis au moins tous les autres ça a fini de m’amuser.

• Je croyais que le plaisir te faisait peur.

• Non, le plaisir sexuel seulement, comme pour tout le monde en gros. On risque trop… Tu saisis. Par contre un plaisir narcissique de bon aloi, pris tranquillement, délicatement entre soi et soi….enfin, bref ! Tu comprends. Mais là, je ne veux plus. La menace est trop grande. Je préfère rester un nain. De toutes façons, je sais maintenant que les autres qui marchent sur la pointe des pieds en jetant leurs yeux par dessus leurs sourcils pour faire les Goliath, ne sont pas plus grands que moi. D’ailleurs, tu sais….Ce n’était pas vrai…..

• Quoi qui n’était pas vrai ?

• Que David était plus petit que Goliath.

• Seulement tous le croyaient…Sauf David.

• Dieu merci !

• Je hausse les épaules.

• Je le sens bien. Tu sais, j’avais beaucoup de plaisir quand même, à montrer combien j’étais conforme d’être aussi différent. La nostalgie…

• Qui, elle n’est plus ce qu’elle était.

• Maintenant, c’est vrai, je la regrette. Elle était bien douce quand même…….

• ….Tu as vu tout le mal que tu disais de nous. C’était à en pleurer.

• C’était fait pour ça. Vraiment ça te tirait des larmes…

• Oui.

• Ahhh ! Mais de la place cachée d’où je médisais de moi, j’étais idéal. Et puis en m’accusant ainsi de tant de mal et en en souffrant sincèrement – il ne faut pas tricher – je coupais l’herbe sous les pieds de tous nos détracteurs.

• L’habile noire ! Tu aurais pu en crever.

• J’en serais sûrement mort….un jour.

• ….Donne moi la main. Viens. Je ne t’en veux pas. Il faut quand même que je t’aime, toi !….Tu as de beaux yeux, tu sais.

• Et un gros…

• Chuuuttt ! Qui pourra jamais savoir vraiment ce que voit l’œil de la pensée ?

• (Ensemble) – On a tout dit.

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• En Patagonie, tout près de la terre de feu, il fait froid, terriblement froid. Dans une baraque à l’abri du vent, un vieil indien rigole doucement. Il a une excuse. Il est ivre.

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• Alcools !

Jean Matouk Aix-en-Provence Le 13 juillet 1987

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